LLa vie politique aime les oppositions absurdes. Elles structurent le paysage, alimentent les grands discours et permettent de faire diversion quand on n’a pas d’idées. L’une des oppositions les plus réussies ces dernières années est celle des banlieues et de la France périphérique, c’est-à-dire celle des immigrés qui s’opposent aux « petits blancs ». Les « gilets jaunes » sont passés par là, le géographe Christophe Guilluy aussi, et le succès du Rassemblement national a fini de valider cette théorie. À gauche, François Ruffin s’en prend à Jean-Luc Mélenchon parce qu’il aurait abandonné « La France des villes »A droite, les dirigeants républicains ont depuis longtemps fait leur cette opposition, dénonçant « Des milliards de la banlieue ».
On se souvient bien sûr de la note de Terra Nova, en 2011, « Gauche : quelle majorité électorale pour 2012 ? », souvent utilisée pour caractériser la stratégie électorale de Mélenchon. Lors de sa publication, on concluait de cet ouvrage que les intellectuels sociaux-démocrates abandonnaient le monde du travail pour théoriser l’alliance des femmes, des jeunes et des minorités, sur le modèle qui avait si bien réussi au Parti démocrate américain dans les années 1990. Rationalisation ex post ? Lionel Jospin avait obtenu 11 % des voix ouvrières en 2002. Ou simplement changement de perspective ? Après tout, la moitié des ouvriers et employés sont des femmes, un bon nombre d’entre elles sont jeunes et la plupart des minorités appartiennent à des milieux populaires, notamment populaires.
Plutôt que de mettre les « travailleurs » dans un grand sac, la note de Terra Nova adopte un autre point de vue pour aborder cette population : non plus celui des catégories socioprofessionnelles, mais celui des caractéristiques personnelles, considérant qu’être jeune, femme et/ou immigré décrivait parfois plus efficacement le statut d’outsider, voire de subordonné, des personnes concernées. La véritable rupture se situe avec l’analyse marxiste, qui réduit les individus à leur position socio-économique, et non avec les cibles électorales de la gauche.
Cette erreur d’analyse sur la note Terra Nova est intéressante, car c’est le même type de falsification qui est à l’œuvre dans la construction de l’opposition « villes versus tours ». Quittons l’ordre du discours et regardons la réalité. On y voit en fait tout autre chose qu’une opposition entre les banlieues et les sous-préfectures, les Blancs et les basanés. Les catégories les plus fragiles ont toutes les mêmes problèmes : pouvoir d’achat trop faible en période d’inflation, sur-chômage flagrant quand on regarde le sujet par stratification sociale, exposition plus grande aux conséquences du changement climatique, qui vont s’aggraver. La désindustrialisation chère à François Ruffin a touché les petites villes, les bassins miniers et industriels de l’Est et du Nord ainsi que les banlieues autrefois industrielles des grandes villes. La part des ouvriers a fondu. Et parmi ces ouvriers, il y avait des Français de longue extraction comme beaucoup d’immigrés récents.
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