La grande distribution et les « Békés » accusés

Depuis trois semaines, la Martinique est secouée par un mouvement social d’une ampleur inédite contre la vie chère : les prix des denrées alimentaires y sont 40% plus élevés qu’en métropole, selon l’Insee. Les manifestants pointent du doigt un système de distribution à grande échelle, principalement aux mains de ceux qu’on appelle ici les “Békés”, les descendants de familles de colons.

Parmi les entreprises de distribution martiniquaises, la plus critiquée, et la plus incontournable, se nomme GBH. A sa tête, Bernard Hayot et son fils Stéphane. GBH possède les enseignes Carrefour, Mr.Bricolage, Renault (véhicules et pièces détachées auto), Decathlon, Gamm Vert, Somarec… Dans les zones commerciales du département, de nombreux magasins lui appartiennent. Mais dans le viseur des consommateurs martiniquais, il y a aussi le groupe Safo, dirigé par François Huyghues Despointes, et le groupe CréO, présidé par Patrick Fabre…

Johnny Hajjar est un ancien député et rapporteur d’une commission parlementaire sur le coût de la vie dans les Outre-mer. Même après avoir enquêté pendant six mois sur ces entreprises, elles restent très opaques à ses yeux.

Ces grands groupes justifient les différences de prix entre la Martinique et la métropole par le coût du transport des marchandises et le poids de l’octroi de mer – une taxe spécifique sur toutes les importations. Johnny Hajjar les a donc interrogés sur leur chaîne d’approvisionnement. Sur le schéma que lui a transmis le groupe CréO, quatorze intermédiaires sont visibles (contre trois en métropole). Tous facturent chaque étape de transformation de la marchandise et réalisent à chaque fois une marge.

« Les entreprises qui contrôlent la chaîne d’approvisionnement aident les grands groupes à accumuler des marges et à faire des profits, au détriment du consommateur qui a un prix très élevé en bout de chaîne. »

Johnny Hajjar, ancien député (Parti Progressiste Martiniquais)

dans “Envoyé spécial”

Selon J. Hajjar, derrière certains intermédiaires se cachent des entreprises qui appartiennent également à ces grands groupes. Une organisation loin d’être « optimisé pour aider le consommateur à obtenir le prix le plus bas », note l’ancien député.

Contactés, ces groupes reconnaissent posséder des entreprises qui agissent comme intermédiaires dans la chaîne d’approvisionnement, mais pas à tous les niveaux. Et ils affirment faire tout ce qu’ils peuvent pour réduire les coûts pour les Martiniquais…

Extrait de « Vie chère : la colère sous les tropiques », un reportage à suivre dans « Envoyé spécial » du 26 septembre 2024.

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