La justice refuse de délocaliser le judiciaire

La justice a rejeté une demande de délocalisation du procès contre des militants indépendantistes accusés d’avoir orchestré des émeutes en Nouvelle-Calédonie, une décision critiquée par leurs avocats qui ont formé un pourvoi en cassation.

“Tous les arguments qui ont été évoqués, de mon point de vue, ne sont pas des arguments pertinents”, a déclaré le procureur général près la cour d’appel de Nouméa, Bruno Dalles, lors d’une interview jeudi sur la radio locale RRB.

Les poursuites visent des responsables de l’Unité de coordination des actions sur le terrain (CCAT), et la demande de réinstallation a été déposée par huit des treize personnes inculpées, qui dénoncent des violations répétées de la présomption d’innocence.

Le procureur général a réfuté les accusations de partialité formulées par ces avocats, rappelant que « tout le débat est de savoir si le CCAT est, en tout ou en partie, une organisation criminelle ».

Ce refus “n’est pas une surprise” et “le procureur général ne répond utilement à aucun des points évoqués”, ont réagi dix avocats des militants dans un communiqué, indiquant qu’ils saisiraient le procureur général près la Cour de cassation.

– “Sensibilité de la procédure” –

A partir du 13 mai, la Nouvelle-Calédonie est en proie à des violences d’une ampleur jamais vue depuis la quasi-guerre civile des années 1980. Onze personnes, dont deux gendarmes, ont été tuées, des centaines de personnes blessées et les dégâts matériels sont colossaux, estimés à au moins 2,2 milliards d’euros.

Les tensions restent vives et les restrictions sur la vente d’alcool, un couvre-feu et une interdiction de rassemblement sont toujours en vigueur dans l’archipel du Pacifique Sud.

Depuis le 19 juin, 13 militants indépendantistes ont été arrêtés, dont sept sont actuellement incarcérés. Cinq sont incarcérés en métropole, dont Christian Tein, le leader du CCAT, récemment nommé président du Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS), alliance indépendantiste.

Les autorités accusent ce collectif informel, créé en novembre 2023, d’avoir organisé les violences qui ont secoué l’archipel en réponse au vote à Paris d’une réforme électorale accusée par les indépendantistes de marginaliser la population indigène kanak.

Le transfert de certains militants vers la métropole avait été organisé en une nuit à l’aide d’un avion spécialement affrété, a indiqué le procureur de la République Yves Dupas, arguant du “caractère sensible de la procédure” et de la nécessité de poursuivre les investigations “de manière sereine, sans aucune pression ni collusion frauduleuse”.

Les personnes arrêtées ont été notamment accusées de complicité de tentative de meurtre, de vol à main armée en bande organisée, de destruction en bande organisée de biens d’autrui par des moyens dangereux pour les personnes et de participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un crime.

Le transfert de plusieurs d’entre eux vers la métropole a provoqué une nouvelle vague de violences.

Six des 13 personnes mises en examen sont sous contrôle judiciaire, deux d’entre elles étant assignées à résidence en France métropolitaine pour six mois.

Les avocats de huit accusés avaient déposé une requête auprès du procureur général près la cour d’appel de Nouméa pour dénoncer, selon leurs termes, « la concurrence des intérêts politiques et judiciaires qui ne permet pas de garantir le déroulement d’une information judiciaire respectant les principes d’indépendance et d’impartialité ».

Ils ont visé « de nombreuses déclarations publiques du procureur de la République selon lesquelles la CCAT serait nécessairement « responsable » des actes commis en Nouvelle-Calédonie en violation du principe de la présomption d’innocence ».

Me François Roux, avocat du FLNKS, a rappelé lors du dépôt de la demande de relocalisation que le Haut-Commissaire de la République – représentant de l’Etat en Nouvelle-Calédonie – avait qualifié les accusés de « voyous et mafieux ».

En juillet, les magistrats du tribunal judiciaire de Nouméa ont adopté une rare motion en assemblée générale demandant que cette affaire, “d’une grande complexité et surtout d’une grande sensibilité politique”, soit transférée.

“La poursuite de la gestion d’un tel dossier” au tribunal de Nouméa “pose des questions” tant “en termes de sécurité et de sûreté des lieux et des personnels” qu'”en termes de sérénité et de bonne administration de la justice”, souligne le texte, révélé par le journal Le Parisien. Les magistrats ont également relevé que par le passé sur ce territoire, “des dossiers aussi sensibles voire moins” avaient fait l’objet de délocalisations.

md-cm-al-mdh/bfa/tes

Anna

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