L’amer héritage des JO au Japon et au Brésil

Promesses non tenues, infrastructures coûteuses, nos correspondants font le point sur les Jeux Olympiques dans deux précédents pays hôtes : le Japon à Tokyo en 2021 et le Brésil à Rio de Janeiro en 2016.

Alors que la flamme olympique arrive à Marseille ce mercredi 8 mai 2024, le Club des Correspondants fait escale au Japon et au Brésil, deux villes qui ont déjà accueilli les Jeux Olympiques. Direction Tokyo, précédente ville hôte de ces Jeux olympiques et paralympiques d’été. Ils étaient prévus pour 2020, mais ont finalement eu lieu en 2021 en raison de la pandémie de Covid. Si les Japonais gardent un bon souvenir des jeux sur le plan sportif, sur le plan économique, les résultats sont globalement déficitaires. Les infrastructures nouvellement construites, considérées comme le principal héritage, sont chaque année déficitaires et coûtent encore plus cher.

Au Brésil, les Jeux olympiques de 2016 ont été une grande célébration, mais leur héritage est bien plus problématique. Malgré quelques acquis importants, l’explosion des coûts et les innombrables crises qui ont frappé le pays dans les années qui ont suivi ont terni ses résultats. D’autant que de nombreuses promesses n’ont pas été tenues. Mais à l’approche des élections municipales, le maire de Rio de Janeiro tente de redorer l’image de l’héritage des jeux.

Japon : Tokyo tente d’attribuer de nombreux développements aux JO

Si l’on en croit les petits clips promotionnels de la municipalité de Tokyo, l’héritage des JO 2021 est multiple et important, mais en réalité, un peu moins. L’aspect positif, tout d’abord, dans l’ensemble, bien que très sceptiques au départ, voire carrément contre cet événement sportif, les Japonais en ont gardé un bon souvenir sur le plan sportif, car les performances étaient au rendez-vous. Mais c’est un souvenir tout de même teinté d’amertume puisque le public a été interdit à cause du Covid. La municipalité de Tokyo et l’État ont tendance à attribuer de nombreux développements et évolutions aux Jeux olympiques, mais ce sont des changements nécessaires qui, de toute façon, auraient eu lieu sans cet événement.

Il existe plusieurs chiffres pour ces Jeux, mais ils diffèrent. Celui du comité d’organisation estime le coût total à 1.400 milliards de yens, soit au taux très bas actuel de la monnaie japonaise autour de 8,5 milliards d’euros, c’était plutôt au taux de change de l’époque. Mais ce chiffre ne prend pas en compte plusieurs autres dépenses liées aux JO. Au total, les estimations varient entre 10 et 14 milliards. Pas de public, pas de recettes de billetterie, donc un déficit global. Mais pire encore, sur les sept infrastructures durables nouvellement construites et considérées comme le principal héritage, six sont dans le rouge chaque année, coûtant donc encore plus cher. Le nouveau stade national est utilisé notamment pour des concerts, pour tenter de le rentabiliser, mais son acoustique n’est pas du tout adaptée et donc le public s’en plaint.

De nombreux scandales de corruption

Les préparatifs des jeux ont été entachés de nombreux scandales et les procès pour corruption se succèdent depuis deux ans. L’un des membres du comité d’organisation est accusé d’avoir demandé des pots-de-vin à plusieurs sponsors majeurs. Ce prévenu, dont le procès est toujours en cours, le nie, mais les dirigeants des sociétés concernées ont reconnu avoir versé de l’argent en secret et ont déjà été condamnés par le tribunal. Inutile de dire que c’est une tache. Cela a même empêché la ville de Sapporo d’être candidate aux Jeux olympiques d’hiver de 2030.

Brésil : infrastructures abandonnées, promesses non tenues

Les Jeux Olympiques de Rio de Janeiro 2016 ne sont pas un bon souvenir pour tout le monde. Près de 80 000 personnes ont été expulsées lors de la préparation des jeux. Un sacrifice nécessaire pour transformer Rio, selon les autorités de l’époque. Mais depuis ces JO à 13 milliards d’euros, la déception domine. La décontamination de la baie de Guanabara reste un rêve lointain, alors que les 150 kilomètres de lignes de trolleybus inaugurées se sont rapidement dégradées. Une nouvelle ligne de métro a été construite, mais l’une des stations prévues s’est transformée en un gouffre financier. Il s’agit même, littéralement, d’un gouffre, que les autorités ont rempli d’eau, pour éviter l’effondrement des bâtiments environnants. Si l’on y ajoute la spéculation immobilière incontrôlée, la corruption et les infrastructures sportives négligées, les résultats ne sont pas glorieux. Et puis, dès la fin des Jeux olympiques, le pays a plongé dans la crise, laissant un goût amer aux Brésiliens.

Un enjeu politique pour Rio

Le tramway et la rénovation du centre-ville restent une belle réussite. Le maire de l’époque, Eduardo Paes, de retour au pouvoir depuis 2020, entend aller plus loin, transformant d’anciennes promesses en arguments de campagne pour les élections municipales de cette année. Il écarte les critiques sur le temps perdu et accuse les crises ainsi que le mandat irrégulier de son successeur. Huit ans plus tard, il reprend les inaugurations, comme en février 2024. “Je suis en compagnie du président Lula et de tout un tas de ministres, et voici l’histoire : derrière moi, les bâtiments étaient des stades olympiques. Le premier va devenir une école publique pendant 1 000 enfants des quartiers voisins, dont la Cité de Dieu, et le second, notre ministre la transformera en campus fédéral”a-t-il déclaré.

Trois autres écoles, deux piscines, une gare routière, sont également construites à partir des bâtiments olympiques. Tout est principalement concentré dans la zone ouest, où se situe la majorité des électeurs et où domine Jair Bolsonaro. Dans des élections municipales où les enjeux sont nationaux, le maire compte sur le soutien de Lula, qui espère de son côté voir son allié remporter une large victoire à Rio.