APU GOMES / AFP
Le palmarĂšs impressionnant de Renaud Van Ruymbeke (ici en septembre 2017), cette bĂȘte noire des politiques
POLITIQUE – L’autre gentleman propre. Renaud Van Ruymbeke, ancien juge d’instruction devenu une figure de la lutte contre la corruption en France, est dĂ©cĂ©dĂ© Ă l’Ăąge de 71 ans. La France perd un grand magistrat et la Justice un immense serviteur », a saluĂ© le ministre de la Justice Ăric Dupond-Moretti ce vendredi 10 mai, en s’adressant Ă son « sincĂšres condolĂ©ances Ă sa famille et Ă ses proches. »
RetraitĂ© depuis 2019, cet homme Ă la silhouette Ă©lancĂ©e, portant une moustache et des lunettes fines, auteur de plusieurs ouvrages, fut notamment l’un des piliers de la chambre financiĂšre du tribunal de grande instance de Paris dans les annĂ©es 2000 et 2010. a enquĂȘtĂ© sur certains des dossiers politico-financiers les plus sensibles des derniĂšres dĂ©cennies, devenant tour Ă tour la bĂȘte noire de la gauche puis de la droite.
Son nom est notamment associĂ© Ă l’affaire Cahuzac, aux turpitudes de l’affaire Karachi ou encore Ă la fameuse affaire Clearstream. Et mĂȘme dans les Balkans. Retour sur ce palmarĂšs impressionnant Ă travers quelques cas marquants.
Robert Boulin, dossier Urba-SagesâŠ
Renaud Van Ruymbeke s’est heurtĂ© au pouvoir dĂšs ses dĂ©buts Ă Caen, Ă l’Ă©poque de la droite giscardienne. A 27 ans, il enquĂȘte sur une affaire marquĂ©e par le suicide en 1979 du ministre du Travail de « VGE », Robert Boulin. CitĂ© dans une affaire d’escroquerie immobiliĂšre, ce dernier accusera le juge d’avoir voulu « faire sensation sur un ministre ». Un fichier qui le contient « vaccinĂ©s pour lâavenir »confiait Renaud Van Ruymbeke en 2011.
Quelque temps plus tard, à la fin des années 1980 et au début des années 1990, Renaud Van Ruymbeke se frotte cette fois au Parti socialiste. Il hérite du délicat dossier Urba-Sages sur le financement du PS et organise une perquisition surprise au siÚge des roses.
Il met ensuite en examen l’ancien trĂ©sorier du parti, alors prĂ©sident de l’AssemblĂ©e nationale, Henri Emmanuelli, et devient la cible de l’Ăšre Mitterrand. « Vous nous rappelez les sections spĂ©ciales de Vichy »lui dit-on rue de SolfĂ©rino. “Je fais juste mon travail”, rĂ©pond ce fils de haut fonctionnaire. Emmanuelli sera finalement condamnĂ© Ă dix-huit mois de prison et deux ans de privation des droits civiques.
…Affaire Clearstream, Karachi
Le chemin du magistrat a croisĂ© pour la premiĂšre fois celui de Nicolas Sarkozy au milieu des annĂ©es 2000 au moment de l’affaire Clearstream, thĂ©Ăątre de violents affrontements entre celui qui deviendra prĂ©sident de la RĂ©publique et Dominique de Villepin.
Renaud Van Ruymbeke est ensuite restĂ© pendant six ans sous la menace d’une procĂ©dure disciplinaire, engagĂ©e parce qu’il avait parlĂ© au corbeau de l’affaire, Jean-Louis Gergorin, en dehors du cadre judiciaire. Il se dĂ©fend en invoquant « respect de la parole donnĂ©e » Ă un informateur, se dĂ©crivant avant tout comme une victime de“une tentative de dĂ©stabilisation” tandis que Nicolas Sarkozy, s’estimant souillĂ©, dĂ©nonce l’action d’un « corbeau alliĂ© Ă un juge ».
DĂšs 2010, le magistrat enquĂȘte sur un autre incendie : le volet financier de l’affaire Karachi sur des soupçons de financement illicite de la campagne d’Ădouard Balladur, dont Nicolas Sarkozy fut le porte-parole en 1995. Ce n’est pas tout.
Sans oublier Cahuzac ou Balkany
Le nom de Renaud Van Ruymbeke est forcĂ©ment associĂ© Ă celui de JĂ©rĂŽme Cahuzac. Avec Roger Le Loire, il a Ă©tĂ© dĂ©signĂ© en 2013 pour diriger l’enquĂȘte liĂ©e Ă l’ancien ministre du Budget de François Hollande, accusĂ© de blanchiment de fraude fiscale et soupçonnĂ© d’avoir dĂ©tenu un compte en Suisse. Il a finalement Ă©tĂ© condamnĂ© en 2018 pour fraude fiscale Ă quatre ans de prison, dont deux avec sursis, et cinq ans d’inĂ©ligibilitĂ©.
Enfin, le chemin du juge a croisĂ© celui du couple Balkany, toujours au milieu des annĂ©es 2010, lorsqu’il enquĂȘtait sur des soupçons de blanchiment de fraude fiscale, entre autres. Quelques annĂ©es plus tard, en 2018, c’est Richard Ferrand qui donnait des sueurs froides Ă Renaud Van Ruymbeke. Doyen des juges d’instruction de la place financiĂšre de Paris, il est alors dĂ©signĂ© pour enquĂȘter sur des soupçons de prises illĂ©gales d’intĂ©rĂȘts visant celui qui prĂ©sidait alors le groupe des dĂ©putĂ©s de la majoritĂ© macroniste. Un de ses tout derniers dossiers.
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Le palmarĂšs impressionnant de Renaud Van Ruymbeke (ici en septembre 2017), cette bĂȘte noire des politiques
POLITIQUE – L’autre gentleman propre. Renaud Van Ruymbeke, ancien juge d’instruction devenu une figure de la lutte contre la corruption en France, est dĂ©cĂ©dĂ© Ă l’Ăąge de 71 ans. La France perd un grand magistrat et la Justice un immense serviteur », a saluĂ© le ministre de la Justice Ăric Dupond-Moretti ce vendredi 10 mai, en s’adressant Ă son « sincĂšres condolĂ©ances Ă sa famille et Ă ses proches. »
RetraitĂ© depuis 2019, cet homme Ă la silhouette Ă©lancĂ©e, portant une moustache et des lunettes fines, auteur de plusieurs ouvrages, fut notamment l’un des piliers de la chambre financiĂšre du tribunal de grande instance de Paris dans les annĂ©es 2000 et 2010. a enquĂȘtĂ© sur certains des dossiers politico-financiers les plus sensibles des derniĂšres dĂ©cennies, devenant tour Ă tour la bĂȘte noire de la gauche puis de la droite.
Son nom est notamment associĂ© Ă l’affaire Cahuzac, aux turpitudes de l’affaire Karachi ou encore Ă la fameuse affaire Clearstream. Et mĂȘme dans les Balkans. Retour sur ce palmarĂšs impressionnant Ă travers quelques cas marquants.
Robert Boulin, dossier Urba-SagesâŠ
Renaud Van Ruymbeke s’est heurtĂ© au pouvoir dĂšs ses dĂ©buts Ă Caen, Ă l’Ă©poque de la droite giscardienne. A 27 ans, il enquĂȘte sur une affaire marquĂ©e par le suicide en 1979 du ministre du Travail de « VGE », Robert Boulin. CitĂ© dans une affaire d’escroquerie immobiliĂšre, ce dernier accusera le juge d’avoir voulu « faire sensation sur un ministre ». Un fichier qui le contient « vaccinĂ©s pour lâavenir »confiait Renaud Van Ruymbeke en 2011.
Quelque temps plus tard, à la fin des années 1980 et au début des années 1990, Renaud Van Ruymbeke se frotte cette fois au Parti socialiste. Il hérite du délicat dossier Urba-Sages sur le financement du PS et organise une perquisition surprise au siÚge des roses.
Il met ensuite en examen l’ancien trĂ©sorier du parti, alors prĂ©sident de l’AssemblĂ©e nationale, Henri Emmanuelli, et devient la cible de l’Ăšre Mitterrand. « Vous nous rappelez les sections spĂ©ciales de Vichy »lui dit-on rue de SolfĂ©rino. “Je fais juste mon travail”, rĂ©pond ce fils de haut fonctionnaire. Emmanuelli sera finalement condamnĂ© Ă dix-huit mois de prison et deux ans de privation des droits civiques.
…Affaire Clearstream, Karachi
Le chemin du magistrat a croisĂ© pour la premiĂšre fois celui de Nicolas Sarkozy au milieu des annĂ©es 2000 au moment de l’affaire Clearstream, thĂ©Ăątre de violents affrontements entre celui qui deviendra prĂ©sident de la RĂ©publique et Dominique de Villepin.
Renaud Van Ruymbeke est ensuite restĂ© pendant six ans sous la menace d’une procĂ©dure disciplinaire, engagĂ©e parce qu’il avait parlĂ© au corbeau de l’affaire, Jean-Louis Gergorin, en dehors du cadre judiciaire. Il se dĂ©fend en invoquant « respect de la parole donnĂ©e » Ă un informateur, se dĂ©crivant avant tout comme une victime de“une tentative de dĂ©stabilisation” tandis que Nicolas Sarkozy, s’estimant souillĂ©, dĂ©nonce l’action d’un « corbeau alliĂ© Ă un juge ».
DĂšs 2010, le magistrat enquĂȘte sur un autre incendie : le volet financier de l’affaire Karachi sur des soupçons de financement illicite de la campagne d’Ădouard Balladur, dont Nicolas Sarkozy fut le porte-parole en 1995. Ce n’est pas tout.
Sans oublier Cahuzac ou Balkany
Le nom de Renaud Van Ruymbeke est forcĂ©ment associĂ© Ă celui de JĂ©rĂŽme Cahuzac. Avec Roger Le Loire, il a Ă©tĂ© dĂ©signĂ© en 2013 pour diriger l’enquĂȘte liĂ©e Ă l’ancien ministre du Budget de François Hollande, accusĂ© de blanchiment de fraude fiscale et soupçonnĂ© d’avoir dĂ©tenu un compte en Suisse. Il a finalement Ă©tĂ© condamnĂ© en 2018 pour fraude fiscale Ă quatre ans de prison, dont deux avec sursis, et cinq ans d’inĂ©ligibilitĂ©.
Enfin, le chemin du juge a croisĂ© celui du couple Balkany, toujours au milieu des annĂ©es 2010, lorsqu’il enquĂȘtait sur des soupçons de blanchiment de fraude fiscale, entre autres. Quelques annĂ©es plus tard, en 2018, c’est Richard Ferrand qui donnait des sueurs froides Ă Renaud Van Ruymbeke. Doyen des juges d’instruction de la place financiĂšre de Paris, il est alors dĂ©signĂ© pour enquĂȘter sur des soupçons de prises illĂ©gales d’intĂ©rĂȘts visant celui qui prĂ©sidait alors le groupe des dĂ©putĂ©s de la majoritĂ© macroniste. Un de ses tout derniers dossiers.
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