Un décret, actuellement en consultation, entend encourager le partage des trajets des malades en ambulance ou en taxi.
Sévèrement critiqué par les taxis, le projet gouvernemental de covoiturage santé devrait bientôt voir le jour. Le décret est actuellement en consultation, et pourrait être publié dans les prochains mois, informe le cabinet du ministre de la Santé Frédéric Valletoux. La mesure figure dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2024 voté en décembre dernier, et entend favoriser le partage des déplacements des malades en ambulance ou en taxi.
Concrètement, sans motif médical valable pour refuser le covoiturage, les patients n’auront plus droit au tiers payant et devront donc avancer les frais. Ils ne seront alors remboursés par l’Assurance Maladie que sur la base du tarif du transport partagé. Si franceinfo a donné quelques précisions sur le projet de décret, une source proche du dossier estime que “beaucoup de fausses nouvelles” ont été relayés. “Le transport partagé exclut tous les cas d’urgence, et c’est le médecin qui choisit s’il y a ou non un transport partagé”, on se recentre du côté de l’entourage de Frédéric Valletoux. Ainsi, les patients sous dialyse ou chimiothérapie ne seront par exemple pas concernés, tente de rassurer le gouvernement.
Et “rien n’est décidé sur le kilométrage, ça sortira de la concertation”, ajoutons-nous de la même source. Une réponse à l’article de Franceinfo, qui évoque un détour de 10 kilomètres possible par passager d’une ambulance ou d’un taxi médical, dans la limite d’un détour total de 30 kilomètres. Quoi qu’il arrive, il y aura “nécessairement” une dégradation du service aux patients, a regretté sur Franceinfo Alain Olympie, représentant des usagers de l’AP-HP à l’hôpital Saint-Antoine, à Paris.
Les associations de patients s’inquiètent en effet de l’impact de ces changements, notamment pour les patients qui doivent être traités par dialyse ou chimiothérapie. L’association Renaloo, qui représente les patients atteints d’insuffisance rénale, les dialysés ou les greffés, a écrit au ministère et à l’Assurance maladie pour exiger que « ni les délais d’attente ni les retards liés à cette nouvelle organisation des transports ne peuvent conduire à une dégradation de la qualité, de la continuité et de la durée des soins ». Elle souhaite que les déplacements et les temps d’attente soient également pris en compte. Autre inquiétude des représentants des patients : aucune obligation de port de masque et de gestes barrière n’est prévue.
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6 milliards d’euros de dépenses
Pour le gouvernement, à la recherche de milliards d’économies budgétaires, le transport sanitaire représente une aubaine importante. « Les dépenses se comptent en milliards », confirme une source proche du dossier. Plus précisément 6 milliards d’euros, remboursés par l’Assurance maladie, selon les chiffres 2022 de la Drees, la direction statistique du ministère de la Santé. Un montant en hausse de 7,7% en un an.
Dans le PLFSS 2024, le gouvernement met ainsi en avant l’objectif de « maîtrise des dépenses d’assurance maladie ». « Le coût du transport partagé est en effet 15 à 35 % inférieur par déplacement, selon le nombre de patients transportés simultanément », est-ce mentionné dans le texte. Alors que seulement 15 % des déplacements sont aujourd’hui partagés, l’objectif est de réduire le coût des déplacements pour la Sécurité sociale de 100 millions d’euros par an entre 2025 et 2027.
Dans l’article 30 du PLFSS 2024, qui concerne le transport sanitaire, l’exécutif pointe également deux autres objectifs : « améliorer la réponse aux besoins de transport » Et « la réduction de l’empreinte écologique de ce secteur d’activité qui totalise aujourd’hui 65 millions de déplacements par an pour les seuls taxis et véhicules médicaux légers (VSL) ». Ces arguments ne convainquent pas les taxis, qui pointent le manque à gagner potentiel : en milieu rural, le transport sanitaire représente jusqu’à 90 % du chiffre d’affaires des professionnels, selon la Fédération des artisans du taxi.