Le Français Théo Clerc condamné à 3 ans de prison en Azerbaïdjan pour des graffitis

LLa condamnation a laissé les proches de Théo Clerc complètement désemparés. « Tout s’est accéléré mardi dernier », raconte son frère, Charlie, joint par téléphone. Ce jour-là, un tribunal de Bakou a décidé de rendre son jugement, avant la fin des auditions de témoins. Trois ans de prison, pour des graffitis dessinés sur une rame de métro et une accusation de « hooliganisme », un chef d’accusation régulièrement utilisé par les autorités azerbaïdjanaises pour condamner à tort des opposants ou des journalistes.

Arrêté avec deux autres personnes le 31 mars, Théo Clerc, graffeur parisien de 38 ans, a déjà passé cinq mois en détention préventive, partageant sa cellule avec des détenus parfois violents.

« Il fait partie d’un collectif assez connu dans ce domaine, il a voyagé partout dans le monde, au Japon, en Australie, au Mexique, en Amérique du Sud… Au printemps, il a retrouvé deux autres membres du collectif, un Australien et un Néo-Zélandais, ils étaient allés en Géorgie et en Arménie et voulaient aller voir l’Azerbaïdjan », raconte le frère de l’artiste, qui est allé lui rendre visite en prison à deux reprises.

Relations désastreuses entre la France et l’Azerbaïdjan

Ses deux complices n’ont pas été jugés avec la même sévérité. Laissés sous surveillance après leur interpellation, sans possibilité de quitter le territoire, ils ont été condamnés à une simple amende d’environ 3.600 euros. L’avocat du Français souligne que « le tribunal n’a pas relevé de différence dans les accusations, hormis leur nationalité ». Selon lui, le passeport français de Théo Clerc serait donc la véritable raison de son maintien en détention. « Le juge aurait voulu le libérer mais il n’a pas pu », a suggéré une source judiciaire.

L’affaire de ce graffeur imprudent est désormais au cœur des relations diplomatiques exécrables entre la France et l’Azerbaïdjan. Le 5 septembre, le ministère des Affaires étrangères a formellement déconseillé aux ressortissants français de se rendre en Azerbaïdjan. Le centre de crise et de soutien du Quai d’Orsay a alerté sur « un risque d’arrestation, de détention arbitraire et de procès inéquitable », avec « de lourdes peines de prison à l’issue de procès qui risquent de ne pas respecter les droits de la défense ». A Bakou, le ministère des Affaires étrangères a réagi en parlant d’une « campagne de dénigrement » contre l’Azerbaïdjan. La condamnation de Théo Clerc, quelques jours plus tard, a cependant confirmé ces craintes.

Les proches de Théo Clerc lancent une pétition en ligne

Sa famille, qui avait d’abord choisi de rester discrète, est « tombée de ses chaises » en apprenant la condamnation à trois ans de prison et souhaite désormais se faire entendre. Ses proches ont lancé une pétition en ligne pour réclamer la libération rapide de Théo. Sa mère se dit prête à « s’enchaîner à l’ambassade d’Azerbaïdjan pour se faire entendre ».

L’affaire risque désormais de s’enliser alors que Bakou tente d’établir un rapport de force. Un autre Français, Martin Ryan, est détenu par l’Azerbaïdjan depuis de longs mois. Accusé d’espionnage, il a été arrêté en décembre 2023 et risque plusieurs années de prison. En arrière-plan, Bakou critique la France pour son soutien fort à l’Arménie depuis 2020, matérialisé par des livraisons d’armes.

De son côté, l’Azerbaïdjan a lancé une vaste campagne d’influence et de désinformation contre la France, dénonçant sa politique coloniale en Nouvelle-Calédonie, aux Comores, aux Antilles et en Corse. Dans ce contexte tendu, Emmanuel Macron devrait éviter de se rendre à la COP 29, qui doit s’ouvrir le 11 novembre à Bakou.