Le milliardaire, le roi d’Angleterre et les nazis

LL’opposé de la décadence n’est pas le succès, mais la décence. Le manque de discipline va de pair avec un effondrement de la moralité. Non pas (encore) la morale publique, mais la morale individuelle, dignité du quotidien, qui exige de la retenue envers soi-même et ses vices.

Autrement dit : quand nous faisons quelque chose, bien souvent, c’est parce que nous vivons d’une manière ou d’une autre. Les régimes politiques, soumis à la même épreuve, doivent, pour survivre, limiter la bassesse qu’implique intrinsèquement le pouvoir, et contenir le désir de tyrannie, cette tentation de toutes sortes de pouvoir. Les monarchies d’Ancien Régime qui ont survécu à la modernité ont généralement réussi cet exploit. Les Bourbons d’Espagne ont restauré la démocratie et les Windsor d’Angleterre ne sont pas devenus fascistes. Cependant, cela n’est pas allé loin.

Fils d’un cheminot

Thierry Lentz consacre son dernier livre* à Charles Bedaux (1886-1944), l’un des antihéros les plus sulfureux et fascinants de la fin des années 1930. Ce fils de cheminot, né à Charenton, a bâti une fortune considérable aux Etats-Unis, où il était le cinquième homme le plus riche et où il a essentiellement inventé les cabinets de conseil aux entreprises, ce qu’on appelle aujourd’hui consultant.

Dans le sillage d’Henry Ford, il imagine une rationalisation optimale du travail des travailleurs, entre productivité, efficacité et rentabilité, le « système Bedaux », adopté à (…) Lire la suite