La coïncidence est fortuite, mais pleine de sens. Mardi 3 septembre, deux faits d’actualité liés à Volkswagen (VW) se sont entrechoqués. D’un côté, l’annonce par le constructeur d’une possible fermeture d’usines en Allemagne, une première dans ses quatre-vingt-dix ans d’histoire. De l’autre, le début du procès contre l’ancien PDG du groupe, Martin Winterkorn, classé sans suite en septembre 2015 après la révélation de fraudes massives sur les émissions des moteurs diesel. L’affaire – le « dieselgate » – a coûté 30 milliards d’euros au groupe, dans le plus grand scandale de l’histoire de l’automobile.
Ces deux événements représentent des tournants majeurs dans l’histoire industrielle allemande. Comme pour le « dieselgate », la crise actuelle chez Volkswagen met en lumière les faiblesses du « made in Germany » et la fin d’un certain modèle. Si le scandale des moteurs truqués a précipité le virage du groupe vers le moteur électrique, longtemps méprisé, la possible fermeture de sites de production marque la fin d’une époque où les profits réalisés à l’étranger compensaient les insuffisances structurelles de la production en Allemagne. Il n’est pas étonnant que les coûts du « dieselgate » aient été absorbés par les profits réalisés en Chine dans les années 2010. Cette source s’est aujourd’hui tarie.
Comme en 2015, le comité des employés de VW (ou Comité des opérations), bastion du syndicat IG Metall, va mener une lutte acharnée pour l’emploi au nom d’un modèle unique au monde, mais souvent critiqué, celui du droit à la codécision, le Participer à la lutte contre le virusNées au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, suite à la ruine morale des grands patrons allemands face au nazisme, les lois sur la Mitbestimmung (1951 et 1976) prévoient que 50 % des sièges du conseil de surveillance d’une grande entreprise soient occupés par des représentants des salariés, ce qui leur donne un poids énorme dans la prise de décision. Le principe s’applique à toutes les entreprises de plus de 2 000 salariés. Mais nulle part il n’est appliqué avec la même ferveur que chez Volkswagen, où le Comité des opérations se considère comme copropriétaire de l’entreprise.
Repenser le modèle
Les détracteurs de ce modèle l’accusent de bloquer les restructurations stratégiques, de ralentir la prise de décision et les adaptations nécessaires au marché. Au contraire, ses défenseurs louent sa capacité à mobiliser les salariés, appelés à s’exprimer et à soutenir collectivement les décisions prises. Dans les groupes cotés, le comité d’entreprise constitue un contre-pouvoir important face à la pression des actionnaires.
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