le psychodrame des coulisses de la Ligue 2 le jour du scrutin

Alors que Vincent Labrune a été largement réélu à la tête du football professionnel, mardi 10 septembre, l’élection à la Ligue a révélé des divisions parmi les présidents de Ligue 2. Le vote surprise au collège dans la matinée a semé la confusion. Un psychodrame dont les présidents ont le secret. Analyse.

C’est à 11h, ce mardi 10 septembre, que les présidents de Ligue 2 se réunissent en collège au siège de la Ligue de football professionnel (LFP), quelques heures avant l’assemblée générale élective. Deux présidents, Pierre Ferracci (Paris FC) et Laurent Lairy (Laval), demandent au collège de se positionner sur le choix pour la présidence, donc soit Vincent Labrune, soit Cyril Linette. Un vote officiel, afin de faire entendre la position de la Ligue 2.

Pierre Ferracci déroule ensuite ses arguments contre le maintien de Vincent Labrune : son manque de vision stratégique, la nécessité de renégocier avec CVC ou encore une réforme de la gouvernance. Les deux proches de Labrune, Pierre-Antoine Capton (Caen) et Loïc Féry (Lorient), prennent sa défense. « Jamais un président de Ligue n’a été aussi favorable à la Ligue 2 », affirme le président des Merlus. « Il faut rappeler qu’à l’origine les clubs de Ligue 2 étaient censés recevoir zéro euro de la part de CVC. Finalement, une dizaine de clubs ont reçu jusqu’à 3 millions », précise un autre supporter de Labrune.

Ferracci et Lairy insistent pour procéder à ce vote collégial. « Sauf qu’on nous répète sans cesse qu’il faut être unis, et maintenant on organise un vote pour exposer nos divisions. Ça n’a aucun sens », souffle un président. « Etre unis, ce n’est pas bâillonner certaines idées ou visions. Il faut qu’elles puissent s’exprimer », répond un pro-Linette. Les présidents de L2 finissent par accepter ce vote à bulletin secret. Bernard Joannin (Amiens) et Pierre-Olivier Murat (Rodez), les deux futurs représentants de la L2 au conseil d’administration, auraient alors prévenu qu’ils suivraient la volonté de la Ligue 2 à condition qu’une majorité claire se dégage. L’opposition dément que cette condition ait été posée.

Bernard Joannin : « Le vote blanc aux élections, c’est moi ! »

Les résultats donnent un léger avantage à Cyril Linette qui récolte 9 voix, contre 7 pour Vincent Labrune et 2 votes blancs. Malgré cette majorité, elle n’est pas jugée suffisante aux yeux des deux représentants, qui se sentent libres de voter comme ils le souhaitent au CA plus tard dans la journée. Plusieurs présidents pro-Linette soutiennent également cette position.

“Celui qui a voté blanc lors de l’élection du CA, c’est moi”, a annoncé aujourd’hui Bernard Joannin. “A l’origine, je voulais renouveler ma confiance au duo Labrune-Rouger qui a l’expérience des épreuves que le football a traversées. Ils ont aussi reconnu des erreurs et annoncé des améliorations à venir. Mais vu l’absence de majorité au sein du collège, j’ai préféré rester neutre.”

Après le vote du CA en faveur de Labrune, l’assemblée générale a entériné l’élection de l’ancien président de l’OM à plus de 85%. Face à ce résultat, les leaders du vote du collège se sentent trahis. “Bien sûr que c’est une trahison”, confie l’un des électeurs de Linette. “On leur a dit la veille au restaurant (chez Joannin et Murat) qu’on voulait que le vote du collège (de Ligue 2) soit respecté. On leur a redit au collège de s’assurer qu’ils respecteraient cela. Ils ont dit oui. Mais non, ils n’ont fait que ce qu’ils voulaient.”

Un président pro-Linette : « J’ose espérer qu’ils auront l’élégance de démissionner »

« On attend le compte-rendu précis du collège de Ligue 2 dans les prochains jours pour que chacun assume ses choix et prenne ses responsabilités », grogne un président qui a voté pour Linette en collège. Selon lui, le maintien du duo Murat-Joannin au CA doit être discuté. « J’ose espérer qu’ils auront tous les deux l’élégance de présenter leur démission », avance un autre président. Certains pro-Labrune ont du mal à entendre les leçons qu’on leur donne. « Il suffit de faire un peu de calcul », indique ce président de L2 à l’aise avec les chiffres. « Avec un tel score final, il est évident que des présidents qui ont voté pour Linette en collège le matin ont voté pour Labrune ensuite en AG. Donc, eh bien… »

Si aucun président de Ligue 2 ne s’est exprimé mardi après l’élection, les échanges téléphoniques se sont multipliés mercredi pour apaiser l’atmosphère. La date du prochain collège de Ligue 2 n’a pas encore été fixée. « Laissons retomber la pression de l’élection. Tout va rentrer dans l’ordre », espère le président Bernard Joannin. Après cet épisode, même Laurent Lairy appelle à l’unité : « Je sais ce que j’ai vu et entendu mais je ne blâme personne. Rassemblons-nous derrière Vincent. Travaillons ensemble pour améliorer notre football. C’est le seul moyen de sortir le football professionnel de l’ornière », conclut-il.