Le tunnel sous la Manche représente « 25 % des échanges commerciaux entre la Grande-Bretagne et l’ensemble des pays européens », estime l’opérateur Getlink

« Le tunnel représente aujourd’hui 25 % des échanges commerciaux entre la Grande-Bretagne et l’ensemble des pays européens », a déclaré mardi 7 mai Yann Leriche, le directeur général de Getlink (ex-Eurotunnel) le concessionnaire et exploitant du tunnel sous la Manche. C’est le symbole de l’Entente Cordiale, le plus long tunnel sous-marin du monde, le tunnel sous la Manche a été inauguré il y a trente ans, le 6 mai 1994, par la reine d’Angleterre et le président François Mitterrand. Si Yann Leriche reconnaît que les débuts n’ont pas été faciles financièrement, « si on prend du recul, 30 ans après, quelle formidable réussite ! »se réjouit-il, précisant que “près d’un demi-milliard de personnes ont traversé la Manche grâce au tunnel”.

Mais le Brexit est arrivé et un nouveau système d’enregistrement des données à l’entrée dans l’Union européenne (Entry Exit system ou EES) doit entrer en vigueur fin 2024. Il permettra de contrôler électroniquement les entrées et sorties des ressortissants de pays non étrangers. -Pays membres de l’UE franchissant les frontières extérieures de l’espace Schengen, pour un court séjour. Yann Leriche l’assure, ils ont investi “80 millions d’euros“et ils sont”prêts” de sorte que « ces nouvelles formalités continuent de s’effectuer sur nos terminaux dans de bonnes conditions ».

franceinfo : Vous quittez l’assemblée générale des actionnaires qui s’est tenue mardi matin à Paris. Il y a dès le début de petits actionnaires qui croyaient à l’époque aux prouesses technologiques. Qu’est ce que tu leur a dis? Qu’ils ont bien fait de rester à une époque où vous croyiez sous les dettes, et que vous avez résisté à tout, y compris au Covid et au Brexit ?

Yann Lériche : Oui, le tunnel est une longue aventure de 30 ans qui, comme vous l’avez souligné, a connu des débuts un peu difficiles financièrement, mais si l’on prend du recul 30 ans plus tard, quelle formidable réussite ! Le tunnel représente aujourd’hui 25 % des échanges commerciaux entre la Grande-Bretagne et l’ensemble des pays européens. Près d’un demi-milliard de personnes ont traversé grâce au tunnel. Il a ainsi parfaitement rempli sa mission de rapprocher la Grande-Bretagne d’un côté et l’Europe de l’autre.

Le Brexit implique notamment la fin de la liberté de circulation, avec deux nouvelles formalités, le nouveau système d’enregistrement des données à l’entrée dans l’Union européenne entre en vigueur à l’automne prochain. Êtes-vous prêt à cela ?

Nous sommes totalement prêts. La sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, ces nouveaux systèmes EES, ce sont à chaque fois pour nous de nouvelles formalités. Et nous avons décidé non seulement de nous adapter à ces formalités, mais d’en profiter pour renforcer notre compétitivité en faisant mieux que la plupart de nos concurrents.

Les Britanniques représentent 70 % du trafic passagers.

Oui c’est ça. Ces nouvelles formalités EES (Entry Exit System) sont donc un nouveau système qui verra de nouveaux contrôles effectués pour les ressortissants de pays tiers. Les pays tiers sont des pays qui ne font pas partie de la zone Schengen. Le Royaume-Uni fait partie des pays qui ne font pas partie de la zone Schengen, qui n’y a d’ailleurs jamais été.

“Les ressortissants britanniques, lorsqu’ils franchiront la frontière à la fin de l’année, devront faire une biométrie faciale et devront également donner leurs empreintes digitales.”

Et vous ne voulez pas de liste d’attente, vous ne voulez pas que les gens attendent longtemps, car c’est notamment votre avantage concurrentiel.

Oui, la grande force du tunnel, c’est qu’il va vite, qu’il fonctionne bien et qu’il continuera à bien fonctionner. Nous avons beaucoup investi, 80 millions d’euros, pour être prêts à ces nouvelles formalités qui continueront à s’effectuer dans de bonnes conditions sur nos terminaux. Nous avons également augmenté la taille de nos différentes infrastructures pour avoir un débit qui sera le même que celui que nous avons aujourd’hui.

Et donc vous espérez que cela n’aura pas d’impact…

Nous faisons plus qu’espérer. Nous avons réalisé des jumeaux numériques complets de nos deux terminaux pour modéliser tout cela, à destination des autorités, afin d’en assurer le bon fonctionnement. Si on remonte un peu en arrière, on nous disait avec le Brexit qu’il y aurait des heures et des heures de files d’attente pour se rendre à Paris et Londres, ça n’a pas été le cas. De la même manière, cela n’arrivera pas car grâce au numérique, grâce au travail quotidien de nos équipes, grâce au travail avec les autorités françaises et britanniques, nous avons préparé tout cela. Cette date d’entrée en vigueur de l’EEE, aujourd’hui, ne nous inquiète donc pas du tout. Au contraire, nous y voyons un avantage complémentaire en faisant mieux que les autres opérateurs.

Le Brexit n’a pas entraîné de listes d’attente, mais il a entraîné une baisse du trafic. C’est encore loin de ses niveaux d’avant Covid : moins 30 % pour les camions par rapport à 2019, moins 16 % pour les voitures. Comment l’expliquez-vous ?

Il est vrai que les échanges commerciaux n’ont pas retrouvé les niveaux d’avant le Brexit. De nombreux facteurs expliquent cela. Il y a bien le Brexit, l’intervention du Covid, la hausse des prix de l’énergie, l’inflation. Nous sommes donc confrontés à une série de facteurs qui font qu’aujourd’hui, effectivement, nous ne sommes pas tout à fait revenus à ce que nous étions avant, mais les volumes augmentent et cela commence à reprendre. , nous sommes donc extrêmement confiants. Il y a encore beaucoup de Britanniques par exemple qui ont leur résidence secondaire en France, environ 150 000, et ils continuent de traverser et recommencent à voyager.

Vous avez également la concurrence des ferries traversant la Manche.

Nous avons la concurrence des ferries, nous l’avons d’ailleurs toujours eue.

« Sur ces marchés, nous sommes leader, que ce soit dans le fret ou dans le transport de passagers. Chez les passagers, par exemple, nous détenons une part de marché de 58 %.

Yann Lériche

sur franceinfo

Et si nous ne sommes pas tout à fait revenus aux volumes d’avant Covid, notamment parce que les habitudes de voyage ont changé, nous avons des voyageurs qui voyagent plus longtemps et qui achètent chez nous davantage de produits premium. Ce qui signifie qu’aujourd’hui nous avons une entreprise extrêmement efficace, qui réalise un chiffre d’affaires supérieur à ce qu’il était auparavant. Car voyager, ce n’est pas seulement un nombre de traversées, c’est aussi la possibilité de s’arrêter.

Vous avez notamment dénoncé le dumping social de certaines compagnies de ferries qui pratiquaient des salaires inférieurs au SMIC.

Oui, c’est l’une de nos grandes batailles aujourd’hui. Nous avons face à nous trois concurrents de ferries, sur le détroit du Pas-de-Calais. Deux d’entre eux pratiquaient ce que l’on appelle le dumping social. Ces deux opérateurs se sont affranchis du paiement à leurs salariés des minima salariaux et sociaux français et britanniques. Alors évidemment, ils entrent dans une concurrence qui ne repose pas sur la qualité du service, ni sur l’innovation, mais uniquement sur la rémunération de leurs salariés, aux conditions les plus basses possibles.

Il a été dénoncé. Nous ne sommes pas les seuls. Tous ceux qui rémunèrent leurs salariés dans des conditions respectant les lois françaises et britanniques ont agi, nous et d’autres. Et des lois ont été votées en France et en Grande-Bretagne pour y mettre un terme. Car effectivement, c’est un trou dans l’argumentation. Les décrets français ont été adoptés le mois dernier et entrent en vigueur le 1euh Juillet de cette année.

Exploitez-vous aujourd’hui le tunnel au maximum de sa capacité ? ?

Le tunnel a encore beaucoup de potentiel. C’est ce qui est très intéressant. Cela signifie qu’il existe une forte demande, par exemple pour de nouvelles destinations à grande vitesse.

Aujourd’hui, c’est Paris, Londres, Amsterdam.

Et voilà, ça existe. Il y a une demande pour faire plus. Alors pour que la demande s’exprime, nous proposons deux choses. Premièrement, nous avons augmenté la capacité du tunnel. Concrètement, nous pouvons faire circuler davantage de trains. Il n’y a pas si longtemps, nous étions limités à 600 par jour. Nous en sommes à 400 aujourd’hui et nous pouvons monter jusqu’à 1 000, nous avons donc donné la réserve de capacité des tunnels. Et ce que nous avons fait pour rendre possibles ces nouvelles destinations à grande vitesse, nous avons travaillé dans trois domaines différents. Nous avons travaillé à simplifier toutes les règles d’accès au tunnel car nous avons réalisé que c’était la raison pour laquelle de nouveaux services ne se lançaient pas. Nous avons travaillé avec nos pairs, les gestionnaires des autres infrastructures en amont et en aval du tunnel et nous avons travaillé avec les constructeurs de trains pour que les nouvelles générations de trains, les TGV notamment, soient adaptées à entrer dans le tunnel. Et tout cela a fait apparaître de nouveaux entrants car ces règles simplifiées permettent aujourd’hui de lancer très facilement de nouveaux services.

Quelle prochaine destination espérez-vous et quand ?

Nous l’attendons donc concrètement puisque les nouveaux entrants et Eurostar eux-mêmes déclarent vouloir lancer de nouveaux services.

“D’ici cinq à dix ans, nous prévoyons que le nombre de destinations directes entre Londres et les capitales européennes doublera.”

Yann Lériche

sur franceinfo

Et concrètement, parmi ces capitales, des villes d’Allemagne et de Suisse : Cologne, Francfort, Genève et Zurich notamment.

Elise

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