Deux analyses du vote Rassemblement national lors des dernières législatives montrent que ce dernier est de plus en plus un vote de soutien au programme classique d’extrême droite sur l’immigration et la sécurité.
Passé de 89 députés élus en 2022 à 126 en 2024, le parti Le Pen est celui dont l’électorat déclare le plus (48%) avoir voté par soutien et le moins (7%) par opposition, explique Jean-Daniel Levy, directeur adjoint de Harris Interactive dans une note pour la Fondation Jean-Jaurès.
S’appuyant sur une compilation d’études pour différents médias, il juge que la séquence électorale de juin-juillet « confirme » que « depuis de nombreuses années, il n’est plus question de parler d’un vote de sanction ».
Les électeurs du RN sont ceux « qui indiquent le plus fortement qu’ils souhaitent que le candidat pour lequel ils ont voté soit présent au second tour, que le RN obtienne le score le plus élevé possible, qu’il ait la majorité absolue à l’Assemblée », poursuit-il.
Ils sont également les plus convaincus (94%) que le parti d’extrême droite sera en mesure de mettre en œuvre son programme s’il arrive au pouvoir.
« En matière d’immigration, de sécurité et de pouvoir d’achat, le RN est en phase avec une partie importante de la population », affirment les auteurs de l’étude, Jérôme Fourquet et Sylvain Manternach.
Par ailleurs, les électeurs du RN « s’identifient » aux candidats d’extrême droite dans le système politico-médiatique. « Le statut de paria, l’hostilité, le mépris de classe ou intellectuel dont sont victimes les représentants du RN reflètent ce qu’ils vivent aussi à leur niveau », expliquent les deux experts.
L’institut Terram souligne également que la traditionnelle opposition géographique est/ouest du vote RN s’est maintenue : il domine dans les Hauts-de-France et sur le littoral méditerranéen, mais peine à s’affirmer du sud du Massif central jusqu’à la pointe de la Bretagne.
– “Retour aux sources” –
Le parti d’extrême droite a particulièrement séduit les habitants des communes rurales et des petites villes situées loin des grandes villes. Ses résultats dépassent les 40% dans les villes de moins de 2.000 habitants. 70% des 10,6 millions de voix obtenues au premier tour des législatives proviennent de villes de moins de 10.000 habitants.
Le vote aux trois élections (européennes et législatives) confirme que ce sont les 35-64 ans (37%) et les plus de 65 ans (32%) qui ont le plus infléchi leur vote pour se tourner vers le RN, assure Jean-Daniel Levy, constatant également “la porosité avec l’électorat de la droite classique”.
Le sondeur évoque un “retour aux fondamentaux” du RN, avec l’immigration placée en tête des motivations (69%), devant le pouvoir d’achat (63%). Observations relevées par l’institut Terram : l’immigration est une motivation de vote pour 67% des électeurs RN contre 35% chez l’ensemble des électeurs.
L’étude Harris Interactive s’intéresse à “l’effet Bardella”. Jean-Daniel Levy souligne que les chiffres le tempèrent. Les moins de 25 ans placent Jordan Bardella en tête de leurs personnalités politiques préférées, au même titre que… François Hollande.
Le réseau social TikTok est une source d’information bien moindre que la télévision. Jean-Daniel Levy note que CNews n’arrive qu’en cinquième position parmi les chaînes de télévision regardées par les électeurs de Le Pen.
Jérôme Fourquet et Sylvain Manternach, auteurs de la note de l’Institut Terram, expliquent que la « juxtaposition d’une criminalité importante, d’un niveau élevé de pauvreté et d’inégalités, et d’une présence significative d’une population d’origine immigrée dans un département donné constitue le terrain le plus fertile pour la croissance du vote RN ».
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