Durant les trois jours du week-end de Pentecôte, le policier belge Raymond Lausberg, accompagné de trois autres agents, a multiplié les contrôles des camions sur l’autoroute E40, qui relie Liège à Aix-la-Chapelle, en Allemagne. « Nous avons contrôlé cinquante-trois camions. Sept étaient en règle. »
Rare spécialiste du dumping social des routiers, il lutte depuis des années contre une fraude qu’il qualifie de généralisée. « Les entreprises ne se soucient pas des règles. Ils savent que les lois sont mal appliquées. »
Lors de sa perquisition, les tricheries les plus fréquentes concernaient vingt-sept conducteurs qui ne respectaient pas les quarante-cinq heures de repos hors du véhicule, obligatoires au moins toutes les deux semaines. « Deux de ces chauffeurs étaient dans leur camion depuis plus de deux mois, et trois depuis plus de trois mois », témoigne-t-il. A cela s’ajoutent un chauffeur qui travaillait au noir, deux qui n’avaient pas le permis poids lourd et dix-neuf pannes techniques des camions.
Depuis l’élargissement de l’Union européenne (UE) en 2004, le transport routier a été dominé par des entreprises d’Europe centrale qui ont gagné des parts de marché en sous-payant leurs chauffeurs. Mais sur le papier, ce dumping social est illégal. Depuis longtemps, l’UE a mis en place des règles imposant une période de repos minimale, ainsi qu’une protection des marchés nationaux (les camions internationaux n’ont qu’un droit limité au « cabotage », c’est-à-dire les livraisons à l’intérieur d’un même pays étranger par exemple).
Les salaires minimums des pays desservis devraient être payés. En 2020, l’UE a même durci les normes, avec le « paquet mobilité » : les conducteurs doivent retourner à leur « lieu de résidence » tous les mois, et les camions rentrer dans leur pays d’immatriculation tous les deux mois…
Meilleurs avocats
Ces mesures satisfont généralement les entreprises d’Europe occidentale, y compris françaises. « Mais cela ne sert à rien d’adopter les meilleures lois si elles ne sont pas appliquées »déplore M. Lausberg. « Le système a du mal à se mettre en placeconfirme Dirk Saile, du Bundesverband Güterkraftverkehr Logistik, le lobby des entreprises routières allemandes. Les entreprises affirment ne voir aucun changement depuis le paquet mobilité. »
Chaque pays est, en principe, responsable de l’application de la loi. Cependant, le manque de moyens, et parfois de volonté politique, est flagrant. En Belgique, l’équipe de policiers autour de M. Lausberg doit surveiller une autoroute par laquelle passent 1,7 million de camions par an. Et son engagement, relativement rare, commence à se faire connaître. Lors des perquisitions effectuées dans les entreprises de transport routier, des documents ont été retrouvés conseillant aux conducteurs d’emprunter un autre itinéraire, moins surveillé.
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Durant les trois jours du week-end de Pentecôte, le policier belge Raymond Lausberg, accompagné de trois autres agents, a multiplié les contrôles des camions sur l’autoroute E40, qui relie Liège à Aix-la-Chapelle, en Allemagne. « Nous avons contrôlé cinquante-trois camions. Sept étaient en règle. »
Rare spécialiste du dumping social des routiers, il lutte depuis des années contre une fraude qu’il qualifie de généralisée. « Les entreprises ne se soucient pas des règles. Ils savent que les lois sont mal appliquées. »
Lors de sa perquisition, les tricheries les plus fréquentes concernaient vingt-sept conducteurs qui ne respectaient pas les quarante-cinq heures de repos hors du véhicule, obligatoires au moins toutes les deux semaines. « Deux de ces chauffeurs étaient dans leur camion depuis plus de deux mois, et trois depuis plus de trois mois », témoigne-t-il. A cela s’ajoutent un chauffeur qui travaillait au noir, deux qui n’avaient pas le permis poids lourd et dix-neuf pannes techniques des camions.
Depuis l’élargissement de l’Union européenne (UE) en 2004, le transport routier a été dominé par des entreprises d’Europe centrale qui ont gagné des parts de marché en sous-payant leurs chauffeurs. Mais sur le papier, ce dumping social est illégal. Depuis longtemps, l’UE a mis en place des règles imposant une période de repos minimale, ainsi qu’une protection des marchés nationaux (les camions internationaux n’ont qu’un droit limité au « cabotage », c’est-à-dire les livraisons à l’intérieur d’un même pays étranger par exemple).
Les salaires minimums des pays desservis devraient être payés. En 2020, l’UE a même durci les normes, avec le « paquet mobilité » : les conducteurs doivent retourner à leur « lieu de résidence » tous les mois, et les camions rentrer dans leur pays d’immatriculation tous les deux mois…
Meilleurs avocats
Ces mesures satisfont généralement les entreprises d’Europe occidentale, y compris françaises. « Mais cela ne sert à rien d’adopter les meilleures lois si elles ne sont pas appliquées »déplore M. Lausberg. « Le système a du mal à se mettre en placeconfirme Dirk Saile, du Bundesverband Güterkraftverkehr Logistik, le lobby des entreprises routières allemandes. Les entreprises affirment ne voir aucun changement depuis le paquet mobilité. »
Chaque pays est, en principe, responsable de l’application de la loi. Cependant, le manque de moyens, et parfois de volonté politique, est flagrant. En Belgique, l’équipe de policiers autour de M. Lausberg doit surveiller une autoroute par laquelle passent 1,7 million de camions par an. Et son engagement, relativement rare, commence à se faire connaître. Lors des perquisitions effectuées dans les entreprises de transport routier, des documents ont été retrouvés conseillant aux conducteurs d’emprunter un autre itinéraire, moins surveillé.
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