La légende amérindienne du colibri raconte qu’un gigantesque incendie de forêt aurait été éteint grâce à l’action individuelle d’un petit oiseau ne pesant que quelques grammes. La détermination exemplaire du colibri l’aurait amené à multiplier les allers-retours entre un petit bassin et la source de l’incendie afin, goutte à goutte, d’arroser au maximum les flammes et tenter de contenir l’incendie. forêt. C’est cette détermination sans faille qui se serait propagée aux autres habitants de la forêt, ainsi convaincus de la nécessité d’agir eux aussi, selon leurs moyens, pour surmonter le problème. feu. « Prenez votre part » est la formule utilisée pour désigner l’éthique particulière qui a guidé l’action du colibri. Est-ce le sens de l’injonction faite à l’entreprise face aux crises écologiques contemporaines ?
L’impératif d’une plus grande sobriété dans l’utilisation des ressources naturelles semble cependant avoir connu un sort plus désastreux que la forêt de la légende amérindienne. Le comportement exemplaire du colibri peine à trouver son équivalent dans l’écosystème unique de la vie des affaires. A tout le moins, les initiatives de quelques entreprises pionnières souffrent de ne pas pouvoir rattraper leurs homologues.
Dans un tel contexte, c’est à la fois la fonction éthique et morale de l’entreprise mais aussi les directions dans lesquelles elle doit orienter ses stratégies et ses techniques de gestion qui sont immédiatement remises en cause. Entre 2010 et 2017, les entreprises du CAC 40 ont significativement augmenté leur empreinte environnementale, notamment si l’on prend en compte les émissions importées imputables à la délocalisation de leurs moyens de production (« Grandes Entreprises françaises : un impact désastreux pour la société et la planète ! », Pierre Grimaud et Dominique Plihon, Observatoire des multinationales/Attac, 2019).
Le déni n’est plus de mise
Dans le même temps, leurs pratiques de gestion environnementale démontrent une plus grande appétence pour les annonces d’une transition future que pour l’atténuation de leurs impacts ici et maintenant. On serait tenté d’en déduire que le colibri n’est décidément pas une métaphore transférable au monde des affaires, ou que ce monde n’est peut-être pas aussi interdépendant que l’est le biotope des forêts primaires. Il s’agit cependant sans doute d’une interprétation partielle.
Une tendance, assez récente, permet d’observer une prise de conscience des élites managériales quant au caractère indissociable du lien entre résilience des entreprises et résilience écologique. En fait, entre-temps, le travail d’objectivation du phénomène anthropocène entrepris par les scientifiques du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat a eu lieu ; ou encore, à l’échelle nationale, les projections établies par l’Ademe, dans son rapport « Transitions 2050 » publié en 2023, sur les impacts socio-économiques des différents scénarios de réchauffement climatique. Le colibri semble, dans ce contexte, n’avoir d’autre choix que de tenter de sauver la niche écologique dont il dépend, sous peine de disparaître avec lui.
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