Les entreprises des pays émergents peuvent-elles conserver leurs experts ?

Entreprises. Le Maghreb perd chaque année une part importante de ses ingénieurs et scientifiques. Certes, cette diaspora apporte des contributions importantes au pays d’origine. Mais pour les entreprises locales et les filiales de groupes étrangers, confrontées à une concurrence mondiale marquée par un rythme d’innovation rapide, la rareté de ces compétences et un turnover élevé déséquilibrent leur développement.

Ces entreprises peuvent-elles malgré tout tenter d’attirer et de retenir ces experts, sans pouvoir proposer des salaires proches de ceux des pays riches ? L’équation semble difficile à résoudre. En Tunisie, une chercheuse, Amina Nadia Nasri, a étudié les motivations des ingénieurs du numérique à partir, en s’immergeant dans plusieurs entreprises du secteur. Ses travaux mettent en évidence la nécessité d’une gestion originale des carrières de ces experts, fondée sur une triple échelle d’évolution (« Vers un nouveau modèle de gestion de carrière adapté aux ingénieurs informatiques dans les sociétés de services numériques en Tunisie », thèse Université de Tunis, Essect, Larime).

La problématique des carrières d’experts n’est pas nouvelle et repose traditionnellement sur une double échelle de promotion : l’une, hiérarchique, reconnaît la capacité à diriger et à assumer des responsabilités croissantes ; l’autre, professionnelle, récompense la maîtrise technique et l’expertise accrue. Cependant, la fin des années 1990 a vu l’accélération des innovations numériques et la multiplication des projets transformateurs.

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La recherche propose alors de complexifier l’échelle professionnelle en récompensant la capacité de certains experts à renouveler leur expertise et à s’adapter à des projets disruptifs (Olga Lelebina, « Management des experts en entreprise : dynamiques des groupes professionnels et offres de parcours », thèse MinesParis 2014).

Une condition existentielle pour eux-mêmes

La nécessité de ce développement semblait encore réservée aux entreprises à forte intensité technologique. Pourtant, une recherche menée en Tunisie – dans six entreprises du numérique et sur un large échantillon de projets informatiques – généralise cette analyse tout en inversant sa logique.

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Dans les pays riches, le renouvellement des compétences était un gage de survie des entreprises. En Tunisie, il est perçu par les experts IT comme une condition existentielle pour eux-mêmes. Ils ne resteront dans l’entreprise – voire dans le pays – que s’ils sont assurés de pouvoir développer leurs capacités d’innovation, maîtriser les phases d’un projet numérique ou obtenir des missions à l’étranger, ce qui légitimera leur niveau sur le marché mondial.

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Elise

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