Le secteur des batteries pour vĂ©hicules Ă©lectriques, en plein essor ces dernières annĂ©es, est aujourd’hui frappĂ© par une sĂ©rie de revers. Lundi, le constructeur suĂ©dois Northvolt, fournisseur clĂ© de constructeurs automobiles comme Volvo et Volkswagen, a annoncĂ© des suppressions d’emplois et la suspension de ses projets d’expansion, jetant une ombre sur l’avenir du secteur.
Northvolt, qui emploie actuellement 6.500 personnes, va supprimer 400 emplois sur un site de recherche et 200 Ă Stockholm. En outre, le groupe a annoncĂ© qu’il suspendait l’expansion de son usine de Skelleftea, dans le nord de la Suède, en raison de difficultĂ©s Ă accroĂ®tre ses capacitĂ©s de production.
Ralentissements et annulations
« La dynamique gĂ©nĂ©rale en faveur de l’Ă©lectrification reste forte, mais nous devons nous assurer de prendre les bonnes mesures au bon moment pour faire face aux vents contraires du marchĂ© automobile et du climat industriel plus large », a dĂ©clarĂ© lundi le PDG de Northvolt, Peter Carlsson, dans un communiquĂ©.
Cette annonce intervient alors que plusieurs projets européens de production de batteries sont ralentis ou annulés. La stagnation des ventes de voitures électriques dans plusieurs pays, combinée aux défis technologiques et financiers, pèsent sur les ambitions des fabricants de batteries.
Northvolt n’est pas la seule entreprise Ă souffrir
Northvolt n’est pas un cas isolé. En janvier 2023, l’entreprise britannique Britishvolt a fait faillite avant même d’avoir pu lancer son usine de batteries, faute de financements suffisants. Plus récemment, début 2024, le fabricant chinois Svolt a lui aussi abandonné un projet de deuxième usine en Allemagne, invoquant l’opposition locale et le retrait d’une commande majeure.
En France, le constructeur ACC (Automotive Cells Company), contrĂ´lĂ© par TotalEnergies, Stellantis et Mercedes, a inaugurĂ© sa première usine de batteries en mai 2023. Mais en fĂ©vrier 2024, TotalEnergies a annoncĂ© qu’il ralentissait ses investissements dans ce secteur. Peu après, ACC a suspendu la construction de deux usines prĂ©vues Ă Termoli, en Italie, et Ă Kaiserslautern, en Allemagne.
La Chine exerce une forte pression mondiale
Ces hésitations ont eu des conséquences immédiates. Le gouvernement italien a retiré les fonds publics européens destinés à soutenir ACC en raison d’une « incertitude » sur le calendrier de construction des usines. Alors que les fabricants européens de batteries peinent à suivre le rythme, la concurrence chinoise accroît la pression. En effet, la Chine domine la chaîne de production mondiale, ce qui rend le coût de fabrication des batteries beaucoup plus élevé en Europe.
Selon une analyse du think tank Transport & Environment, plus de la moitiĂ© de la production de batteries lithium-ion prĂ©vue en Europe d’ici 2030 pourrait ĂŞtre retardĂ©e, rĂ©duite, voire annulĂ©e. « C’est un dilemme pour les industriels : voulons-nous une industrie europĂ©enne et que sommes-nous prĂŞts Ă faire pour l’obtenir ? Nous avons dĂ©jĂ beaucoup investi, il y a beaucoup d’emplois en jeu, et il semble raisonnable de ne pas laisser notre transition Ă©nergĂ©tique dĂ©pendre de pays tiers », explique Diane Strauss, membre du groupe.
Appel à une action européenne coordonnée
Face à ces défis, certains experts appellent à une action coordonnée des gouvernements européens. « Les projets de gigafactory annoncés sont très ambitieux, mais ils doivent être accompagnés d’une forte demande pour devenir réalité », estime Apostolos Petropoulos, expert à l’Agence internationale de l’énergie. Il ajoute que le secteur des batteries devra se consolider et ajuster ses investissements en fonction de l’évolution du marché.
Transport & Environment appelle également à des politiques plus favorables à la production locale, en mettant l’accent sur des normes strictes de durabilité des batteries qui favoriseraient les fabricants européens. « Nous ne pouvons pas dépendre uniquement de la Chine ou d’autres pays pour notre avenir énergétique », conclut Diane Strauss.