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les femmes, largement oubliées du mouvement à l’honneur

Pour célébrer le centenaire du surréalisme, environ 500 œuvres sont exposées, dont près de la moitié sont inédites ou peu connues du grand public. Découvrons ici, parmi les 38 artistes féminines exposées, trop souvent invisibles, trois d’entre elles.

France Télévisions – Culture Edito

Publié


Temps de lecture : 6 minutes

Ithell Colquhoun, Remedios Varo et Yahne Le Toumelin : ces trois noms vous sont peut-être inconnus, et c’est tout à fait normal. A moins d’être spécialiste du surréalisme, difficile de connaître ces femmes qui ont marqué ce mouvement. Leurs contributions ont laissé une marque importante dans son histoire mais le grand public a encore du mal à reconnaître ces femmes, pourtant leurs œuvres tiennent tête à celles de Salvador Dalí, Joan Miró et Max Ernst, et sont exposées au Centre Pompidou.

Le commissaire de l’exposition Didier Ottinger assure que « près de la moitié des œuvres présentées sont nouvelles. » FranceInfo vous propose de découvrir ces trois femmes artistes à travers l’exposition “Surréalisme”, qui court jusqu’au 13 janvier 2025.

Ithell Colquhoun (1906-1988)

Trop surréaliste pour les surréalistes. Ithell Colquhoun, figure emblématique de la peinture britannique, a consacré soixante-dix ans à explorer le mysticisme à travers des thèmes végétaux et organiques, influencés par Salvador Dalí. Née en 1906 en Inde et élevée en Angleterre, elle étudie dans des écoles d’art renommées avant de plonger dans le surréalisme dans les années 1930, côtoyant des figures comme Breton. Elle connut un premier succès, mais fut exclue du mouvement surréaliste britannique en 1940 en raison de son intérêt pour l’occultisme.

Aujourd’hui, l’héritage d’Ithell Colquhoun est redécouvert, notamment grâce aux recherches d’Amy Hale et à l’acquisition de ses archives par la Tate Gallery en 2019. Ses œuvres des années 40, comme Gorgone (1960), explorent la sexualité et le genre à travers le mythe, utilisant des techniques telles que le transfert pour créer des compositions évoquant les espaces souterrains et intra-utérins, fusionnant l’anatomie féminine et la nature dans un univers empreint d’ésotérisme.

Chez les surréalistes, les femmes occupent une position ambivalente. On leur promet une libération des normes mais en réalité elles restent souvent prisonnières d’un univers façonné par les désirs masculins. Vénérés et redoutés, ils sont réduits à des archétypes : femmes-enfants, muses, sorcières, objets érotiques. Dans une lettre à Le journal d’Oxford en 1981, elle constate que, malgré leur discours sur la liberté, « la plupart des disciples de Breton n’étaient pas moins machistes »et que les femmes étaient souvent “autorisé mais pas nécessaire”. Leurs contributions artistiques ont donc été marginalisées, voire invisibles.

Tard dans sa vie, le travail de Colquhoun reflète son intérêt croissant pour les traditions ésotériques, fusionnant des éléments mystiques et occultes avec des thèmes de pouvoir féminin et d’exploration spirituelle. C’est le cas des trois tableaux exposés au Centre Pompidou dans la salle sur le mythe de Mélusine. L’héritage de cette artiste singulière est ainsi redécouvert, et elle est désormais reconnue comme une figure majeure du surréalisme, avec une exposition prévue à la Tate Modern de Londres en 2025.

Remède Varo (1908 – 1963)

Imaginez être une femme républicaine et surréaliste à la fin des années 1930 en Espagne. Remedios Varo, née en 1908, María de los Remedios Alicia Rodriga Varo y Uranga a été encouragée par une famille libérale. Son passage dans une école catholique a profondément influencé sa carrière et son art. Artiste engagé en 1936, Remedios Varo participe à l’exposition « Logicofobista» à la Galeria Catalonia de Barcelone, où elle a rencontré le poète surréaliste français Benjamin Péret, qui s’est rendu en Espagne pour soutenir les anarchistes de la Colonne Durruti sur le front de Teruel.

Le thème du confinement est central dans son œuvre, reflet de son expérience tragique. Après avoir fui la guerre civile espagnole, elle trouve refuge à Paris, où elle se lie d’amitié avec la peintre Leonora Carrington et côtoie le groupe surréaliste et collabore à la célèbre revue Minotaure. Exilée au Mexique, elle enrichit sa création en explorant des motifs de captivité et de résistance, souvent à travers des figures féminines enchaînées et des paysages oniriques.

Au Mexique, elle affine son style en participant à des pratiques artistiques collectives telles que “cadavre exquis”ce qui lui a permis d’explorer de nouveaux processus créatifs. Passionnée par des maîtres comme Jérôme Bosch, elle peuple ses œuvres de créatures mythiques et d’éléments symboliques médiévaux, créant un univers où la magie et le mystère priment sur le réalisme. C’est pourquoi trois de ses tableaux sont exposés dans la salle thématique de la pierre philosophale et de l’alchimie en mouvement au sein de l’exposition.

Comme beaucoup d’artistes de son époque, elle a été confrontée aux préjugés sexistes au sein du mouvement surréaliste, souvent laissés de côté dans les manifestes rédigés en grande partie par des hommes. Comme Ithell Colquhoun, elle célèbre la féminité et explore la psyché féminine à travers des symboles très éloignés de l’imagerie sexualisante. Véritable outsider, elle connaît encore un succès commercial lors de sa première exposition. Aujourd’hui, Remedios Varo est une figure emblématique du mouvement, elle entre donc au panthéon surréaliste à l’occasion de cette exposition centenaire.

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Yahné le Toumelin (1923-2023)

Le bouddhisme et le surréalisme peuvent-ils coexister ? Yahne Le Toumelin, né le 27 juillet 1923 à Paris et élevé au Croisic, l’a prouvé. A l’âge de 10 ans, elle se découvre une passion pour le dessin. Après avoir été admise à l’École des Beaux-Arts de Paris, elle rejoint l’Académie de la Grande Chaumière, où elle rencontre des personnalités comme le philosophe mystique russe Georges Gurdjieff et le poète René Daumal.

En 1945, elle épouse Jean-François Ricard et le couple s’installe d’abord en Algérie, puis au Mexique. Yahné y réalise une fresque géométrique pour l’Institut français d’Amérique latine et réalise notamment des affiches de films. Elle côtoie alors des figures emblématiques comme Frida Kahlo ou Luis Buñuel, et se lie d’amitié avec la surréaliste Leonora Carrington, également à l’honneur à Beaubourg dans l’exposition.

De retour à Paris, elle s’immerge dans le monde artistique, exposant même en 1955 à l’Etoile Scellée, la galerie d’André Breton. Sa quête spirituelle l’amène à se convertir au bouddhisme en Inde, où elle prononce ses vœux de religieuse, devenant ainsi la première religieuse française. Dans les années qui suivent, elle compose des œuvres marquantes, dont une fresque pour Maurice Béjart. Entre 1969 et 1975, elle évolue vers l’abstraction lyrique, avec des expositions marquantes dans les années 1980, dont une au Grand Palais en 1989.

Son parcours se poursuit avec des rétrospectives et des publications, dont un livre en 2016. L’art de Yahné Le Toumelin est marqué par des rencontres et des réflexions profondes sur la spiritualité. Elle est décédée en 2023 à l’âge vénérable de 99 ans, après avoir connu une reconnaissance tardive. Son œuvre, Le Cheval de Merlin l’Enchanteur, créée en 1953, est exposée aux côtés des plus grands surréalistes au Centre Georges Pompidou, dans la salle thématique dédiée à la pierre philosophale. Un thème qui résonne particulièrement avec son goût pour le lyrisme et le onirisme de son art.

Juliette

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