Le cube à l’ancienne au milieu de la ville vibre au son de l’eau en ce mercredi matin d’avril et pendant les vacances scolaires. Deux groupes d’enfants âgés de 6 à 12 ans occupent le bassin de 25 mètres de la piscine Busserine. En bordure, les cinq encadrants de l’association Le Grand Bleu surveillent et encouragent la quarantaine de gamins.
Dehors, un groupe de mères attend. Rares sont ceux qui semblent au courant de l’arrivée des Jeux olympiques et paralympiques à Marseille. L’un d’eux se souvient cependant que son aîné, qui apprend la voile à la base municipale des Corbières, quelques kilomètres plus bas, accueillera la flamme avec ses amis le mercredi 8 mai. Un groupe de garçons et de filles en kayaks, canoës et des pagaies seront en effet stationnées à l’extrémité du quai de l’Estaque pour saluer l’arrivée du Belém avec la torche olympique à bord.
Brahim Timricht, directeur de l’association Le Grand Bleu, qui organise le stage « Savoir nager » pour ces jeunes envoyés par les centres sociaux, est très fier que sa structure ait été sélectionnée pour participer aux festivités. « Quand est-ce que cela nous arrivera la prochaine fois ? » Nous serons morts ! » Ce grand homme de 50 ans reconnaît que les parents et les enfants parlent rarement des Jeux olympiques : «Ils pensent que tout se passe dans le sud (de la ville) et que leur quartier ne soit pas impacté. » Il sait que les Jeux semblent encore loin, dans ce coin du 14e arrondissement. Comme dans tous les autres secteurs des quartiers nord de la ville de Marseille.
Un écho lointain
A 3 kilomètres, dans le 13e , en bordure du quartier des Chutes-Lavie, le stade Burel FC se dresse au-dessus du périphérique à quatre voies qui traverse le nord de la ville. Les jeux olympiques? Là aussi, c’est un écho lointain. « Pour nous, ce sont avant tout les Jeux de Paris. A Marseille, on va avoir de la voile, c’est sympa, mais c’est un sport confidentiel auquel on ne comprend rien.”remarque Serge Obré, directeur du club.
Le responsable sportif assure que ses joueurs ne parlent même pas des matchs qui auront lieu au Vélodrome : « Pour eux, il n’y a qu’un sport roi, c’est le football, et ils savent que c’est une discipline mineure aux JO. Ils ont plus en tête le Championnat d’Europe. »
Tout au nord, à la Sound Musical School de Savine, c’est la même désillusion à l’approche du rendez-vous mondial. « Il faut être dans certains clubs pour avoir des informations sur ce qui va se passer. On ne sait même pas s’il y a un athlète marseillais qui participera aux épreuves de voile… »» dit Mohamed MBaé, dit « Soly », médiateur culturel et social. «On ne voit rien de concret à part la marina», ajoute Ali Ibrahima. Les deux gérants du studio de musique, qui a vu passer tous les rappeurs marseillais, soulignent que la voile ne veut rien dire pour les gamins de cette ville pauvre. Ici toute activité sportive est devenue un luxe. Pour rejoindre la base nautique des Corbières, le trajet dure une heure et demie en transports en commun. Le grand stade Savine, seul équipement existant, est à l’abandon depuis la démolition des tours de la ville, et pour jouer au football ou aller à la piscine, il faut prendre deux bus.
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