Littérature « esprit critique » : trois romans d’exil

L’« esprit critique » d’aujourd’hui s’adresse à trois textes qui, au-delà d’époques, de langues et de situations très différentes, partagent le fait que leur personnage principal a connu l’exil, quitte à mourir de froid dans une rue de Toronto. , se battre devant un juge français avec un traducteur infidèle ou languir de jalousie dans la pampa argentine.

En fait, nous discutons aujourd’hui successivement Deux grands hommes et demi de Diadié Dembélé, aux éditions JC Lattès, Affaire classée de Vincent Labruffe, paru aux Editions Verticales, et enfin la réédition aux Editions du Tripode du livre de l’écrivain argentin Juan José Saer intitulé L’opportunité.

” Deux grands hommes et demi »

Deux grands hommes et demi est le deuxième roman de Diadié Dembélé, née dans l’ouest du Mali et diplômée du master de création littéraire de l’Université Paris 8, comme nombre de voix récentes de la littérature contemporaine.

Publié chez JC Lattès, le roman s’appuie sur le pays d’origine de Diadié Dembélé, mais aussi sur l’expérience de l’auteur en tant qu’interprète au sein d’une association d’aide aux migrants.

Le livre raconte le voyage d’un village du Mali à Bamako puis Paris de deux amis, Manthia et Toko, raconté à travers l’histoire du premier face à la justice : « Puisque le juge veut savoir pourquoi j’ai quitté mon village et pourquoi j’ai choisi la France, écrivez ! »laisse entendre en effet le narrateur.

Le dispositif est unique, puisque c’est Manthia qui raconte son histoire et celle de Toko depuis la maison d’arrêt de Vincennes, se confiant à son avocat grâce à une traductrice qu’il interpelle comme il interpelle ses lecteurs.

” Affaire classée »

Affaire classée est le quatrième livre publié aux Éditions Verticales d’Alexandre Labruffe, après un premier roman intitulé Chroniques d’une station-service et une histoire intitulée Un hiver à Wuhan documentant les débuts de l’épidémie de Covid en Chine.

L’auteur mène ici une enquête littéraire sur l’oncle de son partenaire sud-coréen Minkyung, mort de froid à Toronto dans les années 1970 alors qu’il fuyait un hôpital psychiatrique.

Un livre sous la forme à la fois d’une autofiction de la relation entre le narrateur et sa compagne, et d’une tentative documentaire et documentée de comprendre ce qui s’est passé au Canada et dont les versions restent contradictoires ou aléatoires, couplée à la volonté d’approcher certains fantômes politiques ou familiaux. de Corée.

” L’opportunité »

Les éditions du Tripode poursuivent leur travail de réédition des livres du grand écrivain argentin Juan José Saer, né en 1937 dans la province de Santa Fe en Argentine et décédé en 2005 à Villejuif après avoir passé toute la dernière partie de sa vie en France. Après L’ancêtre Alors Brillantles deux textes les plus connus de Juan José Saer, c’est L’opportunitéinitialement publié en 1987, que les lecteurs francophones peuvent désormais facilement se procurer à nouveau, dans la traduction de Laure Bataillon.

Le personnage principal de L’opportunitéBianco, a fait le voyage inverse de Juan José Saer, arrivant en Argentine depuis l’Europe, mais à une époque complètement différente, puisque le livre se situe dans la deuxième partie du XIXe siècle.^e siècle, tandis que la pampa argentine, monde ouvert et sauvage, voit arriver des modèles européens, notamment la clôture des terres avec des barbelés pour délimiter les parcelles : une affaire dans laquelle Bianco s’engage en compagnie d’un associé et ami, Garay López. , qu’il découvre contemplant sa femme fumant un cigare en souriant, ce qui suffit à le convaincre d’une tromperie qui prendra toute la place dans sa vie.

Nous discutons de ces trois livres avec :

• Lisa Wajemanprofesseur de littérature comparée qui chronique l’actualité littéraire pour Mediapart ;
• Blandine Rinkelà la fois écrivain, critique et musicien ;
• Youness Bousennaqui relate notamment l’actualité littéraire pour Télérama.

« Critical Mind » est un podcast enregistré dans les studios Gong et produit par Karen Beun.