« L’ordinateur quantique, il y aura un ‘avant’ et un ‘après’, c’est donc un défi aujourd’hui de l’avoir », explique le président de Pasqal

Pasqal est une jeune entreprise française, fondée en mars 2019 avec des physiciens. Elle se spécialise en informatique quantique et travaille au développement d’un ordinateur quantique à atomes neutres. Son président et cofondateur George-Olivier Reymond est l’invité de franceinfo.

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Georges-Olivier Reymond, président et co-fondateur de PASQAL, le 16 mai 2024 sur franceinfo.  (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Pasqal, entreprise française prometteuse, est spécialisée dans l’informatique quantique, qui permet de développer les ordinateurs les plus puissants au monde. Créée il y a quatre ans par George-Olivier Reymond avec quatre physiciens, elle compte aujourd’hui 200 salariés, avec des usines en France et au Canada.

Citée par Emmanuel Macron lors de la présentation en janvier 2021 du plan français pour le développement du quantique, elle est parvenue à lever 100 millions d’euros d’investissements en 2023. Elle est la première start-up à bénéficier du soutien du Fonds Innovation Défense du Ministère des Forces armées. Pasqal a été créé il y a quatre ans par vous-même, avec quatre physiciens. Aujourd’hui, ce sont 200 salariés, des usines en France et au Canada.

franceinfo : George-Olivier Reymond, que fait lel’informatique quantique?

Georges-Olivier Reymond : L’informatique quantique, comme son nom l’indique, est de l’informatique, donc de l’informatique, et ce qu’on appelle le calcul haute performance. C’est-à-dire que si vous cherchez à faire cela avec votre ordinateur de tous les jours, il faudra en mettre plusieurs côte à côte pour atteindre le niveau de performances nécessaire.

« L’ordinateur quantique est donc une révolution. Nous ne devons pas y voir une innovation, ce n’est pas une amélioration continue, c’est complètement différent.

Georges-Olivier Reymond

sur franceinfo

Il y aura un « avant » et un « après ». Des choses qui sont impossibles aujourd’hui deviendront possibles grâce aux calculs quantiques.

Pourquoi s’y intéresse-t-on particulièrement aujourd’hui ? ?

Il y a deux principales raisons. Premièrement, nous avons toujours besoin de plus de puissance de calcul. Aujourd’hui, si vous regardez tout ce qui se fait en matière d’intelligence artificielle, ce sont des logiciels, il faut donc des ordinateurs pour exécuter les logiciels. Et puis, la solution que l’on a trouvée aujourd’hui pour rendre les ordinateurs plus performants, c’est de les rendre de plus en plus gros. Cela consomme donc de plus en plus d’électricité et cela finit par devenir un véritable problème. Par exemple, une requête ChatGPT équivaut en énergie à faire bouillir un verre d’eau.

Vous annoncez aujourd’hui une avancée majeure dans le cadre d’un projet mené avec Thales, dans la planification des satellites. De quoi s’agit-il ?

Il s’agit d’un calcul particulièrement complexe car, pour optimiser la trajectoire des satellites, il y a un très grand nombre de paramètres à prendre en compte. Et quand on met beaucoup de paramètres, on a beaucoup de solutions possibles et au final, il faut trouver la meilleure. C’est un peu comme chercher une aiguille dans une botte de foin. Un ordinateur quantique est capable de le faire bien plus efficacement que nos solutions classiques.

De nombreux investisseurs s’intéressent à vous. Vous avez réussi à lever 100 millions d’euros, ce qui montre si le monde financier pense qu’il existe un potentiel de croissance. C’est beaucoup et en même temps, c’est peu par rapport à la capacité de financement des mastodontes du secteur, à savoir IBM et Microsoft.

J’aime cette phrase qui dit qu’en France, on n’a pas de pétrole, mais on a des idées. Pour fabriquer un ordinateur quantique, il faut à la fois de l’argent et des idées. Et puis en réalité, si vous regardez les équipes IBM et Microsoft, elles ne sont pas si énormes.

« Nous nous battons, je pense, à armes égales avec IBM et Microsoft et surtout, nous avons une approche différenciante qui est la technologie. »

Georges-Olivier Reymond

sur franceinfo

Disposez-vous d’une meilleure technologie qu’IBM et Microsoft ?

Oui. Et concernant le financement, jusqu’à présent, nous allons bien, mais nous devons continuer. C’est un effort continu.

Pourquoi est-il important d’avoir une politique souveraine concernant les technologies de pointe comme l’informatique quantique, vis-à-vis des mastodontes américains et chinois ?

Comme je le disais plus tôt, il y aura un « avant » et un « après ». Il y a des gens qui en auront un, et il y a des gens qui n’en auront pas. C’est pourquoi il est aujourd’hui problématique de les avoir. Il y a l’aspect logiciel et il y a la partie matérielle. Donc si vous arrivez à être souverain sur la partie, comme ici, du matériel, et que vous ajoutez la souveraineté logicielle – je vais faire une petite référence à Mistral -, vous devenez indépendant. Pourtant, le calcul haute performance est présent partout dans notre vie quotidienne. On ne s’en rend pas forcément compte. Pour Airbus, aujourd’hui, un avion est conçu entièrement sur ordinateur, à l’aide de simulations sur supercalculateurs.

En complément de vos usines en France et au Canada, vous vous développez en Asie. Pourquoi est-il important d’être international, alors qu’on vient de parler de souveraineté en Europe ?

Il y a deux aspects. D’un côté, il y a une course de vitesse. Il faut donc agir vite. Une façon d’avancer rapidement est d’augmenter vos ressources et d’avoir plus d’usines pour fabriquer davantage. Le deuxième aspect est qu’il y a des marchés à conquérir et qu’il y a toujours un bonus pour ceux qui arrivent en premier. Et puis, construire un ordinateur quantique reste quelque chose de complexe. Nous avons beaucoup d’atouts en France et en Europe, mais nous ne pouvons pas tout faire nous-mêmes. Il est donc également nécessaire de rechercher des compétences clés spécifiques dans d’autres zones géographiques.

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