FIGAROVOX/TRIBUNE – En position de force à l’Assemblée nationale, le Rassemblement national va proposer d’avancer l’âge légal de départ à la retraite. La présidente du mouvement patronal Ethic Sophie de Menthon s’y oppose et prône plutôt un modèle de retraite “à la carte”.
Sophie de Menthon est présidente du mouvement patronal Ethic.
Madame la Présidente du groupe RN à l’Assemblée nationale,
Puisque votre mouvement, le Rassemblement national, est devenu implicitement l’arbitre de l’âge de départ à la retraite, je demande votre attention sur les différentes composantes qui nous sont essentielles et dont il faut tenir compte. Cette discussion sans fin sur ce sujet qui concerne tout le monde est devenue une « menace » de censure et un marqueur politique. Nous regrettons profondément l’absence de concertation avec les dirigeants d’entreprises et les salariés, sans véritable réflexion sur les besoins réels actuels des Français.
Pourquoi la notion de pénibilité a-t-elle disparu alors que les arrêts de travail se multiplient et que le monde du travail se transforme ? L’évolution du monde du travail est multifactorielle ; les temps changent et depuis, on a renoncé à introduire la pénibilité sous prétexte de la difficulté d’établir des critères et de les mesurer : certes, tout le monde pouvait prétendre que son métier était pénible, d’où l’abandon.
Pourtant, les Français souhaitent un retour au bon sens : non, un couvreur, certains aides-soignants, les métiers de la sécurité, etc. ne peuvent pas travailler aussi tard dans la vie qu’un cadre, aussi stressé soit-il. Oui, dans le tertiaire, beaucoup aimeraient même travailler jusqu’à 70 ans (comme dans certains pays européens). Dans les hôpitaux, les médecins ont interdiction de travailler au-delà de 70 ans sauf s’ils ne sont pas payés, mais ils ont le droit d’ouvrir un cabinet en ville. Certains chefs d’entreprise se retrouvent confrontés à des seniors qui voudraient travailler plus longtemps, mais à temps partiel. L’étatisme rigide est en la matière la certitude de l’échec et une forme de démotivation pour les Français. Ne parlons pas des entrepreneurs indépendants ou des artisans indépendants, qui n’ont ni arrêt maladie ni date de péremption professionnelle. N’est-il pas temps de penser autrement ?
Avec de la bonne volonté, peut-on sortir de cette impasse volontaire ? Revoir la réforme des retraites pourrait signifier travailler plus longtemps pour beaucoup.
Sophie de Menthon
Le mouvement Ethic (18 fédérations professionnelles) estime par exemple qu’une forme de retraite « à la carte » est tout à fait possible. La retraite ne doit pas devenir un signe de désaffection pour le travail. Pourrait-on enfin dépasser ce qui devient une bataille partisane et même dans certains cas un cadeau à certains électeurs plus concernés ? Cette épée de Damoclès semble être l’objet principal du conflit qui oppose la classe politique en cette rentrée. La menace d’une motion de censure n’est rien d’autre qu’un moyen de pression électorale déconnecté et indifférent à ce dont les Français ont besoin.
C’est typiquement un sujet qui devrait être approfondi pour faire l’objet d’un référendum national dans plusieurs propositions. Il est évident que les rentes et l’âge auquel on a commencé à travailler doivent être pris en compte, mais faut-il interdire et limiter le travail sachant que dans notre entourage, nombreux sont ceux qui à 90 ans ont arrêté toute activité professionnelle depuis 30 ans. Est-ce sain ? Est-ce judicieux ? Est-ce leur souhait ? Pouvons-nous l’absorber financièrement ? Nous vieillissons chaque année : et quel raisonnement spécieux et malhonnête peut nous convaincre qu’il faut proportionnellement arrêter de travailler plus tôt ? Avec de la bonne volonté, pouvons-nous sortir de cette impasse volontaire ? Revoir la réforme des retraites signifiera peut-être travailler plus longtemps pour beaucoup.