« Ici le manager s’occupe de nous et on s’occupe du reste » : impossible de rater ce slogan, affichĂ© sur un grand panneau bleu, Ă l’entrĂ©e d’un Ăźlot de production du site Michelin de Roanne (Loire). Pierre Villeneuve, embauchĂ© en 2014 comme vĂ©rificateur, et aujourd’hui opĂ©rateur polyvalent, a plutĂŽtbondĂ© dans le sens de cette phrase : « On peut travailler correctement et sans pression, tout en prenant des dĂ©cisions au quotidien. On a des objectifs, il faut les atteindre, mais je n’ai jamais eu de patron derriĂšre moi ici. On ne vient pas au travail avec des papillons dans le ventre. »
Cette usine, qui fĂȘtera ses 50 ans en septembre 2024, fabrique chaque jour 4 000 pneus hautes performances. Ses 841 salariĂ©s, qui ont pour tradition de se serrer systĂ©matiquement la main pour se saluer, ont Ă©galement pris en charge des tĂąches dĂ©passant leur description de poste : dans chaque Ă©quipe, certains cumulent le rĂŽle de « correspondants » sĂ©curitĂ© et qualitĂ©, etc. Cela permet aux groupes de travail de gĂ©rer directement le travail au quotidien, et le manager n’intervient que lorsqu’il y a un problĂšme que les membres de l’Ă©quipe ne parviennent pas Ă rĂ©soudre.
Donner plus dâautonomie aux salariĂ©s pour leur proposer un travail plus variĂ© et valorisant est loin dâĂȘtre une idĂ©e nouvelle : depuis une quinzaine dâannĂ©es, le concept dâentreprise libĂ©rĂ©e dĂ©signe les â trĂšs rares â entreprises qui ont choisi de rĂ©duire le nombre de hiĂ©rarchies intermĂ©diaires. Force est de constater que cette philosophie stagne, et nâa jamais Ă©tĂ© pĂ©renne dans les grandes structures qui lâont testĂ©e (Auchan, Decathlon, etc.).
C’est pourquoi, chez Michelin, nous prĂ©fĂ©rons parler de« organisation habilitante »pour dĂ©signer cette nouvelle façon dâenvisager les collectifs de travail. Depuis vingt ans, la multinationale lâexpĂ©rimente, sur tous ses sites, Ă lâĂ©chelle dâĂźlots de production dâune trentaine de personnes chacun.
A Roanne, l’entreprise n’a pas supprimĂ© les managers du jour au lendemain, et elle n’a pas poussĂ© cette nouvelle direction au seul bien-ĂȘtre des salariĂ©s. Depuis un « accord de rĂ©activitĂ© » signĂ© en 2015 avec la majoritĂ© des organisations syndicales, l’usine a complĂštement rĂ©orientĂ© son activitĂ©, et adoptĂ© un mode de fonctionnement plus souple pour s’adapter aux commandes des clients… et ne pas disparaĂźtre.
La transition managériale
Il sâagissait donc dâaugmenter la productivitĂ© : comme lâusine tourne vingt-quatre heures sur vingt-quatre, et que les managers ne sont prĂ©sents que pendant la journĂ©e, les Ă©quipes â chaque Ăźlot est subdivisĂ© en cinq Ă©quipes avec un horaire changeant (plusieurs jours de suite le matin, puis lâaprĂšs-midi, parfois le soir et le week-end) â doivent par dĂ©finition ĂȘtre autonomes.
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« Ici le manager s’occupe de nous et on s’occupe du reste » : impossible de rater ce slogan, affichĂ© sur un grand panneau bleu, Ă l’entrĂ©e d’un Ăźlot de production du site Michelin de Roanne (Loire). Pierre Villeneuve, embauchĂ© en 2014 comme vĂ©rificateur, et aujourd’hui opĂ©rateur polyvalent, a plutĂŽtbondĂ© dans le sens de cette phrase : « On peut travailler correctement et sans pression, tout en prenant des dĂ©cisions au quotidien. On a des objectifs, il faut les atteindre, mais je n’ai jamais eu de patron derriĂšre moi ici. On ne vient pas au travail avec des papillons dans le ventre. »
Cette usine, qui fĂȘtera ses 50 ans en septembre 2024, fabrique chaque jour 4 000 pneus hautes performances. Ses 841 salariĂ©s, qui ont pour tradition de se serrer systĂ©matiquement la main pour se saluer, ont Ă©galement pris en charge des tĂąches dĂ©passant leur description de poste : dans chaque Ă©quipe, certains cumulent le rĂŽle de « correspondants » sĂ©curitĂ© et qualitĂ©, etc. Cela permet aux groupes de travail de gĂ©rer directement le travail au quotidien, et le manager n’intervient que lorsqu’il y a un problĂšme que les membres de l’Ă©quipe ne parviennent pas Ă rĂ©soudre.
Donner plus dâautonomie aux salariĂ©s pour leur proposer un travail plus variĂ© et valorisant est loin dâĂȘtre une idĂ©e nouvelle : depuis une quinzaine dâannĂ©es, le concept dâentreprise libĂ©rĂ©e dĂ©signe les â trĂšs rares â entreprises qui ont choisi de rĂ©duire le nombre de hiĂ©rarchies intermĂ©diaires. Force est de constater que cette philosophie stagne, et nâa jamais Ă©tĂ© pĂ©renne dans les grandes structures qui lâont testĂ©e (Auchan, Decathlon, etc.).
C’est pourquoi, chez Michelin, nous prĂ©fĂ©rons parler de« organisation habilitante »pour dĂ©signer cette nouvelle façon dâenvisager les collectifs de travail. Depuis vingt ans, la multinationale lâexpĂ©rimente, sur tous ses sites, Ă lâĂ©chelle dâĂźlots de production dâune trentaine de personnes chacun.
A Roanne, l’entreprise n’a pas supprimĂ© les managers du jour au lendemain, et elle n’a pas poussĂ© cette nouvelle direction au seul bien-ĂȘtre des salariĂ©s. Depuis un « accord de rĂ©activitĂ© » signĂ© en 2015 avec la majoritĂ© des organisations syndicales, l’usine a complĂštement rĂ©orientĂ© son activitĂ©, et adoptĂ© un mode de fonctionnement plus souple pour s’adapter aux commandes des clients… et ne pas disparaĂźtre.
La transition managériale
Il sâagissait donc dâaugmenter la productivitĂ© : comme lâusine tourne vingt-quatre heures sur vingt-quatre, et que les managers ne sont prĂ©sents que pendant la journĂ©e, les Ă©quipes â chaque Ăźlot est subdivisĂ© en cinq Ă©quipes avec un horaire changeant (plusieurs jours de suite le matin, puis lâaprĂšs-midi, parfois le soir et le week-end) â doivent par dĂ©finition ĂȘtre autonomes.
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