La mégastar de la pop Lady Gaga a dû “désapprendre à chanter” pour son rôle dans “Joker: Folie à deux”, le film le plus attendu de la Mostra de Venise, qui a stupéfié le public mercredi avec son cocktail de comédie musicale et d’univers de bande dessinée.
“Ce n’est pas une suite”, a pris soin de préciser le réalisateur Todd Phillips, qui avait créé la surprise en remportant le Lion d’or avec son premier “Joker” il y a cinq ans.
Ce film a également suscité de profondes divisions, en engrangeant plus d’un milliard de dollars de recettes au box-office, mais a été critiqué pour sa violence parfois gratuite. Le deuxième, qui dure 2 heures et 18 minutes, n’est pas non plus “une réponse” à ces critiques, a déclaré Phillips.
Or, si « Joker », sorti en pleine présidence Trump, avait su capter l’air du temps en s’inspirant de la montée du populisme sur fond d’inégalités sociales criantes, le second sort en pleine campagne électorale américaine. Et lui aussi sera certainement lu sous cet angle.
Joaquin Phoenix reprend le rôle-titre là où il l’avait laissé. Interné à l’asile d’Arkham, le Joker est amené à répondre devant la justice des cinq meurtres commis dans le premier volet.
« Joker : Folie à deux » est donc un film de procès, où l’on voit le personnage d’Arthur Fleck écarter son avocat pour se défendre, déguisé en Joker.
Il n’hésite pas à ridiculiser l’institution judiciaire et à jouer le peuple contre les puissants en s’adressant aux foules de ses partisans qui suivent les audiences à la télévision – un parallèle évident avec le comportement de l’ancien président Trump devant les tribunaux.
Le procureur Harvey Dent (autre personnage de l’univers Batman) est incarné par l’acteur britannique Harry Lawtey. Tout cela laisse finalement peu de place à Lady Gaga pour développer le nouveau personnage d’Harley Quinn, déjà incarné au cinéma par Margot Robbie dans “Suicide Squad” notamment.
– “Ne me quitte pas” –
La chanteuse, qui a percé sur grand écran dans “A Star is Born” (2018), le film de Bradley Cooper sur une star de la musique, après des petits rôles ici et là, compte néanmoins sur ce long métrage pour asseoir son statut d’actrice à part entière.
Fidèle à la mythologie de l’univers de Gotham City, son personnage au costume d’arlequin à carreaux noirs et rouges est un psychiatre qui noue une relation avec le Joker.
Dans « Joker : Folie à deux », elle se présente comme une résidente d’asile, seule capable de comprendre l’âme tourmentée de l’antihéros.
Le film comporte de nombreux passages chantés façon Broadway. La comédie musicale est un genre très populaire, de « Barbie » à « Emilia Perez » de Jacques Audiard, mais « je ne dirais pas que c’est un genre à proprement parler », a précisé Lady Gaga.
« Nous utilisons la musique pour vraiment donner aux personnages un moyen d’exprimer ce qu’ils ont à dire, car passer par le dialogue ne suffit pas », a-t-elle expliqué.
Pour une ambiance plus naturelle, les chansons ont été chantées en direct sur le plateau, et Lady Gaga a confié qu’elle avait « désappris à chanter, oublié comment respirer ». L’imperfection doit être ressentie – et elle l’est – à l’écran.
Joaquin Phoenix, qui chantait déjà dans le biopic sur Johnny Cash “Walk the Line” (2005), ne déçoit pas, notamment dans une reprise très libre de “Ne me quitte pas” de Nina Simone, entre autres grands classiques.
Avis aux fans, toujours pas de Batman en vue dans cette suite. Et Todd Phillips, qui avait fait grand bruit en subvertissant le genre super-héroïque dans le premier opus, signifie clairement qu’il compte s’arrêter là et ne développera pas une de ces franchises dont l’industrie cinématographique est pourtant friande.
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