« Nids à problèmes » : les logements squattés vendus à prix cassés affluent en Espagne

En Espagne, les hébergements à prix réduits abondent sur Internet. Leurs prix ? Généralement, entre 50 000 et 60 000 euros pour des biens de 50 à 60 m². Soit environ 1000 euros le m². Au sud de Madrid, une passoire thermique de 43 m² est en vente pour 55 000 euros, avec une remise de 35 % par rapport au prix de départ. La raison? Cet appartement de deux chambres est squatté. C’est écrit noir sur blanc dès le début de l’annonce avant même le descriptif du logement mis en vente. Les acheteurs potentiels sont avertis par la mention « Informations importantes ». « L’acheteur assumera la situation physique (c’est-à-dire la présence d’une occupation illégale), l’état de conservation (du logement) (…) et les procédures qui impliquent l’obtention de la possession judiciaire du bien», précise l’annonce.

Car, en Espagne, les propriétaires dont les logements sont squattés doivent entamer des poursuites judiciaires qui peuvent durer entre un et deux ans. Comme en France avant que le gouvernement ne décide, fin 2020, de réduire définitivement la procédure à 72 heures. « Vendre des logements squattés est une mission presque impossible» précise Loïc Cantin, président de la Fédération nationale de l’immobilier. Seuls les professionnels, comme les marchands de biens immobiliers, peuvent être intéressés, après avoir évalué la perte de revenus, le coût des travaux et le temps qu’il faudra pour récupérer le logement. Heureusement, en France, avec la loi anti-squat, les propriétaires se sentent moins abandonnés et peuvent récupérer plus rapidement leur logement.» Cette nouvelle loi semble avoir donné des idées au Sénat espagnol qui a adopté début février un projet de loi visant à expulser les squatteurs en seulement 24 heures et à condamner les « okupas » (squatteurs en espagnol) à trois ans de prison. , comme en France. Mais le texte, qui prévoit de restituer les taxes d’habitation et foncières aux propriétaires en cas de squats, est bloqué par le Congrès des députés, présidé par la gauche. « En Espagne, c’est plus payant d’être squatteur que d’être propriétairedénonce Gonzalo Bernardos, professeur à l’Université de Barcelone. Il est dommage que les propriétaires, en grande majorité modestes, ne puissent pas expulser les squatteurs et doivent leur eau, gaz et

Porte blindée « Anti-Okupa ». Crédit photo : Geoffroy Reiser – Terreta Espagne

d’électricité.»

Prix ​​réduits de 35% en moyenne

Irrités de devoir attendre aussi longtemps, certains propriétaires espagnols n’hésitent pas à prendre les choses en main pour récupérer plus rapidement leur logement. Certains vendent leur bien, à un prix forcément réduit – autour de -35% en moyenne et jusqu’à plus de 60% si l’état du logement est très dégradé et les squatteurs plus difficiles à déloger – dans l’espoir qu’un acheteur – généralement un grand investisseur suffisamment fort pour gérer cette situation – postule. D’autres propriétaires, désireux de conserver leur logement, choisiront de verser une somme en espèces – plusieurs milliers d’euros – aux squatteurs ou de faire appel à des sociétés spécialisées – comme Fuera Okupas (« fini les squatteurs »). – dont les méthodes divisent en Espagne. Avec l’accord de la police, certains n’hésitent pas à retirer la porte de l’immeuble pour faire pression sur les squatteurs, comme le montre un reportage de France Télévisions.

Logement Airbnb au rez-de-chaussée d’un immeuble à Valence. Crédit photo : Geoffroy Reiser – Terreta Espagne

Pour éviter les squats, les propriétaires protègent leur logement. « Ils sont très faciles à identifier : généralement les fenêtres et les portes sont murées avec des grilles ou les portes des appartements sont blindées. (voir photos ci-dessous ou dans l’illustration principale) pour empêcher les squatteurs d’entrer», raconte Geoffroy Reiser qui vit à Valence depuis 6 ans. Ce spécialiste de l’investissement locatif en Espagne conseille aux candidats de se renseigner sur l’immeuble ou les quartiers concernés avant de se lancer. « Si plusieurs appartements sont vides depuis longtemps, méfiez-vous car il suffit d’en squatter un et, par le bouche à oreille, les autres deviendront squatteurs, s’ils sont vides eux aussi. Et le bâtiment se transforme en nid trapu. Même les quartiers sûrs et calmes peuvent cacher des bâtiments à éviter., prévient le fondateur de Terreta Espagne qui suggère plutôt de partager un logement. « Le risque de non-paiement est plus dilué par rapport à une famille. En sept ans, je n’ai pas eu la moindre dette impayée», souligne Geoffroy Reiser qui loue 11 chambres.