Categories: Actualités locales

« Nous nous battons pour l’Iran, mais aussi pour la France »


“O« Nous sommes très émus de voir autant de Français à nos côtés, c’est un signal fort », sourit Mona Jafarian, porte-parole de l’association iranienne « Femme Azadi ». Drapée dans le drapeau iranien avec le Lion d’or, Mona Jafarian ne cache pas sa fierté en déclarant à la presse Indiquer Plus de 5.000 personnes se sont mobilisées aujourd’hui pour défiler de la place Victor Hugo à la place du Trocadéro – la préfecture évoque le chiffre de 700 manifestants – pour le 2e anniversaire de la mort de Mahsa Amini, tuée après son interpellation par la police des mœurs pour avoir prétendument porté un voile de manière incorrecte. “Nous nous battons pour l’Iran mais aussi pour la France car nous voyons que les valeurs laïques, démocratiques, sont attaquées ici. C’est donc un double combat que nous menons pour nos deux pays. Nous devons notre liberté à la France”, souligne Mona Jafarian, elle-même franco-iranienne.

Après avoir démarré vers 15 heures, la foule s’est ruée dans les rues du XVIe arrondissement, portée par les nombreux slogans scandés avec force par les organisateurs. « Ni Mollah ni foulard, laïcité en Iran », « Khomeiny t’es foutu, les femmes sont dans la rue », les participants en liesse brandissaient des drapeaux iraniens, mais aussi français et israéliens. Parmi les participants, on peut reconnaître les journalistes Anne Sinclair et Elsa Wolinski mais aussi plusieurs femmes politiques dont les députées Constance Le Grip et Astrid Panosyan-Bouvet. Accompagnées des féministes universalistes Annie Sugier et Arlette Zilberg du collectif « Les Citadelles » et Marika Bret, présidente du Printemps républicain et garante de la diffusion de l’œuvre de Charb, les députés ont brandi le long du cortège une grande banderole au message significatif : « Iran libre, Femme, vie, liberté ».

Hommages à Mahsa Amini, Toomaj Salehi et Shervin Hajipour

De nombreuses affiches portées par les participants rendaient hommage à Reza Pahlavi, prince héritier d’Iran et fils aîné du dernier Shah. Son épouse, la princesse Yasmine Pahlavi, a même tenu à être présente parmi la foule, mobilisant un important dispositif de sécurité. Après une minute de silence en hommage à Mahsa Amini, les hommages musicaux en l’honneur du rappeur Toomaj Salehi et du chanteur Shervin Hajipour ont ému les participants, dont certains ont été émus aux larmes. En effet, les deux artistes sont actuellement en détention en Iran pour leur manifestation publique en faveur des femmes iraniennes.

À LIRE AUSSI Un président « modéré » pour l’Iran : le plan machiavélique de l’ayatollah KhameneiAlors que de nombreuses pancartes du CRIF sont portées par les manifestants, l’un des organisateurs iraniens glisse même au micro un message de remerciement à « ses amis juifs » : « Nous (les Iraniens, ndlr) sommes les otages des islamistes depuis 45 ans, j’espère que vos otages seront bientôt libres », ajoute-t-il, provoquant une explosion parmi la foule.

A l’avant du cortège, on peut voir plusieurs membres du collectif féministe “Femen” brandir des affiches, dont une affichée sur la place du Trocadéro qui provoque de vives réactions d’enthousiasme chez les participantes : “La place des Mollah est en enfer”. “Les Femen sont là depuis le début, et à chaque fois. A part quelques collectifs comme les Citadelles, les féministes, elles sont absentes de nos combats depuis deux ans”, soupire Mona Jafarian après une prise de parole au micro moquant l’absence des plus grandes associations féministes françaises.

Dans la foule, quelques pancartes portées par des femmes de tous âges invectivent directement les « néo-féministes ». « Les néo-féministes détestent les femmes iraniennes et israéliennes, honte à elles ». Une pancarte tenue par une Iranienne attire notre attention : « Résistantes iraniennes, les vraies féministes sont là aujourd’hui et pour toujours avec vous ». « J’ai moi-même grandi en France et je me suis toujours considérée comme de gauche, vraiment ! Et ces dernières années je me suis sentie extrêmement trahie, j’ai l’impression que ce qui s’est passé en Iran se reproduit en France. Les Iraniennes n’étaient pas plus stupides que les Françaises aujourd’hui, et si cela a pu arriver en Iran, cela peut très bien arriver ici » confie-t-elle. Indiquer sa propriétaire, arrivée en France pendant la révolution iranienne. « Je suis étonnée que les femmes ne comprennent pas le danger qui arrive aujourd’hui en France. »

Une contre-manifestation qui perturbe

Ces groupes féministes et LGBT, absents de la place Victor Hugo, ont pourtant soutenu la contre-manifestation qui avait eu lieu une heure plus tôt, à 14 heures place de la Bastille. Parmi les logos sur l’affiche figurait la Fondation des Femmes, dirigée par la militante Anne-Cécile Mailfert, ancienne porte-parole d’Osez le féminisme et présente au contre-rassemblement. “Femmes, vie, liberté aux femmes d’Iran, on vous entend, il n’y a pas de murs assez épais pour nos oreilles, qui sont celles de la sororité. Vous n’êtes pas seules, partout dans le monde et en France aussi, on vous entend, on vous admire et on vous suit”, a-t-elle lancé au micro face aux manifestantes.

Après un premier appel sur les réseaux sociaux de Marjane Satrapi, dessinatrice franco-iranienne et auteure de la célèbre bande dessinée PersépolisPrivilégier la manifestation place de la Bastille, sur les réseaux sociaux, c’est la confusion. “Pourquoi organiser deux rassemblements le même jour dans deux endroits différents ? C’est déjà compliqué de mobiliser, pourquoi se diviser ?” Pourquoi n’y a-t-il pas d’unité, c’est ridicule, les mollahs qui profitent de cette division, honte à nous tous parce que nous sommes des imbéciles. Tant qu’il n’y a pas d’unité, ces manifestations ne servent à rien”, s’interrogent plusieurs internautes.

Les interrogations et les agacements se multiplient dans les commentaires des comptes relayant la contre-manifestation, perplexes face à cette division sans communication claire. Le point “Il suffit de regarder où est la diaspora, nous sommes plusieurs milliers ici, peut-être parce que nous sommes la voix des Iraniens. C’est peut-être aussi parce que les gens affiliés à LFI sont des “fascistes faciles”, et tout ce qui n’est pas LFI est fasciste pour eux. On a des gens de gauche, de droite, du centre, donc je ne sais pas d’où ça vient. Certains sont pour une république, d’autres pour une monarchie constitutionnelle. C’est ça la démocratie, c’est donner la liberté à tout le monde de venir.”

« On en a marre de votre clanisme droite-gauche d’un autre siècle »

Sur ses réseaux sociaux, l’auteure et militante féministe Sarah Barukh s’est insurgée en découvrant l’existence de la contre-manifestation : “certaines associations qui osent encore se dire de gauche, soutenues par la principale fondation féministe en France, ont tenté de prendre le relais du mouvement Femme, Vie, Liberté en organisant une contre-manifestation en même temps que ”femmeazadi”. Ce qui est pour moi inacceptable quand on sait comment ces femmes risquent leur vie pour que leurs sœurs, leur peuple et tous les autres pris en otage par les islamistes de la République islamique d’Iran soient libérés.” Avant de conclure : “on en a marre de votre clanisme droite-gauche d’un autre siècle. Votre idéologie vous aveugle et des femmes en meurent. Femme, Vie, Liberté pour TOUTES. Même celles qui vous gênent.” Contactée, Anne-Cécile Mailfert a confirmé à l’AFP Indiquer n’ayant pas été informée d’une autre manifestation, elle s’est rendue à la contre-manifestation organisée par les partenaires iraniens de la Fondation des femmes. De son côté, l’une des co-organisatrices, l’avocate Chirinne Ardakani, membre du collectif « Iran Justice », n’a pas encore répondu à nos sollicitations.

À LIRE AUSSI Iran : l’avocat du rappeur Toomaj Salehi annonce l’annulation de sa condamnation à mortUn mois plus tôt, le 15 août, le compte multi-suivi @lettresTéhéran avait annoncé sur son compte X qu’il quittait le réseau social au motif que « En Iran, il y a des femmes voilées qui luttent contre le voile obligatoire. Le combat contre le voile obligatoire n’est pas un combat contre les femmes voilées ». Dans un long texte, le collectif s’en prend à ce qu’il décrit comme « l’extrême droite occidentale, ainsi que son alliée l’opposition royaliste iranienne et leurs soi-disant ‘idiots utiles’ universalistes, détournent ce mot d’ordre et notre mouvement pour monter les femmes les unes contre les autres, et les causes les unes contre les autres ».

De son côté, Mona Jafarian s’est défendue sur son compte Instagram personnel en mettant d’abord en avant une récente fake news du compte “lettresdeTéhéran” au sujet d’une fausse liaison entre le président Emmanuel Macron et l’actrice franco-iranienne Golshifteh Farahani. Puis en ajoutant : “ce compte est tenu par ce qu’on appelle une extrême gauche iranienne, c’est-à-dire notre LFI mais version Iran, donc des gens qui ne représentent pas grand-chose mais qui ont des particularités avec La France insoumise comme la haine du drapeau, celle de traiter tout le monde de fasciste, une haine de l’histoire du pays, des valeurs de patriotisme…”


Anna

À chaque coup de stylo, créez des histoires captivantes. Découvrez des vérités cachées à la fois. 📝 🔍

Recent Posts

Parents, connaissez-vous les « sanctions éducatives » ?

" P« Parler de punition, ce n’est pas être un adepte de l’éducation répressive ou un partisan de la coercition…

1 minute ago

Après Éric Ciotti, le président des Jeunes LR, Guilhem Carayon, quitte également le parti

INFOS LE FIGARO - Le jeune partisan de l'union de la droite est aujourd'hui vice-président de l'UDR, le parti d'Eric…

2 minutes ago

Euro 2024 : l’UEFA reconnaît l’erreur d’arbitrage de l’Allemagne pour une main non sifflée

C'est suffisamment rare pour mériter d'être souligné. L'UEFA a reconnu une erreur d'arbitrage sur une main non autorisée du défenseur…

5 minutes ago

Origines politiques et géographiques, âge, niveau d’études… Radiographie des ministres du gouvernement Barnier

INFOGRAPHIE - Le gouvernement ne compte que deux diplômés de l'ENA, dont le ministre de l'Economie qui, à 33 ans,…

7 minutes ago

Saïd Chabane, propriétaire du Sco d’Angers, rejugé en avril pour agression sexuelle

Le procès en appel du dirigeant angevin, condamné pour agression sexuelle en mars dernier, se tiendra le 28 avril 2025.…

9 minutes ago

Genetet promet de « maintenir le cap » et suscite la méfiance

Promu ministre de l'Education nationale, Anne Genetet promet de garder le cap avec les écoles, mais son inexpérience sur les…

12 minutes ago