DPartout, des appels se font entendre pour repenser la lutte contre la pauvreté afin de tenir compte des limites planétaires.
Il y a déjà cinquante ans, une équipe du Massachusetts Institute of Technology (MIT) présentait ses conclusions, à la demande du Club de Rome, et indiquait que l’augmentation du produit intérieur brut (PIB) ne pouvait pas se poursuivre indéfiniment : la poursuite de la croissance économique la croissance conduirait inévitablement à l’épuisement des ressources non renouvelables et à des niveaux de déchets et de pollution que les écosystèmes ne pourraient pas absorber. De plus en plus de scientifiques partagent ce diagnostic.
Depuis une dizaine d’années, à l’appel notamment de Tim Jackson, Dominique Méda, Vincent Liegey et Timothée Parrique, les économistes tentent de construire des modèles macroéconomiques prenant en compte l’impératif de ralentissement.
Les hommes politiques eux-mêmes commencent enfin à prendre conscience du défi. Deux signes, entre autres : la réponse reçue par un rapport présenté à l’ONU sur l’éradication de la pauvreté « au-delà de la croissance » ; et l’engagement des gouvernements, inscrit dans le pacte adopté lors du Sommet du Futur réuni à New York les 22 et 23 septembre, à utiliser des indicateurs de progrès qui vont au-delà du PIB.
Lutte contre le battage publicitaire
La lutte contre la pauvreté est traditionnellement conçue comme une séquence en trois étapes :
– grâce à la croissance économique, nous augmentons la richesse disponible ;
– grâce à la fiscalité imposée aux entreprises et aux ménages aisés, l’État finance ses budgets ;
– à travers les services publics et la protection sociale, elle assure sa fonction de redistribution.
La fonction redistributive de l’État providence reste essentielle. Mais cette manière de procéder entretient une compétition entre lutte contre la pauvreté et réduction de l’empreinte environnementale. Il faut donc élargir la gamme des instruments déployés pour atténuer cette tension, si l’on ne parvient pas à la faire disparaître complètement.
La réduction des inégalités est essentielle à cet égard. L’exclusion sociale résulte certainement d’abord d’un dénuement matériel sévère qui résulte de l’absence de revenus suffisants, et les statistiques nous rappellent cette réalité : en Europe, 23,9 millions de personnes sont dans une grande pauvreté. Mais elle résulte aussi des écarts de revenus entre les plus riches et les plus pauvres, qui peuvent se sentir exclus même lorsque leurs besoins fondamentaux sont satisfaits, lorsque les attentes sociales évoluent avec l’augmentation du niveau de vie moyen : ne pas pouvoir sortir de la classe verte ou s’inscrire en classe verte. une activité extrascolaire, ne pas pouvoir acheter le matériel sportif nécessaire, ou ne pas pouvoir participer à la vie sociale parce qu’on a honte d’être mal habillé. Cela aussi fait partie de l’expérience de la pauvreté.
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