Oxfam veut mettre fin au « jackpot des super riches »

Le sujet de l’impôt sur les successions est sensible, et Oxfam ne l’ignore pas. Mais l’ONG pointe ce mardi “l’écart entre perception et réalité”. 80% des Français sont opposés à une augmentation de l’impôt sur les successions ? Pourtant, près de 90% ne sont pas concernés : seul 1 Français sur 10 hérite de plus de 100 000 euros au cours de sa vie – le seuil d’imposition en ligne directe (parents-enfants).

Dans le même temps, les 0,1 % les plus riches (un Français sur 1 000) héritent en moyenne de 13 millions d’euros, qui échappent largement à cet « impôt sur la mort » : ils ne paient qu’environ 10 % de droits de succession. Loin des 45 % censés s’appliquer à la tranche supérieure à 1,8 million d’euros. En cause : de nombreux dispositifs dédiés, exonérations et autres niches fiscales. Une simulation montre que les 25 milliardaires français de plus de 70 ans devraient transmettre plus de 460 milliards d’euros de superhéritages au cours des 30 prochaines années. Quel est le manque à gagner pour l’État selon Oxfam ? 160 milliards, soit plus de cinq milliards par an. C’est pratiquement le budget annuel du ministère de l’Agriculture (six milliards), et plus que celui de la Culture (4,4).

Barnier veut rétablir la « justice fiscale »

En quittant Bercy, Bruno Le Maire a appelé son successeur à ne pas augmenter les impôts. Mais quid des droits de succession ? A son arrivée, le nouveau Premier ministre Michel Barnier a appelé à plus de justice fiscale, sans détailler ses projets. Oxfam propose, d’abord, de taxer « normalement » les héritages des plus riches afin de redresser les finances publiques. « Ce que la plupart des gens possèdent et héritent ne changerait pas : nous ne disons pas qu’il faut ultra-taxer les plus riches, nous demandons juste qu’ils soient soumis aux règles normales », conclut Cécile Duflot, directrice d’Oxfam.

Parmi les bêtes noires désignées par Oxfam, le fameux « pacte Dutreil », qui exclut sans aucun plafond jusqu’à 75 % du patrimoine d’une succession s’il s’agit d’une entreprise. Ce mécanisme coûte à lui seul à l’Etat jusqu’à trois milliards d’euros par an, selon le Conseil d’analyse économique… presque le budget du ministère de la Santé. « Le pacte Dutreil protège les fortunes, pas du tout les entreprises et les petites entreprises » pour lesquelles il a été mis en place, insiste Cécile Duflot.

L’ancienne ministre envisage plutôt un plafond, qui protégerait les « vraies » entreprises familiales plutôt que les super-riches héritiers de multinationales. Ainsi qu’une intégration des contrats d’assurance-vie dans le barème classique, sans l’abattement spécifique qui s’ajoute aux autres et favorise, une fois de plus, les patrimoines les plus conséquents. « Un barème fiscal unique et progressif permettrait d’éviter le chevauchement des abattements, ainsi que d’effacer les différences d’imposition en fonction des liens familiaux », estime-t-elle.