NNécessité urgente nécessitant une stratégie de long terme, la transition climatique impose un grand écart aux dirigeants politiques : gérer l’immédiat, y compris les soubresauts de l’opinion publique, tout en posant des jalons essentiels, mais pas tous populaires, pour l’avenir. C’est pourquoi l’annonce, en 2022, par Emmanuel Macron, du rattachement au Premier ministre de la gestion de la « planification écologique » a constitué une véritable avancée. A Marseille, entre les deux tours de l’élection présidentielle, le candidat Macron avait promis de transformer la France en une « grande nation écologique », « le premier à sortir du gaz, du pétrole et du charbon ».
La création du Secrétariat général à la planification écologique (SGPE), une administration d’une trentaine de personnes placée sous l’autorité du chef du gouvernement, répond à cette juste ambition. Elle initie une avancée : la traditionnelle politique en silos – transports, industrie, logement… – dominée par Bercy commence à être remplacée par une stratégie globale fondée sur des objectifs durables de réduction des émissions de carbone. L’impulsion et les arbitrages exercés par cette nouvelle entité se révèlent d’autant plus efficaces que le secrétaire général, Antoine Pellion, cumule cette fonction avec celle de conseiller écologie auprès du premier ministre.
Dessinées secteur par secteur, les courbes de décarbonation ont montré l’ampleur des efforts à fournir. Et le budget 2024, avec ses 10 milliards d’augmentation des investissements de l’État dans la transition écologique, a reflété un début timide de mise en œuvre des recommandations du rapport Pisani-Ferry-Mahfouz, qui préconisait, en 2023, une programmation sur trois décennies des investissements climatiques.
Mais le cercle vertueux initié par la SGPE a fait long feu. Déjà, le désintérêt de Gabriel Attal pour ces sujets avait considérablement fragilisé la structure. La dissolution de l’Assemblée et la démission du gouvernement l’ont mise en péril, alors qu’elle était conçue pour résister aux crises, voire aux alternances politiques. La « lettre plafond » adressée par Matignon au ministère de la Transition écologique pour son budget 2025 prévoit des coupes dans les crédits, en totale contradiction avec les objectifs fixés, et la publication des documents de programmation préparés depuis des mois par le Secrétariat général a été gelée pour cause de vacance gouvernementale.
Selon les informations de Monde, Le nouveau Premier ministre, Michel Barnier, devrait maintenir la SGPE, mais le risque existe que cette structure, indispensable à la réussite de la décarbonation, devienne une coquille vide. Ce serait un retour en arrière désastreux pour le pays. Certes, M. Barnier a été ministre de l’Environnement (1993-1995), mais sa famille politique – Les Républicains – a tendance à présenter la technique comme une alternative aux efforts de décarbonation et à considérer les dépenses consacrées à ce sujet avant tout comme des sources de déficits budgétaires.
Le nouveau locataire de Matignon devrait se rappeler que planifier l’action de l’État fait partie des fondamentaux du « gaullisme social » auquel il se réclame. Notamment lorsqu’il s’agit d’enjeux vitaux pour la France et sa population. Quelle régression pour le pays que serait une politique aveugle au défi de la transition climatique ! Et quelle nouvelle défaite pour un président de la République qui promettait en 2022 que son second quinquennat serait un succès. ” sera(il) écologique ou ne sera pas(il) pas “ !
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