Plus d’agriculteurs, moins de contraintes ? Le projet de loi agricole débattu mercredi à l’Assemblée

Une vache le 22 février 2024 dans une étable à Mahalon, dans l'ouest de la France (Fred TANNEAU)

Une vache le 22 février 2024 dans une étable à Mahalon, dans l’ouest de la France (Fred TANNEAU)

Réécrit pour répondre aux colères hivernales, le projet de loi agricole du gouvernement ne sera finalement examiné qu’à partir de mercredi à l’hémicycle, accueilli tièdement par l’opposition qui critique un manque d’ambition sur le foncier ou les rémunérations, voire un effet potentiellement néfaste sur l’environnement.

Les débats devaient débuter mardi mais l’examen du très sensible projet de loi constitutionnelle a duré plus longtemps que prévu, bouleversant le calendrier. Les discussions sur le projet de loi agricole devraient commencer peu après 15 heures mercredi.

«C’est une brique et un pas de plus», souligne le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau dans La Nouvelle République.

Côté syndical, l’alliance majoritaire formée par la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs soutient la philosophie du texte, tandis que les deux autres forces représentatives s’y opposent.

La Confédération paysanne (troisième syndicat), qui défend l’urgence de la transition agroécologique, appelle à la « profondément modifier » et la Coordination rurale (deuxième syndicat) estime que « le compte n’y est pas » compte tenu de l’ampleur de la crise.

Les députés verts ouvriront le bal avec une motion de rejet.

« Il n’y a ni volet financier, ni volet revenu, rien pour la transition écologique », argumente son auteure Marie Pochon, qui devrait bénéficier du soutien des socialistes. « Cette loi est une illusion », explique leur leader Dominique Potier, tandis que le groupe LFI critique « une loi qui guide l’agro-industrie ».

Mais les députés communistes ne devraient pas les suivre. « Cette loi ignore la colère intense des agriculteurs, notamment sur les rémunérations » mais « il y a urgence à en débattre », explique Sébastien Jumel.

Au RN, on penchait pour lundi laisser le débat avoir lieu, même si le texte est « très en deçà des attentes » pour Grégoire de Fournas. Une source au sein du groupe LR estime par ailleurs difficile d’aller « plus loin que les syndicats agricoles qui jouent à l’apaisement », tout en déplorant l’absence de mesures sur la fiscalité.

Questions renvoyées par l’exécutif à l’automne : une mission parlementaire de députés Renaissance aura déposé ses travaux sur les revenus des agriculteurs et l’exécutif aura avancé sur un deuxième texte concernant les produits phytosanitaires.

– « Intérêt général majeur » –

En attendant, le texte éclectique du gouvernement propose des mesures sur la formation, la simplification de la législation sur les haies, ou encore « l’accélération des contentieux » en cas de recours contre des projets de stockage d’eau ou de construction de bâtiments. élevage, malgré les mises en garde du Conseil d’État sur les « risques de constitutionnalité ».

Un décret publié ce week-end réduit simultanément de quatre à deux mois le délai de recours contre ce type de projet, suscitant l’inquiétude des organisations environnementales, déjà opposées à la philosophie du projet de loi.

La Fondation pour la Nature et l’Homme (FNH) critique particulièrement une « loi à contre-courant des enjeux de notre siècle ».

L’article phare du texte prévoit de consacrer « l’agriculture et la pêche » comme étant d' »intérêt général majeur », une forme de recours aux juges administratifs pour faciliter certains projets de retenue d’eau ou de construction d’élevage. en surface, lorsqu’ils sont mis en balance avec un problème environnemental.

Visé par quelque 800 amendements sur plus de 4 000 déposés, il est paradoxalement celui qui est accueilli avec le plus de circonspection par les élus, voire juristes, qui estiment que la protection de l’environnement ayant une valeur constitutionnelle, elle prévaudra toujours sur ce point. un intérêt général majeur inscrit dans une loi simple.

Autre point chaud : la création de groupements d’épargne foncière agricole, structures qui devraient permettre de lever de l’argent auprès d’investisseurs publics ou privés et de financer l’achat de terres lorsque les nouveaux agriculteurs n’en ont pas les moyens. .

Mais une coalition d’oppositions a supprimé l’article en commission, jugeant notamment qu’il ouvrait la porte à une « financiarisation » de l’agriculture au profit des banques ou des fonds d’investissement, ce que dément le camp présidentiel.

Les rapporteurs proposeront des garde-fous lors de la réunion (limitation de la taille de l’exploitation pouvant appartenir à un même groupe financier, pas de vente avant dix ans sauf à l’exploitant, etc.).

Un vote solennel du texte est prévu le 28 mai dans l’hémicycle.

sac-sb/lpa