DEvidemment, les grands patrons français ne facilitent pas le travail déjà compliqué du ministre de l’Économie. Le même jour, Bruno Le Maire énerve le patron de la SNCF, qui a signé, selon lui, des accords sociaux trop avantageux, et tire la sonnette d’alarme face à la menace brandie par Patrick Pouyanné, le PDG de TotalEnergies. , pour déplacer la cotation principale de sa société de Paris à New York.
Invoquer le« intérêt suprême de la nation »a assuré le ministre, jeudi 2 mai, au micro de BFM-TV “Soyez là pour faire en sorte que cela n’arrive pas, car c’est une décision sérieuse”. Si tout cela n’était qu’une enquête de la part de Patrick Pouyanné pour jauger les réactions en France, il a sa réponse : politiquement, cela ne marche pas.
Ce n’est pas une surprise, mais les compagnies pétrolières européennes ont besoin de preuves d’amour en ce moment, car elles se sentent attaquées de toutes parts. C’est également le cas de l’autre major majeure du Vieux Continent, l’anglo-néerlandais Shell. Elle étudie également la possibilité de faire passer son titre outre-Atlantique. Pour exactement les mêmes raisons.
Ce n’est pas tant le désenchantement du grand public qui les bouleverse que celui des investisseurs financiers. Les Européens s’en détournent, pour respecter les nouveaux critères d’investissement socialement responsable, quand les financiers américains ont de moins en moins ce type de soucis. Résultat : ces derniers représentent désormais 48 % de la propriété institutionnelle totale de TotalEnergies, contre 34 % pour les Européens.
Signe de cet écart croissant, le 2 mai, l’association d’actionnaires Follow This, qui entend pousser les engagements climatiques des compagnies pétrolières, a publié une résolution, qu’elle présentera à l’assemblée générale, exigeant plus d’efforts de la part de Shell pour respecter les Accord de Paris. Et cette année, il a reçu la signature de deux des plus grands investisseurs institutionnels européens, les français Amundi et Axa.
Pour la place parisienne, se priver d’un tel poids lourd serait très grave. Outre la perte de liquidités, cela pourrait envoyer un signal à d’autres acteurs majeurs qui s’estiment mal valorisés en Europe. C’est le cas pour beaucoup, puisque sur les douze derniers mois, Wall Street a connu une croissance presque deux fois supérieure à celle de l’Europe. Dommage, à l’heure où l’on cherche à renforcer l’attractivité financière française et européenne. Politiquement, ce serait tout aussi désastreux si ceux qui sont au pouvoir n’ont sur les lèvres que le mot souveraineté. Mais au moins le message est passé.
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