AAu soir du second tour des législatives, les dirigeants de gauche et écologistes pouvaient se réjouir. L’annonce par Emmanuel Macron d’élections législatives anticipées un mois plus tôt les avait pris de court, empêtrés qu’ils étaient dans les divisions et un paysage politique dominé par le Rassemblement national (RN). Sous pression, ils sont parvenus à conclure un accord programmatique et électoral puis à relancer le front républicain face à l’extrême droite. Cela leur a permis de limiter la forte percée du RN, de battre la majorité sortante et de gagner une quarantaine de sièges par rapport à 2022. Surtout, ils ont obtenu une majorité (très) relative à l’Assemblée nationale.
Dans la plupart des démocraties avancées, cette situation les aurait mis dans une position favorable pour gouverner, au terme d’une séquence à laquelle la France n’est pas habituée. Le chef de l’État aurait pu nommer un représentant issu de leurs rangs ou bien ils auraient pu se tourner vers d’autres chefs de groupe – du centre ou de la droite – pour tenter de former le gouvernement. Pour réussir, ces négociations auraient consisté à faire et obtenir les compromis nécessaires pour avoir le soutien ou, à défaut, l’absence d’opposition d’une majorité absolue de députés. Pas à faire croire qu’il est possible de gouverner sans élargir le champ d’action d’une coalition de seulement 200 députés.
Mais la latitude institutionnelle du Président du Vet La République, qui nomme directement le Premier ministre, lui a permis d’attendre plusieurs semaines avant de mener lui-même des négociations exclusivement bilatérales, dont l’objectif principal était sans doute d’éviter de dégrader son bilan. La position prépondérante et la proximité de l’élection présidentielle ont encouragé les autres forces à ne pas jouer la carte du compromis et à refuser de gouverner ou de laisser gouverner les autres – jusqu’à ce que Marine Le Pen accepte de ne pas censurer un Premier ministre issu des Républicains plus proche de sa ligne politique.
Les cadres du Nouveau Front populaire (NFP) sont aussi responsables de cette situation, et tout indique qu’une majorité d’entre eux n’avaient, en réalité, aucune envie de gouverner. En se vantant, comme l’a fait Jean-Luc Mélenchon, sur le thème de « tout le programme, rien que le programme » Alors qu’il manquait une centaine de députés au NFP, il a suscité des accusations de sectarisme et d’irréalisme. En se donnant plus de deux semaines pour désigner son candidat à Matignon, et en refusant les noms les plus susceptibles de créer un compromis, il a affiché ses divisions et réduit la pression sur le chef de l’Etat. En annonçant – pour La France insoumise et Les Ecologistes – qu’il censurerait un éventuel gouvernement Cazeneuve, il a joué la carte du tout ou rien qui a laissé au RN la position de sortie de crise et de “surveillance”.
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