Il est impératif que la communauté internationale se concentre sur l’atténuation des conséquences négatives du changement climatique et sur l’élaboration de mesures d’adaptation, afin que les habitants des zones touchées ne se retrouvent pas déplacés de chez eux et puissent construire leurs moyens de subsistance.
Les appels lancés aux pays développés pour qu’ils se préparent à l’arrivée des « réfugiés climatiques » et élargissent la Convention des Nations Unies sur les réfugiés en conséquence sont mal informés et, pire, contre-productifs.
Alors que le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a publié son sixième rapport d’évaluation en mars 2023, l’attention mondiale s’est tournée, encore plus fortement qu’auparavant, vers les effets du changement climatique sur l’humanité. La possibilité d’une migration massive vers le soi-disant Nord global est de plus en plus évoquée en raison de la sécheresse, des inondations et de la dégradation naturelle résultant du changement climatique.
Cependant, une vérification rapide du rapport du GIEC révèle ce que les climatologues disent depuis un moment maintenant. Nous ne savons pas comment le changement climatique affectera la mobilité. Le rapport du GIEC lui-même mentionne la migration forcée comme une conséquence possible du changement climatique, mais il ne tente pas de quantifier les effets du réchauffement climatique sur les mouvements transfrontaliers, que ce soit actuellement ou à l’avenir.
Une étude récemment réalisée pour le gouvernement suédois place les scénarios calamiteux de migration climatique massive dans un contexte scientifique.
En analysant les données produites par l’Observatoire des déplacements internes, l’étude montre que sur les 344 millions de personnes déplacées par des conditions météorologiques extrêmes et des catastrophes naturelles entre 2008 et 2021, seuls 2 % ne sont pas retournés dans la sous-région ou le lieu d’où ils ont été déplacés.
En ce qui concerne les futurs scénarios de migration climatique, la communauté scientifique n’a, jusqu’à présent, identifié aucun schéma de causalité entre le changement climatique, les conflits et la migration.
En revanche, les scénarios existants montrent que le changement climatique est susceptible d’entraîner une baisse de l’émigration des personnes aux revenus les plus faibles, car le manque de ressources entraîne l’immobilité.
Comme Adam Reuben et moi-même le soutenons dans un court article récent, créer de nouveaux fondements juridiques pour les « réfugiés climatiques » serait aussi peu judicieux que de commencer à préparer des mouvements massifs de population en raison de la dégradation de l’environnement. La Convention de 1951 relative au statut des réfugiés n’inclut pas les changements climatiques comme motif de persécution des individus.
Pourquoi la convention sur les réfugiés ne devrait-elle pas être réexaminée? Premièrement, toute tentative de renégociation de ce document international est vouée à l’échec. Les discussions qui ont précédé le Pacte mondial pour les migrations adopté il y a cinq ans ont clairement mis en évidence la réticence des États à étendre leurs obligations légales.
Avec 146 États parties à la Convention sur les réfugiés et 147 parties au protocole qui l’accompagne, le monde ne peut que se retrouver avec un document moins satisfaisant que celui dont nous disposons actuellement.
Deuxièmement, et peut-être plus important encore, le terme « réfugié climatique » perturberait le statu quo juridique, dégradant le consensus international sur ce qui constitue l’asile.
Le régime actuel de protection des réfugiés est destiné aux personnes qui ont peu de chances de rentrer chez elles ou qui ne peuvent le faire qu’à long terme. Ceux qui préconisent un élargissement de la définition juridique d’un réfugié ignorent le fait que la grande majorité des migrants motivés par le climat sont déplacés à l’intérieur de leur pays. La protection internationale n’est pas applicable à ces situations.
De plus, certains soutiennent que le changement climatique est d’origine humaine et que, par conséquent, selon la loi, le pollueur devient le persécuteur. C’est en effet un fait établi que les pays développés du Nord ont été de loin les plus gros pollueurs.
Ce que les partisans de cet argument oublient cependant, c’est qu’un élargissement de la convention pour prendre en compte le changement climatique demanderait aux persécutés de chercher refuge auprès des persécuteurs, faisant ainsi des ravages dans le régime international des réfugiés. Les organisations internationales concernées, telles que l’Organisation internationale pour les migrations, partagent ce scepticisme quant à la codification dans un principe juridique de la complexité de la mobilité humaine et du changement climatique.
Au lieu de commencer à se préparer aux mouvements de population transfrontaliers induits par le climat, les gouvernements doivent s’engager à renforcer la résilience face aux chocs environnementaux et à la dégradation progressive de l’environnement, ainsi que, bien sûr, à réduire la vitesse du réchauffement climatique.
L’extension de la convention sur les réfugiés ou la création d’un statut juridique spécifique au climat ne rendrait pas service aux personnes vivant dans les zones touchées.
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