pouvoir d’achat, impôts, immigration… Ces sujets que Barnier ne pourra pas éluder

Plus de trois semaines après son arrivée à Matignon, Michel Barnier passe aux choses sérieuses ce mardi 1er octobre depuis la tribune de l’Assemblée nationale. Si peu de choses ont filtré jusqu’ici sur ses intentions politiques, le chef du gouvernement est désormais tenu de présenter ses objectifs pour les mois à venir qui doivent convaincre aussi bien la macronie que le Rassemblement national.

Vers une hausse d’impôts pour les très grandes entreprises et les ménages les plus riches

Dans un contexte budgétaire particulièrement tendu avec un déficit public qui pourrait dépasser les 6%, Michel Barnier devrait consacrer une partie de sa déclaration de politique générale aux impôts.

Jusqu’à présent, il est resté très vague sur ce sujet à haut risque politique après 7 ans de déclin ininterrompu, l’une des principales promesses d’Emmanuel Macron en 2017 puis en 2022.

Tout au plus a-t-il confirmé vendredi dans les colonnes du Journal de Saône-et-Loire vouloir augmenter certains impôts en ciblant “ceux qui peuvent contribuer à cet effort”, c’est-à-dire les entreprises et les très riches, et en préservant “ceux qui sont sur le terrain, qui travaillent, qui produisent”.

La ligne de crête s’annonce étroite : 27 députés macronistes ont franchi une tribune dimanche jugeant toute augmentation d’impôts « impensable ».

“Je sais que beaucoup d’entre nous ne pourront pas soutenir un gouvernement qui augmenterait les impôts”, a déclaré Gérald Darmanin lors de la conférence de presse. son retour politique à Tourcoing ce dimanche.

Michel Barnier pourrait cependant énumérer quelques chiffres pour marquer les esprits, citant par exemple le taux d’imposition réel des ultra-riches en France qui s’est élevé à seulement 2% en 2022 selon une étude réalisée par l’économiste Gabriel Zucman.

Pour toucher les plus riches, Michel Barnier pouvait s’appuyer sur une augmentation marginal taux d’imposition sur le revenu sur la base des derniers versements du barème. Ils concernent notamment des revenus supérieurs à 168.994 euros par an.

Pour compléter le tout, le Premier ministre pourrait également prendre le relais une contribution exceptionnelle des grandes entreprisessoutenue par les députés macronistes ou Modem en 2022 au nom de taxation des superprofits. TotalÉnergies ne dispose par exemple que de rarement payé l’impôt sur les sociétés ces dernières années.

La taxation des entreprises énergétiques qui existe depuis plusieurs années n’a rapporté que 300 millions d’euros en 2023. En mars dernier, Thomas Cazenave, alors ministre délégué chargé des Comptes publics, promettait de « chercher au moins un milliard d’euros cette année ».

Une taxe sur les entreprises qui rachètent leurs propres actions pourrait également être sur la table. Déjà proposé par Emmanuel Macron lui-même en 2023, il a finalement été rejeté par l’exécutif lors de l’élaboration du budget 2024.

Autant dire que la macronie aura du mal à refuser de telles évolutions qui viennent de son propre camp. Et ces augmentations auraient aussi un avantage : ne pas affecter les impôts des « classes moyennes », conformément à une promesse faite par le Premier ministre à Michel Barnier.

Les mesures très délicates sur le pouvoir d’achat

Face à l’inflation qui continue de saisir le porte-monnaie des Français, Michel Barnier, sous pression budgétaire, n’a que peu de marge de manœuvre. Il pourrait cependant s’appuyer sur le programme de la droite et de la Renaissance, désamorçant efficacement les critiques futures.

Va-t-il prendre le relais la suppression d’une partie des taxes sur les factures d’électricité des Français pour financer le développement de l’éolien, une des mesures défendues par les Républicains dans leur programme ? La question est ouverte même si la mesure ne coûterait rien aux finances de l’Etat. La mesure ferait pourtant tousser les ONG environnementales.

Autre option sur la table : miser sur le boost pour les primo-accédants qui achètent un logement à moins de 250 000 euros en supprimant les frais de notaire – une mesure proposée par la majorité présidentielle lors des élections législatives. Une telle démarche coûterait au moins 3 milliards d’euros selon un rapport de l’Institut Montaigne.

La Macronie s’était aussi défendue lors de cette campagne express la création d’une complémentaire santé à 1 euro pour ceux qui n’en ont pas. Mesure symbolique qui ciblerait notamment les retraités et les chômeurs, elle a été jugée “neutre” pour les finances publiques par l’équipe de campagne de Gabriel Attal.

Lors de la campagne primaire en 2021, Michel Barnier a proposé retour à l’universalité des allocations familiales. Celles-ci étaient plafonnées sous François Hollande en fonction des ressources financières et du nombre d’enfants. Un rapport de l’Insee estime que cette mesure a permis d’économiser 800 millions d’euros chaque année.

Les mesures contre l’immigration compliquées à faire passer

Depuis son arrivée à Matignon, Michel Barnier a déjà évoqué les questions migratoires. « Nous allons faire des choses concrètes pour limiter et contrôler l’immigration qui devient souvent insupportable et qui conduit à ne pas accueillir dans notre pays ceux que nous accueillons. Et c’est aussi un problème d’humanité », a-t-il expliqué. sur France 2 le 22 septembre.

Parmi les premières idées sur la table : la fin ou l’évolution de l’aide médicale de l’État (AME) que le chef du gouvernement ne considère ni « comme un tabou ni comme un totem ». Lors de la campagne des primaires LR en 2022, Michel Barnier avait également réclamé sa suppression.

Ce système, qui permet une prise en charge à 100 % de la plupart des frais médicaux pour les étrangers en situation irrégulière, est dans le collimateur depuis des années de la droite au Sénat.

De quoi pousser le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau à remettre le sujet sur la table quelques heures seulement après son arrivée place Beauvau. L’ancien patron des sénateurs LR souhaite la remplacer par une aide médicale d’urgence aux contours beaucoup plus restrictifs.

Mais la mesure est inflammable. Toute une partie de la macronie dont les anciens ministres de la Santé et Élisabeth Borne ont déjà fermé la porte à sa disparition, moins d’un an après que la loi immigration avait déjà bien failli faire exploser le camp présidentiel.

Pour tenter de faire simple, Michel Barnier pourrait profiter du rapport Evin-Stefanini rendu public l’année dernière qui prévoyait des pistes d’évolution comme l’informatisation de la carte d’allocataire pour éviter la fraude ou encore la limitation de l’accès à certains soins. A lui ensuite de trouver une majorité à l’Assemblée pour voter une telle évolution – un défi.

La question de l’exécution des OQTF

Le meurtre de Philippine, cette jeune femme dont le corps a été enterré au Bois de Boulogne et pour lequel un suspect de 22 ans, condamné dans le passé pour viol et soumis à une OQTF (obligation de quitter le territoire français), a été interpellé, devrait également raisonner ce mardi après-midi.

Le dispositif des OQTF a été sérieusement durci sous Gérald Darmanin qui a choisi de demander aux préfets de se concentrer un temps principalement sur les « étrangers délinquants » soumis à l’OQTF, avant de leur demander finalement de l’étendre à « tous » les étrangers en situation irrégulière.

Problème : seulement 6,8 % des OQTF ont été exécutées en 2022 selon un rapport de la Cour des comptes. Notamment : une nette augmentation de cette procédure d’expulsion (60% de plus entre 2018 et 2023) avec seulement 9% d’agents préfectoraux en plus chargés de leur bonne exécution.

Pour tenter de renverser la situation, Michel Barnier pourrait donc transmettre un message de fermeté aux préfets sur l’exécution des OQTFcomme l’avait déjà fait Gabriel Attal lui-même, ce qui aurait l’avantage de ne pas être coûteux politiquement et financièrement.

Quant au retour au Parlement d’une éventuelle loi sur l’immigration qui reprendrait diverses mesures censurées par le Conseil constitutionnel, Michel Barnier pourrait être tenté de contourner l’Assemblée nationale et le Sénat en arrêtés en Conseil des ministres.

Plusieurs arrêtés ont ainsi été publiés dans les années 1970 pour restreindre la délivrance de titres de séjour ou encore en 2004 pour créer un code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Article original publié sur BFMTV.com

Anna

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