Quand la fièvre du babyfoot s’empare d’une ville anglaise

Rudi Peterschinigg, furieux, fracasse son gardien en plastique au sol. Son doigt se contracte et le babyfoot anglais vient de concéder un coup franc qui envoie son pays en prolongation dans ce quart de finale de la Coupe du monde.

La compétition a vu 300 joueurs de 26 nations s’affronter pendant trois jours dans la ville de Tunbridge Wells, dans le sud de l’Angleterre, où le Subbuteo, un jeu de baby-foot, a été inventé en 1946.

« Je ne vais pas dire que c’est le meilleur week-end de ma vie, mais il est définitivement dans le top deux », a plaisanté Hughie Best, 58 ans, venu de Perth, en Australie, pour concourir et commenter l’événement.

Près de 5 000 visiteurs se sont déplacés pour l’occasion, selon Stewart Grant, porte-parole de l’association anglaise Subbuteo, qui organise l’événement. “C’est un pèlerinage pour certains”, a-t-il déclaré.

Avec l’avènement des jeux vidéo, ce jeu d’adresse et de stratégie est passé de mode, avant de connaître un retour en force auprès des nostalgiques et de la jeune génération. Signe de ce regain d’intérêt, le tournoi de cette année est le plus grand jamais organisé.

“C’est cool, on peut contrôler le ballon et la puissance avec ses propres mains”, a déclaré Harry Brown, un spectateur de 12 ans. “J’aime le fait qu’on puisse peindre les joueurs et changer les équipes”.

Le caractère collectionnable fait également partie de l’attrait du jeu, de nombreux fans accumulant les équipes, les tribunes, les supporters, les projecteurs, les trophées et les tableaux de bord soigneusement peints à la main, sans nécessairement jouer.

– L’effet de confinement –

Pour le jeune joueur anglais Alex Scott, Subbuteo est « beaucoup plus amusant » que les jeux vidéo. Ce qu’il aime, c’est « le côté compétitif » et la possibilité de « voyager partout pour rencontrer des gens ».

Son père, Justin, dirige un club à Wolverhampton et, comme beaucoup d’autres participants au tournoi, il affirme avoir constaté une augmentation du nombre de ses adhérents.

Pendant les confinements liés à la pandémie de Covid-19, « beaucoup de gens ont trouvé leur Subbuteo dans leur grenier » et « ils ont ensuite cherché un club quand tout a rouvert », explique-t-il.

Comme au football, le but est de marquer plus de buts que son adversaire. Mais pour y parvenir, pas besoin de chausser ses crampons, il suffit d’avoir des doigts agiles pour dévier les figurines des joueurs afin de déplacer le ballon sur la table et le propulser dans les filets du gardien.

Dimanche lors du tournoi, deux poids lourds de la Premier League anglaise, Manchester City et Arsenal, se sont affrontés à quelques centaines de kilomètres de distance, sur un vrai terrain de football.

Mais au Tunbridge Wells Sports Centre, tous les regards sont restés rivés sur les tapis de jeu vert vif.

Les esprits se sont échauffés à plusieurs reprises, notamment après qu’un but anglais contre les Italiens ait été annulé de manière controversée.

Une déception vite oubliée lorsque Bob Varney a inscrit le but en or lors de la demi-finale de l’équipe d’Angleterre contre ses homologues belges. Le joueur s’est immédiatement retrouvé au cœur d’une mêlée de dizaines de coéquipiers et de spectateurs en liesse.

« N’oubliez pas qu’il s’agit d’un jeu de société pour enfants, recommandé pour les enfants de 7 à 11 ans. C’est indiqué sur la boîte », a plaisanté l’Anglais.

L’activité peut toutefois être risquée : Varney a joué avec un bandage sur le pouce après s’être blessé lors d’un arrêt. Celui qui se décrivait avec humour comme un « héros sanguinaire » n’a pas pu empêcher la défaite de son équipe en finale contre l’Italie.

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