Qu’est-ce que le Front populaire, auquel font référence François Ruffin et la gauche en vue des élections législatives ?

C’est la nouvelle ligne droite de la gauche. Après la large victoire du RN aux élections européennes ce dimanche 9 juin et la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron, François Ruffin a pris les devants. En vue d’une victoire de la gauche aux élections législatives organisées les 30 juin et 7 juillet 2024, le député sortant de la Somme a appelé à un « Front populaire » sur TF1 dès dimanche soir.

“Il n’y a pas le choix, nous devons arrêter ces conneries et être le plus unis possible (…) Voulons-nous gagner ensemble ou voulons-nous perdre séparément, c’est l’alternative qui s’offre à nous (…) J’appelle cela soirée sur Marine Tondelier, Olivier Faure, Fabien Roussel, Manuel Bompard pour qu’on se range derrière une barrière commune, une barrière du Front Populaire.

Mais qu’est-ce que le Front populaire, la coalition politique de gauche, à laquelle François Ruffin fait référence 90 ans après sa création ?

Pour comprendre ce qu’est le Front populaire, il faut remonter à d’autres élections législatives : celles du 3 mai 1936. A l’époque, Albert Lebrun était président de la République mais c’était surtout envers Léon Blum, futur Premier ministre (qui était alors appelé Président du Conseil) que tous les regards sont tournés.

Lors des élections, le socialiste de 64 ans dirigeait une coalition de gauche, le Front populaire. Parmi ses rangs figurent le Parti radical d’Édouard Daladier, le Parti communiste de Maurice Thorez et la SFIO (Section française de l’Internationale ouvrière). Le mouvement est né deux ans plus tôt, sur la base de manifestations populaires souhaitant s’unir contre « le danger fasciste » incarné par l’Action française ou les Jeunesses patriotes, au plus fort de leur tension lors des émeutes parisiennes du 6 février 1934.

Fondé sur le slogan « Pain, Paix, Liberté », le Front populaire a mis du temps à s’organiser mais a finalement développé un programme modéré : réforme de la Banque de France, nationalisation des industries… et lutte contre le fascisme. Alors que la France est submergée par les grèves, les élections de 1936 arrivent. Contre toute attente, le Front populaire a largement remporté les élections législatives avec près de 58% des voix (et un taux de participation de 84% !). C’est un choc pour la bourgeoisie, un élan de joie pour les classes populaires.

Avec son premier gouvernement (le premier à inclure des femmes et premier gouvernement socialiste de la Troisième République), Léon Blum met en œuvre des réformes sociales : réduction de la durée du travail de 48 à 40 heures par semaine, création de deux semaines de congés payés, augmentation des salaires. de 7% à 15%, relance des dépenses d’armement…

“Il y a revenu un espoir, un goût du travail, un goût de la vie. La France a une autre apparence et un autre air. Le sang coule plus vite dans un corps rajeuni. Tout nous fait sentir qu’en France, la condition humaine s’est relevée”, déclarait Léon Blum à la radio, le 31 décembre 1936.

Calomnié par l’extrême droite, le Front populaire a essuyé des déceptions, des critiques et des drames (augmentation du chômage, dévaluation du franc, suicide du ministre de l’Intérieur Roger Salengro, etc.). En 1937, et en partie parce qu’il n’est pas venu en aide militairement aux Républicains espagnols, Léon Blum perd le soutien du Parti communiste.

Le leader socialiste a donc annoncé une « rupture sociale » puis a démissionné ; il est remplacé à la tête du gouvernement par le socialiste radical Camille Chautemps (qui créera la SNCF). Le 13 mars 1938, alors qu’Adolf Hitler vient d’annexer l’Autriche à l’Allemagne, Léon Blum prend une dernière fois – et pour une courte période – la tête du gouvernement français.

Un mois plus tard, auteur d’un bilan mitigé, il démissionne. Le Sénat, dominé par la droite, vient de lui refuser les pleins pouvoirs financiers. C’est le socialiste radical Édouard Daladier, ancien ministre de la Défense, qui succède à Léon Blum à la présidence du Conseil en avril 1938. Il choisit de s’allier à la droite, sonnant définitivement le glas du Front populaire.

« Un programme pour rompre avec la Macronie »

Près d’un siècle plus tard, et alors que le Front populaire reste l’une des références majeures de la gauche française, l’idée est une nouvelle fois soutenue par François Ruffin. Dès ce matin sur France Inter, le premier secrétaire du parti socialiste Olivier Faure soutenait ce projet politique.

“Le Front populaire n’est pas le nouveau nom du Nupes, c’est ce qu’il faut faire, nous sommes dans une nouvelle séquence”, a expliqué Olivier Faure, ajoutant qu’il faut “un programme de gauche qui soit un programme de rupture avec Macronie”.

L’Insoumis François Ruffin a également été rejoint par Fabien Roussel, premier secrétaire du Parti communiste, souhaitant créer “un Front populaire pour une République sociale et écologique” et que chacune des 577 circonscriptions ne propose qu’un seul candidat de gauche à l’opposition. 30 juin prochain.

A La France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon a appelé à « l’Union, urgente, forte, claire » sur X, suivi d’une proposition de réunion des formations du NUPES aujourd’hui, demandée par Manuel Bompard. Manon Aubry, qui a obtenu hier soir 9,4% des voix aux élections européennes, a également appelé à l’unité. “La seule alternative a un nom, c’est Nupes”, a déclaré le député varois sortant sur France Inter.

Ce matin sur la même radio, François Ruffin est revenu sur son idée de Front populaire : « Je préfère gagner ensemble que perdre divisé », a-t-il déclaré. “Nous avons tout un paquet de mesures communes”, ont argué les Insoumis, évoquant le référendum d’initiative citoyenne ou l’indexation des salaires à l’inflation.

Anna

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