(Québec) Après avoir essuyé les critiques des médecins, le ministre Ian Lafrenière fait face à un obstacle de taille : le Bureau du principe de Joyce claque la porte de la commission parlementaire sur le projet de loi visant à introduire la sécurité culturelle en santé.
«Je suis plus fière des Québécois que de leur gouvernement», a expliqué la directrice générale, Jennifer Petiquay-Dufresne. Elle a lu une présentation de 10 minutes avant d’annoncer aux parlementaires qu’elle et son équipe quittaient le comité sans participer à la période de discussion. Le ministre n’a pas réagi et est resté sur place. Ses collègues du Parti libéral ont quitté la salle à la recherche de réponses.
À la reprise des travaux, le ministre Lafrenière a brièvement indiqué que le Bureau du principe de Joyce disposait néanmoins d’une note de service, qui pourrait contribuer à l’amélioration du texte législatif.
M.moi Petiquay-Dufresne a témoigné de son « inconfort » à participer à l’exercice. « Nous étions profondément mal à l’aise face à l’approche gouvernementale que nous avons observée (mardi) lors des premiers tours de consultations, ainsi qu’aux réponses données (par le ministre aux parties prenantes) », a-t-elle affirmé lors d’une mêlée de presse après sa publication.
Nous avons eu un profond malaise de voir le ministre Lafrenière mentionner à outrance le nom de Joyce tout en s’opposant à sa cause pour ses besoins et ses desseins politiques. Nous, si nous utilisons ainsi la mémoire de Joyce, c’est qu’il doit y avoir des répercussions concrètes.
Jennifer Petiquay-Dufresne, directrice générale du Joyce Principle Office
L’Office demande au ministre responsable des Relations avec les Premières Nations et les Inuits d’abandonner le projet de loi 32. Il l’invite toutefois à co-écrire un futur texte législatif avec les peuples autochtones, une option que le ministre a écartée mardi. M. Lafrenière assure avoir consulté les principaux groupes représentant les Premières Nations avant de déposer son projet de loi.
D’après M.moi Petiquay-Dufresne, cette « consultation » était clairement insuffisante. Le chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador (APNQL), Ghislain Picard, a déjà indiqué qu’il ne participerait pas à la commission parlementaire, jugeant que le projet de loi est « irrespectueux ».
Le bureau de Joyce Principe a été officiellement fondé l’été dernier. Adopté après le décès de Joyce Echaquan, ce principe « vise à garantir à tous les autochtones un droit d’accès équitable, sans aucune discrimination, à tous les services sociaux et de santé, ainsi que le droit de jouir du meilleur état de santé physique possible. mental, émotionnel et spirituel.

PHOTO SARAH MONGEAU-BIRKETT, ARCHIVES LA PRESSE
Veillée à la mémoire de Joyce Echaquan à la Place Émilie-Gamelin
Le principe de Joyce recommande également au gouvernement du Québec de reconnaître le racisme systémique. C’est à la suite du décès de Mmoi Echaquan à l’hôpital de Joliette, en septembre 2020, que le gouvernement Legault s’est engagé à légiférer pour établir l’approche de sécurité culturelle à l’échelle du réseau de la santé et des services sociaux. Le projet de loi a été déposé en juin dernier.
Mardi, le Collège des médecins a ouvert le bal des consultations particulières sur le projet de loi 32. L’ordre professionnel a vivement critiqué l’approche québécoise, affirmant que la version initiale du texte législatif n’est pas assez « contraignante », exempte de « l’empreinte des nations autochtones ». une approche « colonialiste et paternaliste ».
Au cœur de leurs griefs : le refus du gouvernement Legault de reconnaître l’existence d’un racisme systémique dans le réseau de la santé. Le ministre Lafrenière s’est dit mardi « choqué » par le départ des médecins. Le ministre n’entend pas revoir sa « position » sur le racisme systémique ni « co-rédiger » son texte législatif avec les Premières Nations, comme le demande l’ordre professionnel.
Qu’est-ce que la sécurité culturelle ?
La sécurité culturelle fait référence aux soins offerts dans le respect notamment de l’identité culturelle du patient. L’objectif est, entre autres, d’augmenter le sentiment de sécurité des Autochtones face aux services de santé publique. Le rapport de la Commission d’enquête sur les relations entre les peuples autochtones et certains services publics (la Commission Viens) recommande au gouvernement de modifier la Loi sur la santé et les services sociaux intégrer la notion de sécurité culturelle, en collaboration avec les autorités autochtones.
canada-lapresse