Seulement 10% des montures de lunettes sont fabriquées en France

Près de deux millions et demi de montures fabriquées en France sont vendues chaque année, dont la moitié à l’export. Le secteur, qui emploie aujourd’hui quelque 1 500 salariés et regroupe une cinquantaine de marques, revient de loin : il y a trente ans, décimé par la concurrence asiatique, il a vu les trois quarts de ses ateliers fermer. Ceux qui ont résisté se situent encore, pour l’essentiel, dans les vallées de Morez (Jura) et d’Oyonnax (Ain), berceaux historiques du savoir-faire lunetier français, mais aussi, plus modestement, en Ile-de-France et dans la région nantaise.

Sur les étalages des opticiens, leur production occupe une place modeste, moins de 10 %, alors que les montures chinoises, et dans une moindre mesure italiennes, représentent la majorité des équipements proposés. En termes de marge, elles sont imbattables : le coût de production d’une monture chinoise est de 50 % à 70 % inférieur à celui d’une monture fabriquée en France, celui d’une monture italienne, de 20 % inférieur.

Difficile de rivaliser sur le prix : un produit « fait main » avec le label Origine France Garantie (label créé en 2011 certifiant que la majorité du produit a été fabriqué en France ; la simple mention « Made in France » ne constitue pas la même garantie) est rarement disponible à moins de 130 euros. Pour acheter français, il faut donc payer un reste à charge puisque le remboursement des montures par l’assurance maladie est actuellement plafonné à 100 euros.

Matériaux recyclés

Consciente de ce potentiel « frein » à l’achat, la filière française milite pour que les montures fabriquées en France bénéficient d’un plafond plus élevé que les montures importées. Pour attirer les opticiens et les convaincre de les distribuer, elle mise aussi sur les préoccupations écoresponsables et le maintien de savoir-faire anciens dans la région. « Les acheteurs sont de plus en plus sensibles à ces arguments », commente Ludovic Brochard, co-gérant du fabricant français Roussilhe et administrateur de LEOO (Les Entreprises de l’optique ophtalmique), le syndicat des fabricants français de verres et de montures.

Le LEOO organise également chaque année le Tour de Manufacture, une journée portes ouvertes des ateliers, pour montrer aux professionnels la qualité du travail, mais aussi vanter les vertus du circuit court, des matières biosourcées, ou encore du recyclage, puisque les chutes d’acétate de cellulose issues de la production peuvent être réutilisées pour fabriquer de nouvelles montures.

Si certains fabricants existent depuis plus de cent ans (l’un des plus anciens lunetiers français, Vuillet Vega, a démarré en 1843), d’autres, plus récents, se positionnent sur des “niches” bien spécifiques : basée dans le Morbihan, Friendly Frenchy propose des montures en coquillages, la marque In’Bô propose des verres biosourcés en bois des Vosges, Linotte propose des verres en lin, et l’entreprise héraultaise Eio utilise comme matière première les déchets plastiques des rivières.