Société. Les libertariens purs et durs derrière la « capsule suicidaire » de Sarco

C’était le 17 juillet à Zurich. Florian Willet et Fiona Stewart prenaient place devant les médias. Tous deux se présentaient comme les promoteurs du Sarco, une capsule futuriste conçue pour tuer ses occupants en les privant progressivement d’oxygène. « La plus belle façon de mourir », Florian Willet s’enthousiasme, lors d’une présentation parfois insolite.

Philip Nitschke, auteur, médecin, concepteur du dispositif et militant pro-euthanasie, a rejoint la conférence de presse quelques instants plus tard. Les deux coprésidents de l’association The Last Resort, dédiée à « diversifier et améliorer le processus d’aide à la mort en Suisse »et l’inventeur nous assure alors : malgré la polémique autour de leur soucoupe suicide, qui venait d’être interdite sur le territoire valaisan et dont l’exploitation faisait déjà l’objet d’avis juridiques sceptiques, « Le procédé est légal et sera utilisé cette année ».

Ils ont mis leurs menaces à exécution lundi, le jour même où le Conseil fédéral annonçait la non-conformité de la capsule avec la législation suisse. Qui sont ces irréductibles ?

Défenseur du « suicide rationnel »

Le plus connu des trois, Philip Nitschke, est une personnalité publique en Australie, où il est devenu le premier médecin de l’histoire à assister légalement au suicide d’un autre être humain, en 1996.

Pendant une brève année, l’État australien du Territoire du Nord a autorisé la pratique (à nouveau en discussion depuis 2022). Et le médecin, qui a développé une machine permettant aux patients de s’inoculer des barbituriques après avoir répondu à quelques questions sur ordinateur, a accompagné quatre personnes souhaitant mettre fin à leurs jours.

Le gouvernement fédéral australien a cependant changé d’avis en 1997. Mais pas Philip Nitschke. La même année, il a fondé Exit International, qui milite pour le droit des individus à décider de leur fin de vie. Et il a continué son combat, le souffle court.

Dans le processus, il a publié Manuel de la pilule pacifiqueun livre controversé qui fournit des informations sur diverses méthodes d’euthanasie – et suscite une controverse internationale (l’accès est restreint en Australie et en Nouvelle-Zélande). En difficulté avec Canberra, il vit depuis dix ans aux Pays-Bas, d’où il a développé le Sarco – dont il est le principal auteur. « prêt gratuit » au Dernier Recours.

Suite à des accusations de conseils illégaux au suicide, sa licence médicale lui a été retirée en 2014. Avant d’être rétablie en 2015. Bien que l’Australien ait depuis choisi d’abandonner sa pratique pour embrasser son rôle d’activiste sans entrave.

Libérale autoproclamée, la septuagénaire défend l’idée de « suicide rationnel »qui postule que toute décision de mettre fin à sa vie, même sans être au seuil de la mort, peut être justifiée si elle est bien réfléchie. Et prise par une personne saine d’esprit.

« Tout est permis jusqu’à ce que ce soit interdit »

Fiona Stewart, qui a recueilli le témoignage oral du premier utilisateur de Sarco, décédé lundi, n’est autre que la compagne de Philip Nitschke. Également australienne, cette titulaire d’un doctorat en sciences de la santé et ancienne journaliste qui rédige régulièrement les chroniques d’opinion des médias océaniens, a co-écrit le Manuel de la pilule pacifique.

En juillet, dans une position audacieuse compte tenu de la pratique en Suisse, le coprésident de The Last Resort avait soutenu que le sarcophage ne nécessitait pas l’utilisation de médicaments, « Il n’y avait pas besoin de médecin sur place pendant l’intervention ».

Enfin, le troisième complice – qui aurait été arrêté mardi 25 septembre à Schaffhouse – est Florian Willet, également coprésident de l’association The Last Resort, un avocat qui a travaillé auparavant comme porte-parole de Dignitas (une organisation qui défend l’autodétermination dans le suicide) en Allemagne.

« Dans une société libérale, tout est permis jusqu’à ce que ce soit interdit. Dans une dictature, tout est interdit jusqu’à ce que ce soit permis. »Il avait soutenu en août dernier. Concernant le déploiement d’une capsule meurtrière en Suisse, il fallait sans doute être plus nuancé.