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Sur Facebook, les groupes de mères connaissent un succès confidentiel, entre solidarité, compétition et jugement

Thanasis Zovoilis/Getty Images Pour les mamans, ces groupes Facebook peuvent être une arme à double tranchant, entre espace d’échange bienveillant et nouveau vecteur de jugement.

Thanasis Zovoilis/Getty Images

Pour les mamans, ces groupes Facebook peuvent être une arme à double tranchant, entre espace d’échange bienveillant et nouveau vecteur de jugement.

PARENTATION – « Bonjour les mamans, je recherche un lit parapluie en don ou à petit prix, merci. » « Bonjour, avez-vous un pédiatre à me recommander ? ” “Aide!” Mon fils a perdu sa couverture en allant à la garderie. » Si vous êtes inscrit sur Facebook et encore plus si vous êtes parent, vous connaissez probablement ces messages. Depuis plusieurs années, ils fabriquent le sel de ce que l’on peut appeler « groupes de mamans » sur Facebook. Ou encore des groupes de parents (le plus souvent des mères) qui se réunissent par ville ou quartier sur le réseau social pour glaner bons plans et conseils pédagogiques.

Des arrondissements de Paris à ceux de Marseille, en passant par des communes de taille bien plus petite : presque tous ont le leur “groupe de mamans”où l’on retrouve le même type de publication, souvent liée à la parentalité. On y retrouve un fouillis de recommandations de professionnels de santé, de baby-sitters ou d’activités. « adapté aux enfants »recherches de matériel de puériculture, demandes d’avis sur des crèches ou des écoles… Arrivant souvent sur ces groupes sur recommandation d’autres mamans déjà au courant, les inscrites trouvent leur bonheur.

C’est le cas de Clémence, qui fait partie du groupe des mamans du 9e quartier de Paris, et qui fut immédiatement conquis par les “dynamisme” et le ” ressources “ dont les membres profitent à l’ensemble de la communauté. “J’avais complètement perdu tout intérêt pour Facebook, et finalement je consulte à nouveau l’application tous les jours pour voir ce qui se passe dans le groupe”, confie-t-elle.

Un constat partagé par Joséphine, inscrite au groupe «Mamans du 18 (et papas)» quelques mois avant la naissance de sa première fille. « J’aime l’idée de partager mon expérience avec les autres, comme les autres le font avec moi. C’est une mine d’or d’informations »dit la jeune femme.

Un espace sororal

Construire du lien social, faciliter l’entraide et le partage de bons plans entre adhérents : c’est aussi ce qui a motivé Sandra lorsqu’elle a créé une “groupe de mamans” dans la commune du Val-d’Oise où elle venait de s’installer. Avec une ambition : en faire un « espace sûr » pour les femmes, où elles peuvent se confier sans craindre le regard masculin. Si certains groupes, comme le « nouveaux parents de 19 anse »sont mixtes, celui dont Sandra est modératrice est exclusivement composé de femmes, qu’elles soient mamans ou non. «Je voulais leur donner un espace pour parlerexplique-t-elle. Cela ne fonctionnerait pas aussi bien si les hommes étaient inclus. »

Parce qu’elles s’y sentent protégées, les femmes de ces groupes n’hésitent parfois pas à s’exprimer sur leur vie familiale ou leurs problèmes relationnels. Et même s’ils ne donnent pas toujours leur identité – un mode anonyme existe pour les publications – ils trouvent une oreille attentive et parfois un peu plus. « Je me souviens d’une femme dont la séparation d’avec son compagnon se passait mal et qui cherchait en urgence un logement. Elle en a trouvé un grâce à un autre membre »témoigne Camille, inscrite dans un groupe dans une commune des Hauts-de-Seine.

Ces groupes faire prendre conscience aux parents qu’ils traversent tous les mêmes combats. Cela leur sauve des vies, particulièrement lorsqu’ils ont de très jeunes enfants ou sont confrontés à des problématiques particulières, comme un enfant handicapé, une parentalité solo ou queer, des jumeaux, etc. » explique Fabienne Lacoude, journaliste et auteure spécialisée dans les enjeux féministes autour de la parentalité. Sandra a vu cette sororité en action. « Il y a quelque temps, une mère qui avait perdu son enfant a posté un message. Elle a reçu beaucoup de mains tendues et m’a dit plus tard que le groupe lui avait sauvé la vie.”dit-elle, émue.

Donnez une image de « parent parfait »

Mais la bonne volonté entre les membres n’empêche parfois pas les dérapages, notamment dans les publications abordant des sujets clivants comme l’allaitement ou l’éducation des enfants. Camille en a payé le prix. « Un jour, j’ai demandé conseil parce que je n’aimais pas le comportement d’un ami de mon fils. J’ai reçu une avalanche de critiques dans les commentaires, c’était comme une douche froide. Après cela, il m’a fallu beaucoup de temps pour poster à nouveau. »

Toutes les mères interrogées ont déjà remarqué le groupe auquel elles appartiennent « des échanges un peu tendus » avec « Des parents donneurs de leçons »que ce soit par rapport au comportement de certaines nounous au parc, au sommeil ou à l’alimentation. Pour Fabienne Lacoude, cela n’est pas surprenant puisque ces groupes restent un moyen de promouvoir sa propre vision de la parentalité. « Vous devez réussir dans vos enfants comme vous réussissez dans votre carrière, comme vous réussissez dans votre relation »analyse le spécialiste, qui considère également que ces espaces virtuels sont le reflet des jugements auxquels les parents sont confrontés dans la vraie vie. « Le problème, c’est qu’il peut y avoir d’un coup 10, 20, 50 autres parents qui viennent expliquer au premier combien ça fait mal, ce qui s’apparente à une descente de harcèlement. »

UN “soupape de sécurité” plutôt qu’un levier d’émancipation

Depuis six ans, Sandra est également contrainte de modérer, voire de supprimer certains messages hostiles, même s’ils restent en marge. « Il m’arrive de rappeler le groupe à l’ordre. » Mais, assure-t-elle, cette activité prend beaucoup moins de temps aujourd’hui qu’elle ne l’était autrefois. « Le groupe s’autorégule avec des commentaires qui contredisent certaines positions ou invitent à prendre du recul. »

Il n’en reste pas moins que ces groupes de chrysanthèmespar l’énergie qu’elles nécessitent, pourraient être soupçonnées d’augmenter la charge émotionnelle et mentale des femmes. Même lorsque les groupes sont mixtes, ce sont majoritairement des femmes qui occupent ces espaces. Alors, à quand le même succès de “groupes de papas”où les pères débattent de la tétine ? Sandra nous invite à voir ces espaces comme “une soupape de sécurité” plutôt qu’un « un levier pour libérer les femmes de leur condition ». Pour prolonger ce lien virtuel, elle organise en parallèle « apéritifs mamans »où les membres se retrouvent et discutent autour d’un verre. « Pour certains, c’est la seule période du mois où ils peuvent respirer. Leur offrir cela, c’est déjà beaucoup »conclut-elle.

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Anna

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