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Syndrome de Chuck Bass, faux « mec sympa »… Comment les films et séries nous font aimer les hommes toxiques

LIVRE – S’introduire la nuit dans la chambre d’une adolescente et la regarder dormir (Crépuscule), menacer de sauter d’une grande roue pour inviter une femme à sortir (N’oublie jamais), cache ton pénis dans un sac de pop corn en pleine réunion (La fête)… Il existe de nombreuses scènes de cinéma qui dédramatisent et romantisent les comportements problématiques.

Et ils ne sont pas sans impact dans la vraie vie. Les films et séries nous poussent inconsciemment à désirer des hommes toxiques, voire violents. C’est ce que met en avant Chloé Thibaud dans son livre Désir de violencepublié aux Insolentes ce mercredi 24 avril. Après une préface de Lio, le journaliste analyse le « culture pop du viol » à travers des exemples bien connus du grand public.

En repensant aux films et séries qui ont façonné son adolescence, elle se rend compte que les modèles qui lui ont été présentés étaient la plupart du temps toxiques, tout comme ses propres relations amoureuses. « Ce qui est complètement normalisé et banalisé à l’écran, on finit par le banaliser dans la vraie vie »explique Chloé Thibaud à HuffPost.

Désir de violence décrypte les œuvres cultes, des séries comiques aux comédies romantiques, à travers le prisme des violences sexistes et sexuelles. « Ce livre n’est pas du tout un appel au boycott et à l’annulation de la culture, bien au contraire »insiste l’auteur, «Je prône le culture contextuellec’est-à-dire le droit absolu de continuer à regarder les œuvres que nous aimons et avec lesquelles nous avons grandi, mais en les contextualisant ».

Pour le HuffPostChloé Thibaud a scruté quelques exemples évoqués au fil de deux cents pages, à découvrir en images dans la vidéo en tête d’article.

Syndrome de Chuck Bass (et syndrome du sauveur)

Dans son livre, elle développe l’idée d’un « Le syndrome de Chuck Bass »basé sur le personnage de la série Une fille bavarde. « On pourrait aussi appeler cela le syndrome de Darcy pour Fierté ou préjugés ou le syndrome de Daniel Cleaver, en Le journal de Bridget Jones », note-t-elle. Brun foncé, voix douce et réputation d’idole, Chuck Bass est l’archétype de la masculinité toxique.

“C’est typiquement cet homme de fiction qui n’est jamais tombé amoureux et qu’aucune femme n’a réussi à conquérir”, décrit le journaliste. Malgré ses deux tentatives de viol, dès le premier épisode de la saison 1, “Chuck Bass devient très vite l’obsession des jeunes spectatrices qui regardent la série”» précise Chloé Thibaud, qui fait partie du lot.

La CW Dans la série « Gossip Girl », le couple formé par Chuck et Blair crée des fantasmes, même s’ils correspondent au cycle des violences conjugales.

La CW

Dans la série « Gossip Girl », le couple formé par Chuck et Blair crée des fantasmes, même s’ils correspondent au cycle des violences conjugales.

Le duo entre Chuck Bass et Blair Waldorf a grandement contribué au succès de la série. Pourtant, leur relation correspond tout à fait au cycle des violences conjugales : contrôle, montée des tensions, explosion de violence, puis justifications et retour à la lune de miel. “Ce cycle de violence, s’il apparaît dans la vraie vie, ne nous choquera pas vraiment puisque nous avons passé six ans de notre vie à cautionner ce qui se passe entre les personnages”conclut-elle.

Elle associe le syndrome du sauveur, décrit en psychologie, au syndrome de Chuck Bass. « Les mauvais garçons sont présentés comme des petits animaux blessés qui manquent cruellement d’amour. Et cela suscite en nous le désir de leur apporter cet amour et d’être celui pour qui cela changera., nous raconte Chloé Thibaud. Si dans les films et séries, Chuck Bass et les autres finissent par changer, les victimes de violences conjugales ne connaissent pas le même happy end dans la vraie vie.

Les faux « mecs sympas »

« Assez systématiquement, dans la fiction, on oppose la figure du « bad boy » à celle du « gentil gars », c’est à dire le gentil garçon », poursuit l’auteur. Elle les divise en deux catégories : les vraiment gentils et ceux qui le sont par intérêt. Pour Chloé Thibaud, il faut se méfier de ces derniers car ils font un discours « masculiniste à la limite, dans un schéma héroïque consistant à aller sauver la demoiselle en détresse mais de manière très intéressée ».

Cela nous rappelle que même les héros les plus inoffensifs ne le sont pas toujours. Dans L’auberge espagnole de Cédric Klapisch, Xavier, interprété par Romain Duris, commet par exemple une agression sexuelle. Suivant les conseils de son amie lesbienne, « Il force un baiser à Anne-Sophie quand elle lui dit non. Et elle lui a dit non sept fois. », précise le journaliste. Mais Xavier insiste et Anne-Sophie finit par lui rendre son baiser, et la scène prend une tournure romantique.

L’auteur de Désir de violence a été particulièrement frappé par la mise en abyme : « Quand Xavier raconte cette aventure, il dit « c’était tellement bien, c’était comme au cinéma. Au début, elle a dit “non, non, non”, puis “oui, oui, oui”. Ce genre de scène apprend aux hommes qu’ils doivent insister, mais ils enseignent aussi « pour que les femmes disent non, même si elles aimeraient dire oui »regrette Chloé Thibaud, qui évoque un « comédie du non pour se rendre désirable ».

Les gars sympas ne seraient-ils pas désirables ?

Et s’il existe des personnages masculins vraiment sympathiques, “le problème est que nous n’avons pas appris à érotiser la gentillesse, du moins jusqu’à très récemment”dit-elle, citant Mike, le mari de Phoebe dans Amisou encore Léo, L’Etre de Lumière dans Charmé et Marshall dans Comment j’ai rencontré votre mère.

« Il ne leur arrive jamais rien d’intéressant. En général, les gars vraiment sympas sont relégués au rang de gars ennuyeux, de amis ou de meilleur ami gay. »note Chloé Thibaud.

Heureusement, avec MeToo, les films et séries commencent doucement à changer et à montrer qu’un homme peut être gentil et intéressant, dès le début de l’histoire. Et surtout, demander le consentement est bien plus attractif qu’une agression sexuelle, à l’écran comme dans la vie.

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Anna

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