Travail indépendant | L’appel d’offres récent fera « exploser les coûts », selon les agences

(Québec) Le gouvernement Legault aspire à se débarrasser des agences de placement privées, mais un nouvel appel d’offres plus restrictif – et d’une ampleur sans précédent – risque de plonger le réseau public de santé «dans le chaos», prévient un regroupement d’agences.


Le groupe des Entreprises privées d’aides familiales du Québec (EPPSQ) se dit « fortement préoccupé » par la publication à la mi-décembre d’un gigantesque appel d’offres, qui fera « très certainement exploser les coûts » de l’utilisation de la main-d’oeuvre. du travail indépendant dans la santé, selon lui.

Selon son estimation, l’État québécois pourrait payer au moins 800 millions de trop pour la durée maximale du contrat, soit deux ans.

Le Centre d’acquisition du gouvernement (CAG) a lancé un appel d’offres pour combler des besoins estimés à plus de 8 millions d’heures de travail à effectuer par la main-d’œuvre d’agences privées. Ce volume sans précédent est basé sur les besoins estimés par les CIUSSS et les CISSS de la province pour la prochaine année.

Le problème, aux yeux de l’EPPSQ, c’est que le Québec vient d’introduire pour la première fois la notion de « tarif unique », ce qui veut dire qu’un soumissionnaire doit proposer un tarif unique par catégorie d’emploi, que le service soit offert à Montréal ou à Sept -Îles, sinon c’est inadmissible.

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PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Patrice Lapointe, président des Entreprises privées d’aides familiales du Québec

« Peu importe où j’envoie ma ressource, je dois facturer le même tarif », illustre le président du groupe, Patrice Lapointe. Selon lui, les agences vont donc se retrouver avec deux options : faire payer plus les zones urbaines ou proposer un prix qui réduira l’offre dans les zones reculées, d’où l’estimation d’une augmentation globale des contrats qui seront conclus.

« Soit on explose les prix […] ou nous arrivons à créer beaucoup plus de risques de [ruptures] services en régions éloignées, déjà très fragiles », explique M. Lapointe, dont l’association – la plus importante au Québec – regroupe 21 organismes privés.

Des effets redoutés dans la région

Patrice Lapointe craint que de moins en moins d’agences soient en même temps prêtes à envoyer des travailleurs de la santé dans des régions éloignées comme la Côte-Nord ou l’Abitibi-Témiscamingue, où les établissements sont fortement dépendants de la main-d’œuvre. travail indépendant.

Une infirmière pour la région de Montréal coûte en moyenne 71,87 $ de l’heure, toutes dépenses comprises, alors que la moyenne dans la région peut dépasser les 100 $ de l’heure, rapporte l’EPPSQ.

« On va se retrouver à devoir augmenter les tarifs à certains endroits alors que ça ne devrait pas être ça », témoigne la directrice principale de l’agence Code Bleu, Caroline Casabon. L’agence, qui emploie entre 300 et 400 personnes, dessert à la fois les grands centres et les régions plus éloignées.

« C’est un tarif unique, donc je n’ai pas le choix. Je trouve ça un peu ironique, parce que si on écoute tout ce qui se dit, ce sont toujours les agences qui portent la faute, le poids de tout, et c’est [le gouvernement, avec cet appel d’offres]ce qui nous met dans une position comme ça », déplore-t-elle.

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PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Caroline Casabon, directrice principale de Code Bleu

Comme l’appel d’offres est toujours ouvert (il doit se terminer le lundi 23 janvier et l’EPPSQ demande qu’il soit reporté au 1er janviereuh mars), le ministère de la Santé et des Services sociaux n’a pas souhaité commenter la mise en place du tarif unique.

Le ministre de la Santé, Christian Dubé, affirme publiquement vouloir sevrer le réseau public des agences de placement privées d’ici trois ans.

« Bien que nous souhaitions faire évoluer rapidement ce mode de gestion, il est important de bien faire les choses », a indiqué mercredi son cabinet. « En particulier, nous devons respecter la réalité de chaque région pour assurer une transition saine », a-t-il ajouté.

Par ailleurs, Christian Dubé « travaille sérieusement sur l’option » de légiférer pour mieux encadrer le recours aux agences, notamment avec la fin de la loi 28, qui maintenait en vigueur les arrêtés ministériels liés à la pandémie malgré la levée de l’Etat. urgence sanitaire.

La loi 28, qui a expiré le 31 décembre, obligeait les agences à respecter les prix plafonds de la main-d’œuvre. Ces décrets autorisaient également une hausse de prix de 20 % pour les régions éloignées.

Ajout de « régions adjacentes »

Toujours dans cette stratégie cadre, l’appel d’offres durcit également les critères de non-concurrence. Ainsi, une infirmière qui quitte le réseau public ne peut, pendant une période d’un an, travailler dans un établissement pour une agence de la même région administrative que son ancien employeur ou même « dans les régions limitrophes » nouvel arrangement.

L’ajout de « régions limitrophes » est exagéré et augmentera aussi les frais de déplacement des travailleurs, soutient l’EPPSQ. Le Ministère répond qu’il s’agit d’une mesure favorisant la rétention.

L’EPPSQ se dit favorable à un meilleur encadrement des agences alors que bon nombre d’entreprises « aux pratiques douteuses » sont apparues depuis la pandémie. Mais les mesures prises pour y parvenir « n’auront pas les effets escomptés », selon Patrice Lapointe, puisque les critères introduits rendront les contrats « inapplicables » sur le terrain.

Le groupe déplore également d’être tenu totalement « à l’écart » des discussions avec le gouvernement. Une offre de collaboration envoyée la semaine dernière au bureau du ministre Christian Dubé est restée lettre morte, nous a-t-on dit.


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