Bras gauche replié, bras droit tendu en arrière, armé d’une lance calée contre l’appendice en forme de crochet de son propulseur, Matthieu Lacoste se concentre. Avec leurs grandes queues qui peuvent être constituées de plumes d’oie ou de paon, les sagaies sont particulièrement sensibles au vent qui souffle sur le plateau du Vercors et les dévie. “Nous ne battrons pas de records aujourd’hui”, note-t-il, avec philosophie. Et, soudain, son bras se détend tel un ressort, lâchant à mi-course son projectile qui s’enfonce dans le corps d’un ours des cavernes tiré sur une cible à 20 mètres. C’est bien un sport, mais un sport né de la science archéologique.
Actuel champion d’Europe de tir aux armes de jet préhistoriques, qui comprend également l’arc, Matthieu Lacoste fait partie de la trentaine de concurrents qui s’affrontent ce 31 mars, près du Musée de Préhistoire de Vassieux-en-Vercors (Drôme). Adjoint à la conservation du patrimoine et médiateur dans cet établissement, Loïc Mathieu on espérait une cinquantaine de participants, mais la météo en a découragé plus d’un, dont certains avaient prévu de venir habillés en peaux de bêtes. Plusieurs des « stars » du circuit ont néanmoins répondu présents. Kuno Bay est venu de Suisse alémanique, Jurgen Junkmanns, archéologue, auteur d’un ouvrage de référence, Arc et des flèches. Fabrication et utilisation au Néolithique (Musée Schwab, 2006), arrivés de Cologne (Allemagne) et Luis Angel Breton, lointain descendant des Armoricains, a fait le voyage depuis La Rioja (Espagne).
Ce championnat unique, disputé chaque année, toujours à proximité d’un musée ou d’un site archéologique européen, en est à sa 34ème édition.e édition. Pour 2024, le circuit officiel compte trente-cinq étapes réparties entre la France, l’Espagne, l’Italie, la Belgique, la Suisse et l’Autriche.
Chaque manche se déroule sur un week-end. Le samedi après-midi est consacré au tir à l’arc et le dimanche matin au tir à l’arc. Pour être classé, tout le monde doit concourir en trois au minimum. L’épreuve consiste à réaliser un parcours en terrain naturel et à tirer une fois sur chacune des trente cibles ornées de dessins d’animaux du Paléolithique supérieur et du Mésolithique (hyène, tétras, bœuf musqué, mammouth…) ou, à défaut, à réaliser trois fois le même parcours de dix cibles, comme ce fut le cas à Vassieux, où alternent sous-bois et prairies. Les distances de tir varient de 8 à 26 mètres, le décompte des points se fait selon des cercles concentriques attribuant un à cinq points, comme sur une cible classique.
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