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« Un lien puissant unit nos mémoires et notre orientation dans l’espace »


“LVieillir est essentiellement une opération de mémoire », écrivait Charles Péguy dans Clio. « Or, c’est la mémoire qui fait toute la profondeur de l’homme. » Ces dernières resteront quasiment intactes pour certains, tandis que d’autres verront disparaître des pans entiers de leur identité et de leur histoire. Comprendre le fonctionnement de nos mémoires – il existe une douzaine de systèmes de stockage mémoriels différents – est donc essentiel, à la fois pour préserver celles des personnes en bonne santé, mais aussi pour atténuer, voire ralentir, les troubles de la mémoire. ceux qui perdent leurs repères. Lionel Naccache, neurologue, spécialiste des sciences cognitives, professeur à Sorbonne Université (Paris) et chercheur au Brain Institute, sera présent au 5e édition des Estivales de la Fondation Partage et vie, dédiée à la mémoire et organisée en partenariat avec Indiquer, le 19 juin prochain à Paris.

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Indiquer : Que savons-nous aujourd’hui de la mémoire ?

Lionel Naccache : Le premier message clé est qu’il ne s’agit plus de mémoire, mais de mémoires, au pluriel, d’une douzaine de systèmes différents. Cette nuance est importante, à la fois d’un point de vue théorique, pour mieux comprendre le fonctionnement de notre mémoire, mais aussi d’un point de vue pratique, pour les patients.

En identifiant les briques déficitaires de leur système mnésique et en utilisant les formes de mémoire préservées de ces patients, nous pouvons développer des méthodes de rééducation leur permettant de compenser, au moins en partie, leurs difficultés.

Mais l’une des découvertes les plus importantes de ces trente dernières années est celle de placer des cellules, ces « neurones de lieu » situés dans l’hippocampe – la zone de notre cerveau dont dépend en partie notre mémoire épisodique, celle qui crée nos souvenirs et notre identité. Ces neurones codent en permanence notre position et notre trajectoire dans l’espace, exactement comme le ferait un GPS.

Poursuivant ces progrès, une découverte encore plus fascinante a été faite dans les années 1990 : le phénomène du « night replay ». Notre cerveau rejoue en boucle, des milliers de fois, à l’endroit, à l’envers et en accéléré, les trajectoires de la journée lorsque nous sommes en phase de sommeil profond. Cette « relecture » est cruciale pour consolider notre mémoire, non seulement spatiale, mais aussi épisodique, pour nous souvenir de ce que nous faisions là où nous étions. En d’autres termes, il existe un lien puissant entre nos souvenirs et notre orientation dans l’espace.

Notre vie sédentaire derrière un écran peut-elle avoir un impact négatif sur la consolidation de notre mémoire ?

Il s’agit d’une question clé, qui soulève un point essentiel sur les liens entre cognition et expérience corporelle, ou ce que nous appelons cognition incarnée, « cognition incarnée ». Dans quelle mesure la simulation mentale d’une situation peut-elle remplacer l’expérience physique de celle-ci ? Une promenade virtuelle peut-elle produire les mêmes effets physiques qu’une marche physique ?

Les réponses ne sont pas claires et font l’objet de recherches, mais j’aurais tendance à dire que, virtuelles ou réelles, ces « escapades » doivent permettre de s’orienter et la conception des lieux, tant physiques que virtuels, doit y obéir. principes pour rendre nos pérégrinations les plus riches possibles.

Pourquoi certaines personnes développent-elles des problèmes de mémoire ?

Malheureusement, la liste des causes possibles est longue. Les troubles de la mémoire sont intrinsèquement liés au fonctionnement et à la structure du cerveau, ainsi qu’à divers événements de la vie, comme les maladies neurologiques ou psychiatriques, les effets secondaires des médicaments, ou encore les troubles du sommeil.

Pour chaque patient, c’est une enquête à la Sherlock Holmes.

Certaines causes sont plus réversibles que d’autres. Les maladies neurodégénératives, comme la maladie d’Alzheimer, endommagent progressivement les réseaux cérébraux essentiels à la mémoire épisodique, tandis que la dépression ou les troubles du sommeil affectent le fonctionnement cérébral, mais pas nécessairement sa structure, permettant une récupération de la mémoire si l’état du patient s’améliore.

Quels sont les facteurs de risque de ces pathologies ?

Le premier facteur est le sommeil. Pour entretenir sa mémoire, il faut maintenir un sommeil de qualité et soigner les troubles du sommeil s’il y en a. La plupart du temps, ils peuvent être améliorés, voire guéris.

Sur le plan médical, même si l’on ne peut actuellement stopper les maladies neurodégénératives, on a identifié des facteurs de risque cardiovasculaire, comme l’hypertension artérielle, le diabète ou encore le cholestérol. Ces facteurs provoquent eux-mêmes des troubles cognitifs et de la mémoire. Par exemple, certains patients développeront des problèmes de mémoire dus à l’accumulation de petites lésions vasculaires. Agir sur ces facteurs – et nous le faisons plutôt bien aujourd’hui – permettra de limiter les dégâts et, indirectement, d’atténuer l’impact des maladies neurodégénératives.

Certaines substances toxiques, comme l’alcool, sont à éviter, mais prendre soin de sa santé mentale joue également un rôle majeur. L’humeur, la dépression, le stress, l’anxiété peuvent exacerber les problèmes de mémoire.

Un exemple de conseils pratiques pour accompagner au mieux les personnes qui ont des problèmes de mémoire ?

Avec ce type de pathologies, une perturbation des rythmes nycthéméraux, les rythmes veille-sommeil, se produit souvent. Cette perte de repères se traduit par exemple par des errances nocturnes que l’on cherche généralement à inhiber avec des psychotropes ou des neuroleptiques.

Un moyen simple de réduire le recours aux médicaments liés à ces troubles – qui peuvent être néfastes pour d’autres fonctions cognitives – tout en préservant un sommeil de qualité est de jouer sur les espaces et la lumière. Avoir des environnements bien éclairés le jour et mal éclairés la nuit permet de guider la sécrétion cérébrale endogène de mélatonine et donc d’en limiter les dégâts.


Anna

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