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(vraie) bonne nouvelle ?

Les émissions de gaz à effet de serre ont diminué de 5,8 % en France par rapport à 2022. C’est ce que vient d’annoncer Gabriel Attal, en s’appuyant sur les chiffres de l’organisme CITEPA. Une baisse meilleure que l’estimation provisoire qui avait été donnée en mars avec une baisse de 4,8%.

Source : Twitter
(notez qu’il s’agit de CO2e et non de CO2, cela inclut tous les gaz à effet de serre)

Tous les deux mois, le gouvernement annonce une baisse historique des émissions en France, et tous les deux mois, ce chiffre mérite d’être analysé en détail par secteur. Oui, une baisse des émissions est toujours une bonne nouvelle, et cela ne sera jamais discutable. Mais comme toujours, le diable se cache dans les détails.

-5,8% des émissions : quels secteurs ont le plus baissé ?

La baisse est notamment due à 3 secteurs : le bâtiment (-5%), au climat doux et donc favorable à la réduction du chauffage, l’industrie avec -9% (les prix de l’énergie ont joué) et la production d’énergie avec -8%, où le retour à la disponibilité du parc nucléaire a fait du bien et a remplacé les énergies plus carbonées utilisées en 2022.

Source : CITEPA, ÉMISSIONS DE GAZ À EFFET DE SERRE EN FRANCE 2023

En revanche, les transports représentent 31 % des émissions en France et ne sont en baisse que de 4 %. Si l’on rentre dans le détail, le secteur aérien voit même ses émissions exploser, avec notamment une augmentation de 16 % pour les vols internationaux. Cet élément devrait être systématiquement rappelé par les médias ou les personnes qui interrogent le gouvernement.

L’occasion de demander des comptes à Emmanuel Macron qui « aime les voitures » et les avions verts, mais baisse un peu moins les émissions et agit sur la demande, malgré les recommandations du Haut Conseil pour le climat.

Du côté de l’agriculture, les émissions de GES agricoles, au total, sont en baisse de 1,6% entre 2022 et 2023 en lien avec la baisse des émissions de CH4 et N2O.

Cette très légère baisse n’est pas une surprise et reflète le maintien de ce que Nicolas Legendre appelle le modèle dominant, à savoir productivisme agro-industriel, hyperconcurrence mondialisée déformée et administrée (avec beaucoup de subventions et de normes), mécanisation et robotisation pensées comme des fins en soi, expansion des exploitations agricoles, dette, financiarisation, spécialisation des exploitations agricoles et standardisation de la production et de l’alimentation. des habitudes.

Déclin économique et manque de mesures structurelles

Quand on regarde les chiffres dans le détail, on constate que cette baisse est plus cyclique que structurelle. Pour que ce soit le cas, il faudrait un investissement massif dans les transports publics, un report modal, une politique permettant de réduire les produits d’origine animale, un investissement massif dans la rénovation… Est-ce le cas ?

La réalité est que le gouvernement a décidé de couper 2 milliards dans le budget de la transition écologique fin février 2024, la plus forte réduction budgétaire allant à la catégorie « Écologie, développement durable et mobilité ».

Comme le rappelait le Haut Conseil pour le Climat il y a un mois, notons également que le gouvernement est très en retard sur plusieurs sujets clés :

  • la loi de programmation énergie et climat n’est pas adoptée
  • la stratégie énergétique et climatique française n’est pas adoptée
  • la 3ème Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC3) est en retard
  • le 3ème Plan National d’adaptation au changement climatique est en retard
  • le 3e programme pluriannuel de l’énergie n’est pas adopté

    Enfin, ces chiffres concernent les émissions sur le territoire français et ne prennent pas en compte les importations. Notre empreinte carbone est stable en 2022, ce qui est extrêmement grave au regard de nos objectifs climatiques.

Nos forêts en danger

Les événements climatiques continueront de s’intensifier jusqu’à ce que le réchauffement climatique soit stoppé. Pour ce faire, nous devons atteindre la neutralité carbone. Pour atteindre la neutralité carbone, les puits doivent « compenser » les émissions. C’est très simple à comprendre, mais un peu plus difficile à concrétiser.

La Stratégie nationale bas carbone (SNBC2) prévoit de doubler les puits de carbone grâce aux contributions de la foresterie, de l’agriculture et des technologies de captage et de stockage géologique du CO2. Non seulement le niveau de 80 millions d’émissions semble optimiste, mais le niveau des puits de GES aussi !

Mauvaise nouvelle, on apprenait en avril 2023 auprès de Philippe Ciais, chercheur au LSCE, que les forêts françaises absorbent deux fois moins de carbone qu’il y a dix ans. Nos forêts se portent mal à cause des sécheresses, des incendies et des espèces envahissantes, des parasites et des insectes dits nuisibles.

Si les puits n’absorbent pas finalement autant que prévu, nous devrons nécessairement réduire nos émissions pour atteindre la neutralité carbone. Le CITEPA le rappelle également dans sa note : «En revanche, en comptant l’UTCATF, le budget carbone 2019-2023 n’est pas respecté (moyenne observée de 380 Mt contre un objectif de 379 Mt, soit un excédent de 1,4 Mt).

Émissions de GES hors puits de carbone et budget carbone. Crédit : CITEPA

L’explication donnée par le CITEPA est très claire et devrait être systématiquement rappelée lorsqu’un membre du gouvernement se vante d’une baisse historique des émissions. Nos puits de carbone sont également en « déclin historique » :

Estimé à environ -45 Mt CO2 en moyenne dans les années 2000, ce puits s’est considérablement réduit pour atteindre environ -20 Mt CO2 ces dernières années, notamment sous l’effet conjugué des sécheresses à répétition depuis 2015, des maladies affectant le taux de mortalité des arbres, et d’une augmentation des récoltes de bois. Cette réduction du puits implique un effort encore plus important dans d’autres secteurs afin d’atteindre la neutralité carbone.

Beaucoup de communication, peu d’action

Sans changements structurels, nous n’avons aucune chance d’atteindre nos objectifs climatiques. La neutralité carbone n’arrivera pas avec quelques voitures moins polluantes et des avions un peu plus écologiques.

Gabriel Attal a déclaré hier « Nous n’avons de leçons à tirer de personne en matière d’efficacité écologique et environnementale ». Il est certain qu’un gouvernement peut continuer à ignorer les scientifiques, le Haut Conseil pour le climat, les rapports du GIEC, tout en criminalisant ceux qui réclament des actions plus concrètes.

Mais si le Haut Conseil pour le Climat déclare que la France n’est pas prête et que le gouvernement doit faire plus, ce n’est pas par plaisir, mais par nécessité. Le changement climatique met déjà les Français en danger et ce sera de plus en plus le cas dans les années à venir.

Anna

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