Le réalisateur chinois signe un film à tiroirs et une satire philosophique qui explore la porosité entre réalité et rêve. « Only the river flow » a remporté le Prix du Jury. Poétique.
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Dès le début du film Seule la rivière coulePrix du Jury à 4e Festival du film policier de Reims, Wei Shujun pose un regard critique sur la relation entre cinéma et réalité. Dans le sud de la Chine, dans ce qui n’est pas vraiment une ville mais plutôt un village, le commissaire de police informe Ma Zhe, son enquêteur principal, qu’il a une bonne nouvelle pour lui : le directeur du cinéma local ferme la salle en raison de la baisse drastique de la fréquentation. “Plus personne ne va au cinéma, on va en faire un prétexte pour des enquêtes.” Le chef de la police judiciaire prend donc place dans la salle de projection et son équipe sur scène.
Les lieux sont poussiéreux, abandonnés. Le pays ne connaît pas encore le boom actuel. Les bâtiments sont détruits mais les nouvelles constructions tardent. C’est dans cette transition floue que Wei Shujun met en place son histoire qui finira par impacter tous les personnages.
Rêve et réalité
Nous sommes en 1995, il pleut continuellement à Banpo. Le meurtre sordide d’une vieille dame réveille les blessures invisibles des habitants. Sur place, les policiers ont retrouvé un sac à main. Qui est la dame aux cheveux longs vue par les témoins ? Les spéculations s’enveniment. Après Les ondulations de la vie en 2021, le jeune réalisateur chinois, qui tournait les scènes par ordre chronologique et en 16 mm, se lance dans un thriller sombre et à plusieurs niveaux.
Seule la rivière coule, adaptation d’une nouvelle de Yu Hua, propose plusieurs niveaux de lecture et aborde des thématiques variées. La coqueluche de Cannes, dont la quasi-totalité de ses courts et longs métrages ont été sélectionnés sur la Croisette, aborde des sujets sensibles : altérité, tolérance, aliénation, pression de la hiérarchie…
L’une des originalités du film, au-delà de l’esthétique et de l’intrigue, est sa double narration. On suit l’avancée de l’enquête mais aussi la vie familiale de l’inspecteur Ma Zhe. Les deux aspects, sans être intimement liés, interagissent comme par un effet miroir. Avec pour corollaire une perte de repères pour Ma Zhe, mais aussi pour le public. Les frontières entre réalité et rêve deviennent poreuses.
Est-ce une métaphore entre cinéma et réalité ? Emmené par la star chinoise Zhu Yilong, le personnage principal sombre dans une forme d’irréalité alors que les meurtres s’accumulent et que sa vie personnelle déraille. Seule la rivière coule s’éloigne du code policier pour explorer d’autres pistes. Avec joie.
Formulaire
Titre : Seule la rivière coule, d’après une nouvelle de Yu Hua
LANGUES : Chinois sous-titré en français
La concrétisation : Wei Shujun
Distribution : Yilong Zhu, Zeng Meihuizi, Tianlai Hou
Durée : 1h42
Genre : thriller, détective
Sortie en salles : 5 juin
Synopsis: En Chine, dans les années 1990, trois meurtres ont été commis dans la petite ville de Banpo. Ma Zhe, le chef de la police criminelle, est chargé de résoudre l’affaire. Un sac à main abandonné au bord de la rivière et des témoignages de passants pointent plusieurs suspects. Alors que l’affaire s’enlise, l’inspecteur Ma est confronté aux ténèbres de l’âme humaine et sombre dans le doute…