Au tribunal de Marseille, l’arrière-garde de Didier Raoult se bat

Cheveux blancs tombant toujours sur ses épaules, veste bleue, pantalon en velours beige, Didier Raoult tapote nerveusement de sa chevalière tête de mort à la barre des témoins. « M. Raoult, calme-toi. s’agace le président du 11e Chambre correctionnelle de Marseille. Son tribunal étudie, mardi 14 mai, une nouvelle plainte en diffamation de l’ancien directeur de l’Institut hospitalier universitaire (IHU) Infection Méditerranéenne, exfiltré de ce poste depuis 2022. Cette fois, la cible est le directeur général de l’Assistance publique- Hôpitaux de Marseille (AP-HM), François Crémieux, avec qui le microbiologiste entretient un grave conflit.

M. Crémieux est assigné en justice comme directeur de la publication du journal interne hebdomadaire des hôpitaux de Marseille, adressé par email aux 10 000 salariés de l’AP-HM. Le 29 octobre 2021, cette newsletter, réalisée par le service communication, présente un choix d’articles et de vidéos dont une partie revient sur les accusations qui pèsent alors sur l’IHU. Parmi ces titres, un sujet de Médiapart du 27 octobre qui annonce que les premières conclusions d’une enquête interne aux hôpitaux de Marseille confirment l’existence d’« essais cliniques sauvages » à l’IHU sur des patients atteints de tuberculose.

 » Une campagne de calomnie et de désinformation particulièrement odieuse contre la partie civile », dénonce Ludovic Heringuez, l’un des avocats de Didier Raoult.  » Une attaque ad hominem de M. Crémieux », ajoute l’intéressé, qui déplore qu’une lettre interne puisse viser « ses propres salariés.

Un règlement de compte

A 72 ans, le microbiologiste star n’a rien perdu de sa pugnacité et de son arrogance. Il répond «  Je m’en fiche «  quand une question de la défense le dérange, s’occupe du journal Médiapart de «  des voyous  » alors  » bande de charognards » et rit d’une de ses propres remarques. « Je ne vois pas ce qu’il y a de drôle » le juge la gronde.

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Dans la salle, l’ambiance est cependant bien plus apaisée que le 2 mars, lorsque la chambre étudiait deux plaintes similaires dans un climat tendu. Cette fois, seuls quelques fidèles du clan Raoult sont présents. Dont le professeur Chabrière, toujours actif sur les réseaux sociaux pour défendre son mentor et qui sera le seul à devoir être recadré par le président.

Comme lors de cette précédente audience, Didier Raoult a profité de la parole donnée pour se lancer dans un monologue décousu. Succès de l’hydroxychloroquine dans le traitement du Covid-19, inutilité de la vaccination en dehors de la population à risque, méconnaissance des médias et des représentants des ministères qui ont procédé à des inspections dans ses services… Il ressasse une fois de plus sa vision des événements qui ont conduit à l’interdiction de la communauté scientifique internationale. Le tribunal doit la replacer dans le contexte de la plainte pour que celle-ci commence à dessiner les contours de ce qui ressemble à un règlement de comptes.

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