Pourquoi l’exécutif a-t-il interdit TikTok ?


Uune décision sans précédent. Mercredi, en réaction aux émeutes qui ont déjà fait cinq morts, dont deux gendarmes, le Premier ministre Gabriel Attal a annoncé le déploiement de militaires « pour sécuriser » les ports et l’aéroport de Nouvelle-Calédonie, mais aussi l’interdiction du réseau social chinois TikTok. .

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Si la question s’était posée lors des émeutes de 2023 après la mort du jeune Nahel, tué par un policier, cette fois le gouvernement a tranché. Un premier.

Pourquoi TikTok est-il dans le collimateur du gouvernement ?

Cette mesure est liée au régime de l’état d’urgence, qui prévoit à l’article 11 de la loi du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence que le gouvernement « peut prendre toute mesure pour assurer l’interruption de tout service de communication publique en ligne provoquant ou prônant des actes de terrorisme. Une décision « discutable » d’un point de vue juridique selon l’avocat public Nicolas Hervieu. « Le lien avec le terrorisme est plus que douteux… », écrit à son compte ce professeur de droit à Sciences Po et à l’université d’Évry. X (ex-Twitter). La plateforme serait en effet utilisée par les émeutiers pour promouvoir leurs actions.

« Il est certain que (TikTok) est régulièrement impliqué, du fait de son utilisation, dans des faits de délinquance », a assuré Emmanuel Pointas, vice-président du tribunal de Nouméa, sur BFMTV. Pour ces derniers, la plateforme a permis de « diffuser des informations qui ne sont pas forcément des informations fiables. Et dans l’état actuel des choses, la diffusion d’informations peu fiables ne peut qu’augmenter les risques de troubles et les risques d’émeutes. On peut concevoir que l’accès à des informations vérifiées dans la situation où l’on est aussi un élément du retour au calme.»

LIRE AUSSI Émeutes en Nouvelle-Calédonie : qu’est-ce que le CCAT, qualifié de « mafia » par Darmanin ? Contacté par Indiquer, le cabinet du Premier ministre n’a pas, pour l’instant, répondu à nos demandes. Contacté par le média spécialisé Numerama, le cabinet de Gabriel Attal a indiqué que « TikTok a été effectivement interdit mercredi par le Premier ministre et le gouvernement en raison des ingérences et des manipulations dont fait l’objet la plateforme, dont la maison mère est chinoise. L’application est utilisée comme support de désinformation sur les réseaux sociaux, alimentée par l’étranger et relayée par les émeutiers.

Selon Nicolas Hervieu, cette interdiction pour ce motif, « aussi grave que soit la situation », « n’est *pas du tout* un motif prévu par la loi. Cette illégalité pose question.» «Si la question de sa légalité est soulevée, le juge peut dire que les émeutiers avaient accès à d’autres réseaux sociaux et que l’interdiction a été appliquée pour des motifs précis à l’encontre d’une entreprise en particulier», a expliqué l’avocat à Numerama Alexandre Archambault.

Une telle mesure est-elle possible en France métropolitaine ?

Depuis le début de la crise en Nouvelle-Calédonie, les autorités françaises craignent fortement les ingérences de l’Azerbaïdjan, régime proche de Moscou. « L’Azerbaïdjan n’est pas un fantasme, c’est une réalité », regrettant « qu’une partie des séparatistes ait passé un accord » avec ce régime.

Cette interdiction de TikTok « est en vigueur et elle fonctionne de manière opérationnelle (uniquement sur les téléphones). C’est l’Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie qui est intervenu depuis hier pour bloquer l’accès à l’application », a indiqué Matignon mercredi soir.

Cette interdiction est rendue possible en Nouvelle-Calédonie notamment en raison de la compétence spécifique s’appliquant à l’île, en dehors des règles de l’Union européenne, régie par la loi sur les services numériques. C’est d’ailleurs notamment pour cette dernière raison qu’une telle mesure ne pourrait être prise unilatéralement par les autorités françaises en cas d’émeutes en métropole.

LIRE AUSSI Nouvelle-Calédonie : « Le projet de révision constitutionnelle ne mentionne aucun nouveau référendum » Lors des émeutes qui ont suivi la mort de Nahel, Thierry Breton, commissaire européen au Marché intérieur, a déclaré sur France Info que « si les plateformes n’agissent pas immédiatement » pour supprimer les contenus incitant à la haine, « alors, oui, nous pourrons à ce moment-là non seulement donner une amende, mais interdire l’exploitation sur notre territoire. Il a ensuite expliqué dans une lettre ouverte qu’il appartient aux juges d’interdire les réseaux sociaux, « dans les situations extrêmes », « en dernier recours », « comme par exemple en cas d’incapacité systémique (de la plateforme, NDLR) mettre fin aux infractions liées aux appels à la violence ou à l’homicide involontaire. Ce blocage peut toutefois être facilement contourné grâce à des outils de type VPN.